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sur 205 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Le roman se déroule au XIXème siècle. Il commence par un très long flash back. Hortense, la fille de Jean Baptiste Lecoeur, médecin à Rapilly en Normandie, dans la vallée de l’Orne précisément, vient de solder l’héritage de son père et va s’embarquer sur un bateau pour les Amériques où elle va rejoindre son frère, François : «qui s’était embarqué (...) comme médecin navigant au commerce, (et a ) choisi après son contrat de s’exiler à Boston aux Amériques, où il pratique loin de son père.»

Hortense regarde une dernière fois, avant de partir, cette maison où elle a grandi et où son père a vécu jusqu’au dernier jour :
«Elle pensera qu’elle n’est jamais partie.
Qu’importe tout cela, à présent elle est libre.
Orpheline, veuve et libre.»
Dans l’héritage, outre la maison et la ferme que son père gérait comme un modèle inspirée des théories hygiénistes de l’époque, elle trouve :
Une pile de lettres entre son père et le Médecin Major Charles Rochambaud, en partance pour l’Italie où les troupes de Napoléon III sont engagées dans la bataille pour l’Unité Italienne et vont stationner près de Solferino...
Le journal de bord de son père qui décrit de façon scrupuleuse les tournées du médecin dans la campagne normande, ses relations avec les autorités, les interrogations qui le hantent quant à la volonté de ces dernières à promouvoir une politique de santé à même de garantir le bien être des populations en luttant contre les obscurantismes encore très présents malgré les progrès de la science médicale.

A bord du bateau, Hortense va lire ces documents qui retracent de façon détaillée la vie de son père qui a fait de son métier de médecin un véritable sacerdoce. Comme le curé, (on ne parle pas encore d’instituteur) il est au service de la population et plus particulièrement au service des pauvres et des indigents.
Qu'importe en effet la douleur des malades si son abrogation met en péril un confort établi depuis longtemps ?» écrit-il au colonel Rochambaud.

Hortense découvre un père différent de celui qu’elle a connu «(...) enfant, il n’était pas rare que, descendant en pleine obscurité pour se dérober à un cauchemar, elle le trouve étendu à cette place, parfois riant tout seul de sa lecture. Il se levait et la prenait dans ses bras pour la consoler.»

Le Coeur a perdu sa femme , il s’inquiète pour Hortense devenue la femme d’un notaire qu’il n'apprécie guère :
«Mon gendre, l'ineffable Mortier a émis les plus fermes réserves sur l’air «la femme dont le coeur rêve» joyeusement interprété par Sophie du Veran, charmante Eurydice, et qua joliment accompagnée mon Hortense au clavier. Je ne sais pas ce qu’elle peut trouver à ce notaire de mari, rabat-joie et triste comme un abat-jour. J’ignore pourquoi ces jeunes gens ont choisi ma demeure pour se retrouver .»

Il porte sur la conscience la mort de son fils Gaston, médecin lui aussi, : «Mon pauvre Gaston qui dort sous les sables ou les cailloux de quelque djebel algérien.»
Le Coeur a refusé de racheter le numéro de son fils qui le contraignait à être enrôlé : «Gaston est mort parce que je n’ai pas été capable de sacrifier mon opinion à son destin.»

La confrontation entre les échanges épistolaires et le journal offre des éclairages différents sur les mêmes événements, permettant de mesurer ce que pense le docteur Le Coeur et ce qu’il en dit à son collègue Rochambaud.
Le Coeur a été formé à ce métier dès le plus jeune âge, adolescent, il suivait son père médecin lui-même,
Rochambaud lui est médecin par défaut.
L’échange entre les deux hommes (15 février 1859 - 28 juin 1859 ; Solferino ayant eu lieu le 24 juin) concerne essentiellement la situation d’un jeune de Rapilly, Brutus Delicieux, dont les parents sont fermiers des Durant, de riches propriétaires. Le fils de ce dernier a payé Brutus pour prendre sa place dans la conscription.
«Brutus en prenant le numéro du sieur Durant a vraiment sauvé sa famille de la ruine.»
«Les parents Délicieux demeurent à Bazoches-au-Houlme, dans la dernière ferme du village sur la route de Falaise.»
Le jeune Brutus est amoureux de Louise, la fille du patron de l’auberge «(...) Au chien qui fume, au lieu dit le Détroit.» Le père Bayard est un monstre qui considère sa fille comme sa chose.
«Depuis plus de dix ans, le père de Louise abuse d’elle et la vend aux clients de passage Au chien qui fume.»

