AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
EAN : 9782080811653
336 pages
Flammarion (17/12/1998)
3.97/5   56 notes
Résumé :
A partir de 1750, les hommes d'occident ont peu à peu cessé de tolérer la proximité de l'excrément ou de l'ordure, et d'apprécier les lourdes senteurs du musc. Une sensibilité nouvelle apparaît, qui poussera les élites, affolées par les émanations sociales de la ville malade, à chercher dans les parcs et sur les flancs des montagnes la pureté de l'atmosphère : elles y rencontrent la jonquille, au parfum quasi imperceptible, qui, leur parlant de leur moi, révèle l'ha... >Voir plus
Que lire après Le miasme et la jonquilleVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (6) Voir plus Ajouter une critique
Après avoir lu  « Mémoires » de Jean-Noël Hallé ( 1754-1822), premier médecin de Napoléon, ardent promoteur de la vaccination, et de l'enseignement de l'hygiène, Alain Corbin, a souhaité travailler sur un ouvrage consacré à l'histoire de la perception olfactive du milieu du XVIIIe siècle à la fin du XIXe siècle. En exploitant une abondante documentation , il retrace l'évolution des sensibilités et des attitudes face aux odeurs, certaines symbolisent le sale, le malsain, le péché, le danger, la mort, la pauvreté , d'autres, l'harmonie, le sain, la bonne santé, la pureté, la vie, l'aisance.

En ce siècle des Lumières, et ceux à venir, les odeurs nauséabondes ne sont plus tolérées, les parfums capiteux sont proscrits car ils occultent l'air putride , en revanche, les effluves légères deviennent à la mode.
Cette évolution aura une répercussion importante sur la société et les comportements , sur l ‘urbanisation, le mode de vie.
Ouvrage éloquent avec un vocabulaire riche, savant, quelque peu prolixe certaines fois – une lecture avec un dictionnaire à portée de main - un champ lexical foisonnant. A relire , à compulser de façon plus opportune quand l'occasion l'exigera.

Commenter  J’apprécie          380
Alain Corbin, professeur à la Sorbonne, dont on dit de lui qu'il est « l'historien du sensible », nous montre comment, depuis Hallé, la perception des odeurs a changé.

L'eau suscite la méfiance ; les médecins l'associent à la notion de malsain.
A partir de 1750, les hommes d'occident cessent peu à peu de tolérer l'excrément et d'apprécier les lourdes senteurs du musc. Alors commence une fascinante et inquiétante entreprise de désodorisation des lieux et du corps.
Pour la suite, voir la belle critique du lecteur Seblac, je ne ferai pas mieux.
Chef-d'oeuvre de l'histoire des sensibilités, le Miasme et la Jonquille a été traduit dans une dizaine de langues.

Une documentation très fournie. de belles tournures de phrases sur les excréments (du beau style sur la saleté et la puanteur : tout un art !). A ne pas lire le jour où un livre nous enverra les odeurs décrites (lol).
Commenter  J’apprécie          110
Un sublime ouvrage retraçant l'histoire sociale de l'odeur, objet aujourd'hui frappé de nombreux tabous . On y voit comment l'odeur a, parmi d'autres objets, permis d'ériger des frontières entres des groupes: entre les hommes et les femmes, entre les prolétaires et les bourgeois... Ce livre vient dépeindre un univers où l'évolution des pratiques en matière d'hygiène en lien avec les progrès de la médecine viennent se mêler à tout un imaginaire social qui nous apporte des réponses quant à la place que nous accordons aujourd'hui à cet objet sensoriel dans notre société. Magnifique.
Commenter  J’apprécie          71
Alain Corbin continue à explorer le grand XIXème siècle sous un angle non politique mais culturel, à travers l'histoire des sensibilités. Et ici, ses recherches sont difficiles en soi, puisqu'il travaille sur ce qui est pas essence évanescent et éphémères, les odeurs.
Mais justement, ces odeurs laissent des traces, dans les textes scientifiques qui cherchent à neutraliser leur pouvoir nocif dans la propagation des miasmes, dans les lois qui veulent réglementer le sort des déjections animales et humaines, dans les murs des hôpitaux, des prisons et des casernes qui conservent l'odeur de la maladie et de la misère, dans les fantasmes des amants aux tendances fétichistes, dans la littérature baudelairienne ou naturaliste...
Cette étude érudite permet donc de revaloriser l'odorat, dégradé dans l'esthétique kantienne, pour lui donner une fonction à la fois politique et poétique.
Commenter  J’apprécie          50
Susskind a beaucoup respiré ce livre. Moi je trouve que Corbin a de l'inspiration et du style, qu'universitaire et historien, il écrit remarquablement bien sans jamais être ennuyeux, au contraire de l'auteur du roman, que je finis par avoir dans le nez.
Commenter  J’apprécie          80

