Le 12 juin 1813, alors que le roi quitte la cour de la préfecture, à Metz, la pluie commence de tomber. Il demande son manteau. On ne le trouve pas immédiatement. Voyant la garde nationale alignée, Louis-Philippe décide de la passer en revue. Un peu plus tard, la pluie redouble. Alors, écrit le roi à la reine Marie-Amélie, demeurée à Paris, "le piqueur me rejoignit avec mon manteau sur la place où, malgré cela, il y avait un monde énorme, je lui dis de le remporter. Je fis un geste qui marquait de l'emporter ; parce que les soldats n'ayant pas de manteau, je n'en voulais pas non plus ; l'intelligence française saisit ma pensée comme l'éclair et alors les cris de «Bravo le Roi !», «Vive le Roi !» retentirent. Cela se propagea tout au long du trajet."
Politique du mauvais temps, p.44
Nul mieux que Joubert n'a fait ressentir la manière dont la pluie rend le corps plus attentif, plus recueilli, plus sensible au bruits, aux nuances de couleur, à l'impression que lui font les objets. (p.15)
Paradoxalement, par les désagréments qu'elle suscite et surtout, par l'excitation qu'elle provoque, la pluie peut déboucher sur des plaisirs mondains. A sa façon, quand elle se fait extraordinaire, elle perturbe les codes, autorise les transgressions dans les comportements féminins. (p.31)
De la danse naît une donnée essentielle de l'histoire politique des intempéries au XIXè siècle: celle que constitue l'expérience partagée. Le fait d'être mouillé ensemble scelle l'union. [...] La pluie fonde une communauté de sentiments. (p.43)
Incontestablement, la science météorologique a lentement discrédité, au cours du XIXè siècle, tout ce qui relevait de l'intervention divine ou diabolique et imposé une sécularisation du ciel. (p.65)
L'anthropologie a montré combien la pluie et ses excès faisaient événement, en notre monde subrepticement taraudé par le désir de catastrophe. [...] L'observation conduit à une survalorisation du moi de celui qui est témoin de ces précipitations extraordinaires. (p.67)