Ces lettres révèlent les pratiques des familles paysannes en matière d’éducation. La soeur de Brutus, Françoise est jugée trop libre de caractère : «Elle a, je crois, hérité des compositions de ton grand-père, ces dispositions qui semblent celles d’un heureux et viril caractère quand on les regarde de loin et qui indisposent chacun quand elles surviennent dans le sein de la famille.», elle ira au couvent : «la mère supérieures a accepté de la prendre, même sans dot. Si tout va bien elle prononcera ses voeux l’année prochaine et en attendant restera au couvent.»
L’autre soeur, Marguerite épousera le fils Durant avec en dot «(...) le champ de Bourdeuil qui est mitoyen au bois des Flagues.»

Les deux hommes abordent librement entre eux la question de leur sexualité :
«Le nécessaire exutoire de ma virilité fut de conjugaisons stipendiées et abritées par des maisons réservées. Jusqu’à présent, mon ardeur n’a jamais eu les moyens de se contenter d’une seule amante, et il me fallait aller de corps en corps pour tenter d’épuiser ma singulière vigueur.» dit le colonel Rochambaud.
«Nous sommes tous ainsi dominés par notre sexe. Pourtant nous autres médecins devrions être indemnes de cette gourmandise insatiable que nous constatons si bine chez les autres, mais point ! Ce qui s’impose alors est si violent que l’esprit en est tout submergé.», écrit Le Coeur dans son journal.

Il y avoue par ailleurs ses relations avec plusieurs patientes :
«Il est à Condé une certaine veuve, Colette de Framon, un peu plus jeune que moi. Je la suis plus pour sa conversation que pour ses maux.»
«Je sentis ses doigts se promener dans mes cheveux. Nous sommes ainsi passés d’un acte qui se voulait méthodique à une douce intimité.»

«Je suis descendu à l’Hôtel du Lion. Marguerite Renoir, la veuve de l’ancien propriétaire, est une femme que je connais un peu.»
«Le lendemain, après un sommeil de plomb, j’ai été étonné de découvrir cette femme nue dans mes draps, sa chevelure rousse répandue sur l’oreiller.»

«Madame Vernaison a blanchi de toute son infection. (...) Contre mon habitude, je l’ai ausculté sans autre témoin et maintenant qu’elle est guérie, j’ai découvert un certain charme à ses intimités.»