Citations et extraits (11) Voir plus Ajouter une citation
Au cours de l'été 1880, la mauvaise odeur atteint, dans Paris, une telle intensité que l'opinion s'émeut. "On ne s'abordait plus que d'un mot : "Sentez-vous ? Quelle puanteur !" C'tait comme une calamité publique. Le Parisien était affolé, le préfet tourmenté, le ministre agacé."
Les nombreux écrits consacrés au fléau permettent de saisir sur le vif la hiérarchie des répulsions. Ils manifestent l'archaïsme de la perception et de la persistance des anxiétés anciennes. Spontanément, c'est à la présence de l'ordure et de l'excrément dans l'espace public que l'opinion attribue, à tort, le fléau, on ne songe guère à incriminer les odeurs industrielles.
Commenter  J’apprécie          172
La littérature galante enregistre avec rapidité la disqualification du musc. Il y a beaucoup d'hygiène et d'ablutions dans l'érotisme de Rétif. L'eau de rose dispose ici d'un étonnant monopole; elle rafraîchit sans cesse les pieds, le cul et le "conin" de Conquette-Ingénue. Le bidet est devenu l'auxiliaire du plaisir. Le récit casanovien reflète la même monotonie olfactive; le lavage du corps de la femme à l'eau de rose y fait figure de rite.
Commenter  J’apprécie          110
L'accentuation des exigences de la pudeur, on le sait, favorise et freine tout à la fois, la pratique de l'hygiène corporelle. Assez curieusement, l'odorat se trouve impliqué dans le réseau d'interdits qui se tisse. R. Sennet évoque les désordres physiologiques et psychiques, occasionnés au sein de la bourgeoisie victorienne, par la crainte de péter en publique. A vrai dire, les manuels de civilité ne font guère allusion à cette contention, ils laissent toutefois apparaître une délicatesse olfactive toute nouvelle. N'exigez de votre domestique rien qui répugne à ses sens, écrit en 1838 la Comtesse de Bradi; sauf en cas de maladie, "ne vous faites point déchausser".

De multiples freins aux progrès de l'hygiène corporelle continuent de s'inscrire en regard de tous ces facteurs favorables; la lenteur de l'équipement de la maison, cautionnée par la méfiance persistante des médecins à l'égard de l'usage intempestifs de l'eau. La litanie des interdits et des précautions qui alourdit le discours des hygiénistes le prouvent à l'envi. La périodicité menstruelle ordonne toujours le calendrier de la toilette.
Commenter  J’apprécie          20
Le défit que le jeune Flaubert lance aux bonnes manières l'emporte en virulence sur la dénonciation future des idées reçues. C'est un véritable saccage du code civil qu'il invite, notamment dans le registre de l'olfaction ; 'foire dans les bottes, pisse par la fenêtre, crie merde, chie clair, pète dur, fume raide, rote au nez des gens.' conseille-t-il le 15 mars 1842 à son ami Ernest Chevalier. Dans sa révolte ; il ne manque de s'y référer dans les formules de politesse, jouissant par avance de l'effet de scandale, atténué il est vrai par la connivence des jeunes mâles. Flaubert, si sensible à la répulsion provoquée par l'odeur des prolétaires, mais très conscient du rôle de l'analité dans l'émergence du narcissisme, promeut la merde au rôle de symbole du moi.
Commenter  J’apprécie          20
L'interdit qui frappe la nudité joue contre sa diffusion. S'essuyer les organes génitaux pose problème. 'Fermez les yeux, ordonne Mme Celnart à ses lectrices, jusqu'à ce que vous ayez terminé l'opération' ; il est vrai que l'eau peut se faire indiscret miroir..... 'Baignez-vous, si on vous l'ordonne, conclut la comtesse de Bradi ; autrement ne prenez qu'un bain par mois au plus. Il y a je ne sais quoi d'oisif et de mou dans le goût de s'établir ainsi qu'au fond d'une baignoire, qui sied mal à une fille'.
Commenter  J’apprécie          30

Videos de Alain Corbin (37) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Alain Corbin
Retrouvez les derniers épisodes de la cinquième saison de la P'tite Librairie sur la plateforme france.tv : https://www.france.tv/france-5/la-p-tite-librairie/
N'oubliez pas de vous abonner et d'activer les notifications pour ne rater aucune des vidéos de la P'tite Librairie.
Et si au lieu de raconter l'histoire de ce que nous connaissons, nous faisions l'histoire de ce que nous ignorons ? Une histoire de l'ignorance, en somme. Croyez-moi, la tâche est immense et très importante !
« Terra Incognita. Une histoire de l'ignorance » d'Alain Corbin, c'est aux éditions Albin Michel.
Dans la catégorie : Coutumes généralesVoir plus
>Sciences sociales>Coutumes, savoir-vivre, folklore>Coutumes générales (65)
autres livres classés : odeursVoir plus
Les plus populaires : Non-fiction Voir plus


Lecteurs (240) Voir plus



Quiz Voir plus

Quelle guerre ?

Autant en emporte le vent, de Margaret Mitchell

la guerre hispano américaine
la guerre d'indépendance américaine
la guerre de sécession
la guerre des pâtissiers

12 questions
3179 lecteurs ont répondu
Thèmes : guerre , histoire militaire , histoireCréer un quiz sur ce livre

{* *} .._..