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Critique de karmax211


Si l'on demande à la plupart des francophones ce qu'évoque le nom de Pierre Corneille, je suis sûr qu'immanquablement la réponse sera " le Cid "... Gérard Philipe, et chacun d'entre nous (eux) récitant en 3ème l'inoubliable monologue de Rodrigue, dont il nous reste, au moins, des décennies plus tard... les premiers vers...
"Percé jusques au fond du coeur
D'une atteinte imprévue aussi bien que mortelle,
Misérable vengeur d'une juste querelle,
Et malheureux objet d'une injuste rigueur,
Je demeure immobile, et mon âme abattue
Cède au coup qui me tue.
Si près de voir mon feu récompensé,
Ô Dieu, l'étrange peine !
En cet affront mon père est l'offensé,
Et l'offenseur le père de Chimène !"
Eh oui... pour moi, ça date de plus de cinquante ans, et ils sont toujours présents... en dépit de l'encrassage de mes neurones raréfiés.
En revanche, si vous dites " et Cinna ?", là je suis persuadé que les silences seront plus éloquents et nombreux que les réponses.
Pourtant cette pièce écrite en 1642 ( il n'y a pas consensus sur la date ) fait partie des plus abouties du grand Corneille.
Son thème, la légitimité du pouvoir et les conspirations inhérentes à ce dernier, est un thème universel et demeuré contemporain... on ne change pas, comme chante "une certaine".
L'action se situe à l'époque de la Rome antique (fortement "inspirée" par les écrits de Sénèque et " L'histoire romaine" de Goëffeteau), elle est une vision, une préoccupation et un questionnement politique sur les rapports de la noblesse mise au pas sous le règne de Louis XIII et le gouvernement de Richelieu, sur la question de la violence, indissociable dans la pensée du tragédien de la notion de grâce. Et sa réponse est une apologie du pouvoir fort, dont la magnanimité est l'un des prédicats essentiels.
Émilie, fille adoptive de l'empereur Auguste, dont le père Toranius, tuteur du souverain, que ce dernier fit jadis assassiner à l'époque du Triumvirat, est amoureuse de Cinna petit-fils de Pompée. Avant de répondre totalement à son amour, elle exige qu'il venge la mort de son père, qu'il lui rende son honneur, en assassinant à son tour l'empereur. Cinna et son ami Maxime complotent et conspirent à cette fin.
Auguste, lassé du pouvoir et du sang versé, interpelle Cinna et Maxime, en lesquels il voit davantage que des conseillers, et leur demande de l'éclairer. Pris au dépourvu et pour ne pas renoncer à la conjuration et ne pas trahir Émilie, Cinna ( et Maxime )réussit à convaincre Auguste de ne pas renoncer au trône. Reconnaissant, Auguste offre à Cinna la main d'Émilie.
Mais, car il y a toujours un mais, Maxime est amoureux d'Émilie. Euphorbe, son serviteur affranchi le pousse à trahir Cinna, lequel ébranlé par le comportement d'Auguste hésite quant à lui à mettre à mort un despote devenu "éclairé". Mais Émilie reste sourde aux doutes de Cinna qui, par amour et par honneur, décide de mener la conjuration jusqu'à son terme.
Pendant ce temps, Euphorbe affirmant être mandaté par Maxime, révèle la conjuration et les noms des conjurés à Auguste. Sa femme, l'impératrice Livie, recommande à son époux le pardon, mais Auguste convoque Cinna. Maxime, de son côté, confesse à Émilie son amour et la trahison d'Euphorbe. Émilie repousse Maxime et l'humilie comme le traître qu'il est.
Émilie, pour sauver Cinna, s'accuse auprès d'Auguste d'être la seule responsable de cette conjuration et de cette tentative d'assassinat. Cinna et Maxime font de même.. Auguste, magnanime et accablé de voir tous ceux qu'il aime comploter contre lui les gracie tous !
" Tu trahis mes bienfaits, je les veux redoubler,
Je t'en avais comblé, je t'en veux accabler."

"Qu'on redouble demain les heureux sacrifices
Que nous leur offrirons sous de meilleurs auspices,
Et que vos conjurés entendent publier,
Qu'Auguste a tout appris, et veut tout oublier."

HAPPY END !

Corneille a fait passer son message de manière explicite... après Louis XIII viendra Louis XIV et un absolutisme "éclairé" ( ? )

En attendant, j'ai pris un plaisir "mal-de-mer" à relire des alexandrins marqués du sceau du dilemme Cornélien ( le sentiment et le devoir, l'amour et l'honneur, j'y vais mais j'y vais pas... ). Des vers à l'effet balançoire, reconnaissables entre tous... qui vous montent à la tête mais qui vous font du bien ( c'est un alexandrin... (sourire) )

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