Le Coeur est un honnête homme, intègre et scrupuleux :
«Quelquefois je me demande si je vaux tellement mieux que le sorcier de la forêt-d’Auvray que je traite. il prétend soigner les fluxions et les inflammations à l’aide de décoctions ignobles qu’il administre avec force Ave et Notre-Père à ses fidèles,(...)»
«Je me suis arrêté à la forêt-d’Auvray chez mon sorcier et, (...)nous avons éclusé un ou deux litres de calva jusqu'à la nuit.»
Il tient à son rôle social, et rend compte de son activité de façon précise :
«Jour d’examen et de marché. Trois poules et deux jambons.»
«Mercredi, consultation et marché. Dix clients, trois chapons, un lapin, le tout vivant, Dix sous.»
Il livre à son journal son bilan financier et patrimonial, les revenus des ses trois fermes, de ses deux coupes de bois de Mayange, la rémunération de ses activités médicales financées par le département, et celle de son activité médicale privée :
«(...) ce qui fait que je vois à peu près mille patients réguliers. La moyenne de mon revenu d’examen est donc d’un franc cinquante par acte. Si je n’avais que ma pratique (...) je ne sais si j’aurais pu soigner gratis les indigents et élever mes enfants.»
Il confie à son journal les contraintes et le limites des connaissances scientifiques et les difficultés d’approvisionnement des zones éloignées de la ville, en remèdes :
«Ce matin, le courrier m’a apporté la fiole d’essence virginale de Catinée que j’avais commandé voilà trois mois. Le remède arrive un peut tard ; le patient est mort voici dix jours.»
Son travail est sans cesse remis en cause par l’obscurantisme et la naïveté des populations qu’il soigne :
«Malheureusement, une trop grande hâte dans l’introduction de nouvelles habitudes entraîne souvent un retrait de l’instruction. (...) ce qui avait demandé des années d’effort(...)se trouve rejeté à un état pire que le précédent. Et l’on voit les sorciers, les thaumaturges et les prêtres rattraper en un seul moment tout le terrain que nous leur avions arraché.»
Il s’efforce de convaincre son fermier «(...) d’adopter des mesures d’hygiène à la pointe de la modernité, ce qu’il considère comme une illumination de ma part par laquelle il lui faut bien passer ; d’ailleurs il m’en laisse toute la féminité supposée. Pourtant, notre lait tourne moins rapidement, notre beurre rancit plus tard et nos fromages ne s’en trouvent pas plus mal.»
«(...) et depuis une semaine, il avale au réveil à jeun un gran verre d’urien de jeune fille vierge.»
Le Coeur est lucide sur la religion et les prêtres :
«Si mettre une soutane ouvrait une communication directe avec le Bien, tous ceux qui se prétendent hommes de Dieu, auraient depuis longtemps éradiqué la terrible misère dans laquelle se trouvent les humains.»
Cela ne l’empêche pas d’apprécier l’abbé Bucard, le curé de Taillebois :
«j’ai de la sympathie pour cet homme tant qu’il ne tente pas de me convertir ou de prêcher.»
Il n’en va pas de même en ce qui concerne l’abbé Rouvre qui ne recueille pas non plus les grâces de Bucard :
«La médisance est un péché véniel qui se substitue fort bien aux passions tristes comme la colère ou la jalousie, surtout quand elle s’attache à des personnes qui y prêtent si évidemment le flanc que l’injustice serait de ne pas s’y adonner.»
Si Le Coeur est un homme public, il s’est engagé pour servir ce qu’il croit juste et fondé, la possibilité pour lui d’apporter ses connaissances à une population qui ne peut se permettre de payer des honoraires. Pour cela, il rétablit, selon ses propres critères, un équilibre entre les riches et les pauvres de sa clientèle.
«Lorsque j’avais décidé à la mort de mon père, de m’impliquer dans la vie publique, j’en voyais plus les honneurs que les astreintes. Les fonctions qui me sont échues m’ont apporté une certaine notoriété, et même une accroissement de ma clientèle parmi les notables de la région. S’il me faut soigner les indigents en raison de leurs moyens, il est utile d’avoir cette classe de patients bien nourris et sans surprise, qui languissent de pléthore et son capables de débourser pour ceux qui ne le peuvent.»
Il accepte des charges peu rémunérées mais permettant d’accroitre sa notoriété.
«Demain donc je préside le conseil de révision à Caen»
Il assure le suivi médical des prostituées de deux établissements réservés :
«Le surplus, plus secret, c’est la fréquentation des tolérances et, à chaque fois, un risque réitéré de voir se propager les maladies, que ce soit à la maison Duchâtel, consignée à la troupe mais non aux officiers, ou à la maison Fernier, ouverte à tous sur instruction de Fortier qui tente, autant que faire se peut de maintenir le calme dans sa ville.»

Il fait preuve d’un lucidité extrême sur sa place parmi les notables et les politiques :
«Les politiques, eux, imaginent que je suis un homme sans conviction. Les idéologies baroques dont ils marquent leurs ambitions détraquées, leur goût de la breloque et des honneurs me laissent froid, c’est vrai. Il est tout aussi exact que je regarde avec effroi leur esprit de système, leurs fantasmes d’ordre et les moyens démesurés que leurs stratégies s’y procurent.»
Sa pratique médicale, sa volonté de généraliser la vaccination dans son canton, le font remarquer des politiques qui l’utilisent pour briller auprès de la représentation nationale et le font nommer au sein d’une commission chargée par «L’Empereur (...) d’étudier les mesures à prendre pour le cas où se renouvellerait une épidémie comme celle de 1855, (...)»
«La présidence de cette commission était assurée par Alfred Velpeau et ses deux inséparables Pierre Bretonneau et Armand trousseau, appelés par les autres «la bande des Tourangeaux.»
Il arrive au sommet, «Au courrier, j’ai trouvé une copie du décret, signé de l’Empereur, qui me faisait membre de l’Académie de Médecine et commandeur de la Légion d’honneur.», mais n’en tire aucune gloire, d’autant plus qu’il constate que sa pratique et sa vie privée sont sous surveillance :
«Ce n’est que sur le chemin du retour que j’ai compris le sens de tout cela : une aimable démonstration de force. Soyez avec nous et vous aurez tout ce que vous désirez, soyez contre nous et nous vous briserons. Je n’imaginais pas avoir tant d’importance dans le canton.»
Le roman de Vitor Cohen Hadria écrit au XXIème siècle, se déroule en 1859 et fait référence à une période allant de 1815 à 1859. Il propose un contrepoint précieux et étonnant aux romans du XIXème, que ce soit la comédie Humaine de Balzac, ou les Rougon-Macquart de Zola.
Le personnage de JB Le Coeur, un médecin éclairé qui exerce au profit des indigents et des sans grades, se démarque des personnages souvent roués et tortueux qui émaillent les deux oeuvres citées. Il rappelle par le contexte, le sujet et les personnages, le roman de Balzac, Le médecin de campagne, écrit en 1834.
Le roman est crédible et bien documenté. Il décortique avec talent les relations sociales complexes entre les tenants d’un pouvoir fort mais frileux et les tenants d’une libéralisation de la société, défenseurs du progrès économique et du développement de politiques tournées vers l’amélioration des conditions de vie de la population.
le roman montre parfaitement le dilemme d’un homme qui se démarque de ses origines sociales dans une société où les classes les plus favorisées sont peu enclines à le faire.
Ce roman est à lire absolument.


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Oh! quel magnifique moment de lecture.
Dans la France des années 1860, le serment d'Hippocrate vécu au jour le jour par un médecin de campagne, entre des croyances tenaces, l'obscurantisme des curés et une hygiène à ses balbutiements, le Docteur le Coeur se bat pour sauver les corps envers et contre tout.


Une découverte de la médecine qui progresse avec vigueur, vaccinations, hygiène...Et parallèlement celle de la chirurgie, que l'on suit à travers une correspondance de deux anciens internes, et amis, l'un est au front en Italie l'autre dans la campagne Normande.


Pour rendre la fiction plaisante à suivre, notre médecin livre une joute amicale parfois cruelle avec deux curés , l'un ne voyant dans les guérisons que la main de Dieu, quand l'autre voit dans l'adultère l'origine des maladies les plus diverses qui frappent le diocèse.


Dialogues savoureux, où le plus calotin finit par accepter d'aller à la maison close muni d'une ordonnance médicale, pour soigner ses hallucinations.

Quant aux pratiques, largement répandues chez les chrétiens et auprès des villageois non pratiquants, ils se rendaient chez le médecin en dernier recours, car on ne sait jamais. Les rebouteux, les faiseuses d'anges, les guérisseurs, captaient l'inquiétude des malades.

"Évidemment les vers sont toujours là". constate le Cœur page 351, il poursuit, "Je lui ai demandé à qui il s'était adressé pour ses remèdes, il m'a cité le forgeron de Champcerie, La mère Caillotte qui s'occupe du ménage du curé, et Flambard, un Charretier de Pierrefite. Il a ajouté que deux prêtres n'avaient pas répugné à dire des prières", dans l'espoir d'une guérison biblique.


Humour et perfidie se conjuguent dans la vie du médecin le Cœur, car avec ses amies, souvent aristocrates après des ébats oh combien enthousiastes, il se fait lui aussi éconduire comme un simple laquais!


Nous voila un peu avec du Maupassant très anticlérical, sachant faire feu de tout pour mener le progrès de la médecine jusque chez les rebouteux.
Une très belle prose, drôle souvent, moderne aussi parfois, et d'une très grande rigueur de style.

Encore une perle restée coincée dans les bassins ostréicoles
d'Albin ou de Michel.

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Ce livre a pour trame principale le journal intime d'un médecin de campagne normand, de janvier à juin 1859.
Un qui ne compte ni son temps ni son argent pour soigner les habitants de sa région, qu'ils soient paysans, hobereaux, tenanciers de maison close ou artisans.
Avec du coeur pour ses malades, une aversion certaine pour toutes les manigances politiques autour de Napoléon III, et une lutte sans cesse renouvelée contre les superstitions et les traditions des paysans de l'époque, malmenés dans leur vie quotidienne, et maltraitants eux-même. Tout y passe: viols, inceste, sorts jetés et exorcismes, femmes épuisées par leurs grossesses successives (quand elles ne meurent pas en couches), hygiène déplorable parce qu'on pense que la crasse isole des maladies, influence excessive du clergé, et maladies non traitées parce que sans remède à l'époque: la tuberculose, la vérole, et autres joyeusetés...
C'est l'époque où un fils de notable qui a tiré un mauvais numéro pour la conscription, peut payer un jeune paysan pour aller risquer de mourir à sa place pendant 5 ans.
C'est l'époque où un homme quand on l'avertit que sa femme enceinte pour la troisième fois en deux ans de mariage risque de ne pas supporter tous ces accouchements en si peu de temps, répond quelque chose du genre: Pas grave, j'en choisirai une autre.
Ce roman nous décrit tout cela de façon à la fois violente et compatissante. Il y a une grande humanité chez ce médecin, en dépit de ses faiblesses et de ses erreurs.
Et malgré quelques longueurs dans la deuxième partie, cela reste un roman très fort qui vaut d'être lu.


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J'ai dévoré ce livre. Superbement bien écrit, dans une langue riche et précise. Si j'en avais le temps, j'en sortirais plein de citations, tant il y a de passages que j'ai eu envie de relire deux fois, trois fois, tellement l'idée qu'ils portaient était pleine de vérité. On y apprend beaucoup de choses sur la société du Second Empire, sur les paysans, les notables. Sur la médecine aussi et le constat d'impuissance face à la maladie, à la mort ou aux superstitions. Mais on y apprend aussi beaucoup sur l'être humain ...
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Ce livre a été un très grand moment de lecture en effet, j'ai vraiment aimé l'histoire, les personnages, l'époque ; tout y est ! L'histoire ? Ce livre décrit la vie d'un médecin de campagne dans la deuxième partie du XIXème siècle, ses relations complexes qu'il a avec ses malades, sa vue de la médecine, ses obligations à la « grande ville » et ses idées quant à la guerre entre autres.

La force de ce roman, c'est le médecin. C'est le personnage principal du livre : un personnage fort en émotions, attendrissant, respecté, respectueux et un homme foncièrement bon. En plus d'être moderne pour son époque, il croit en l' « homme ». Ce médecin malgré les croyances et superstitions de ces patients, ne les juge en aucun cas et s'évertue à les soigner et à leur prodiguer des soins mais jamais contre leur avis. Il fait des kilomètres tous les jours pour aller les soigner, il est tout le temps sur le chemin. Une de ces connaissances n'est autre que le « sorcier » du village avec qui quelque fois il échange quelques avis sur leurs patients communs ! Cet homme est fort moralement mais reste un homme avec ses faiblesses et ses besoins… C'est difficile d'en dire plus sans dévoiler l'histoire.

Un autre côté intéressant de ce livre est de voir comment on soignait à l'époque et même si c'est une période où on a fait beaucoup de progrès, mais les saignements sont encore d'actualité… Les opérations commencent à faire leur apparition, mais c'est intéressant de voir les réticences qu'ont les patients à y avoir recours (en même temps, on peut les comprendre l'anesthésie n'en est qu'à ses balbutiements...), certains refusent tout simplement et mettent leur vie en danger en refusant les soins. Et enfin, les diverses herbes ont un rôle très important et font partie intégrante de la trousse à pharmacie à cette époque.

Le troisième volet qui mérite le détour est la construction du livre assez atypique et permet, d'apporter des points de vue différents de l'histoire. Tout d'abord un premier paragraphe décrit une jeune femme dont nous ne savons pas grand-chose. Ensuite nous avons un roman épistolaire assez drôle entre notre médecin et un militaire - je ne vous en dis pas plus-. Puis suit le journal de notre médecin - partie la plus longue mais aussi pour moi la plus instructive et intéressante - . Et finalement nous retrouvons la jeune femme du début du livre.

Enfin bon, tout cela pour dire que c'est un grand livre, passionnant et instructif ; on ne s'ennuie pas une minute.
Lien : http://ideeslivres.jimdo.com..
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Une réussite, autant au niveau de la reconstitution de cette période de la France provinciale comme celle de la description des savoirs et pouvoirs de la médecine de cette époque. Et comme s'il n'était pas assez d'être un excellent transcripteur d'événements et de moeurs, Victor Cohen Hadria a littéralement épousé l'écriture magnifique du 19ème siècle pour nous faire suivre et aimer la vie de ce médecin éclairé, libre-penseur et sensuel mais surtout profondément humaniste.
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L'ayant commandé surtout après avoir lu la présentation sur le site du livre de poche, un médecin de campagne de la deuxième moitié du XIXe siècle, cette lecture me disait bien.
Le d'but est une femme qui repart d'une maison avec des lettres avec elle, de la lecture. Qui est cette femme ? Nous ne le serons qu'à la fin.
Sinon le roman est partagé entre trois parties :
- le prologue
- le récit
- l'épilogue.
Le prologue est une correspondance où le docteur le Coeur sert d'intermédiaire pour une famille de paysans illitrés, et une jeune femme, via un de ses confrère -médecin dans l'armée- pour le fils de cette pauvre famille et la dulcinée de celui-ci.
Un échange de correspondance intérressant du point de vue des deux professionnelles de la santé avec leur point de vue par rapport à leur facon de s'y prendre avec les patients, mais aussi les différences de moeurs entre eux et le peuple pauvre. Comme il a été fait remarqué dans une des lettre : l'argent des riches peut acheter les pauvres ; les riches restent au chaud chez eux, tandis que les plus pauvres sont envoyés à la bataille...
Le récit est le journal du médecin de campagne le Coeur. Où il écrit plus au moins son quotidien, ses avis partagés ou non par rapport à certains progrès de la médecine, comment il traite ses patients, sa vie sociale et sa correspondance avec cet autre médecin pour qui ils communiquent envers une famille et le fils ainé.
Ses recherches concernant la rage. Ses liens avec certains de ses patients.
Un facon de voir comment les gens vivaient, au milieu des affubulations, peurs du muvais oeil, réprésaille.
Je dois dire que certains passage étaient long...surtout du côté vie intime.
Son journal se tient durant trois saisons de l'année d'où le titre.
Mais plus je m'approchais de la fin, plus je me demandais comment cela allait se terminer...
L'épilogue est la fin du roman. Et je n'en dirais pas plus car je m'attendais pas une telle fin. Tout en sachant qui est cette jeune femme qui a eu accès à lecture.
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C'est un livre que j'ai lu avec plaisir et pas mal d'émotion. C'est une étude de moeurs dans la France de 1859, essentiellement en Normandie mais aussi à Paris à une époque charnière du développement industriel dont l'avènement du train et d'autres progrès.

Le livre est monté de façon originale.

La première partie ou La rage de vivre est épistolaire. Deux médecins vont correspondre afin de permettre à Brutus Délicieux de garder le contact avec sa famille. Brutus est un conscrit de 20 ans parti faire la guerre en Italie du temps de Napoleon III. Ce Brutus Délicieux avait tiré un bon numéro de la conscription, mais il l'a vendu à un autre paysan plus riche afin d'apporter un pécule à sa famille en difficulté. Il laisse au pays une fiancée, une pauvre fille malmenée et exploitée par un père cabaretier. Les deux médecins sont le Dr Charles Rochambaud, médecin militaire et le Dr Jean Baptiste le Coeur (le bien nommé !), médecin de campagne à Rapilly dans la vallée de l'Orne. Brutus, sa fiancée et les familles respectives sont illettrés, d'où la nécessité de passer par un scribe. Il se trouve que Brutus est l'ordonnance de Rochambaud et qu'au début de son service, il va s'avérer un subordonné attentif et exemplaire mais au gré de la campagne militaire, il va se révéler un être abjecte.

Rochambaud et le Coeur se connaissent car le père de Charles Rochambaud avait fréquenté Jean Baptiste le Coeur qui avait eu une aventure avec sa femme avant son mariage. Et si le Dr Rochambaud était en fait son fils? C'est tout dans l'air du temps jadis.

La deuxième partie du livre ou La rage d'aimer est le journal que tient le Dr le Coeur, entre janvier et juin 1859. Ici nous avons le détail minutieux de l'exercice de son art, avec des patients appartenant à toutes les classes sociales, les histoires incroyables des villageois, et l'importance du facteur humain dans ce milieu rural lors d'un exercice qui va bien plus loin que la pratique de la seule médecine; les rapports de force avec les autres acteurs sont très forts comme avec le guérisseur, le curé, la sage-femme. Cet exercice d'une médecine balbutiante est très intéressant, une médecine qui n'a rien de scientifique mais qui commence à se poser des questions sur l'hygiène; c'est un un monde en pleine mutation où l'on se sert du « stéthoscope de Mr Laënnec » (1816) et des « préservatifs de Mr Hutchinson »(1853). Dans ces notes le Dr le Coeur fait état de sa pratique quotidienne (éreintante) mais aussi de sa sexualité. Après un mariage heureux, il perd sa femme de maladie et quatre années après, il est taraudé par le démon de midi. le lecteur connaitra toutes ses turpitudes malgré une condamnation sans appel de la sexualité par la religion. En outre le bon Dr le Coeur écrit avec ses moyens de bord un traité sur la rage ce qui donne le titre du roman.

La fin du livre est surprenante et quelque peu abrupte. Elle m'a laissé perplexe.

L'écriture est élégante, pertinente, avec quelques longueurs dans la deuxième partie, le langage est quelque peu anachronique ce qui ajoute du charme au livre.
Lien : https://pasiondelalectura.wo..
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Une correspondance entre un médecin de campagne et un médecin militaire dans les années 1860. le médecin de campagne raconte son quotidien, il assiste à toutes les tragédies de famille en pénétrant dans l'intimité des foyers. A cette époque, le médecin est un personnage très important dans la société, ainsi que le curé et le "sorcier" avec lesquels il travaille en étroite collaboration, malgré son athéisme. Avec abnégation, il soulage les douleurs et les souffrances, physiques ou morales, de ses patients. Il assiste aux procès, aux drames : viols, incendies, incestes, épidémies de phtisie, dysenteries. Il peint la société de l'époque et les moeurs paysannes ainsi que celles des puissants avec lucidité, désintéressement, dévouement et amour.
Réflexions éclairées et prémonitoires sur le devenir des hommes et le destin de notre société. Très belle écriture dans le langage châtié de l'époque.
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Portrait touchant et humain d'un medecin de campagne dans la normandie du XIXe,formidable catalogue des moeurs et croyances de l'époque,Maupassant et Zola ne sont pas loin.A préscrire de toute urgence
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