Car c’est ainsi que les hommes naissent, vivent et disparaissent, en prenant avec les cieux de funestes engagements : leurs mains caressent et déchirent, rendent la peau si douce qu’on y plonge facilement des lances et des épées. Rien ne les effraie sinon leur propre mort, leurs doigts sont plus courts que ceux des grands singes, leurs ongles moins tranchants que ceux des petits chiens, pourtant ils avilissent bêtes et prairies, ils prennent les rivières, les arbres et les ruines du vieux monde.
(Incipit)
Le mot amour pour elle est un temple sacré que les hommes ont saccagé depuis longtemps, alors quand elle l'entend dans la bouche tendre de ceux qui s'aiment simplement, elle les laisse, encore, vivre. Elle accorde des passe-droits, elle s'ouvre aux âmes passionnées. Elle retire de la pelote que forment les villages des aiguilles longues et acérées, elle s'installe dans les chambres et les mémoires, dans les corps et les jeux, dans les livres et les pensées, elle ressemble à un Jeune homme, elle ressemble à sa mère.
Ce fils fragile est mauvais signe : sa mère et lui rétablissent, depuis toujours, l'équilibre du monde. Ils ne tombent pas ....
C'est ainsi que vient la mort, nous l'accueillons avec des bras pleins de fleurs, des yeux pleins de larmes, surpris qu'elle nous connaisse si bien, et qu'elle éveille en nous des amours plus fortes que la vie elle-même.
[Excipit]
Ils se nourrissent des légendes qui font la terre ronde et trouée, le ciel bleu et fauve, ils construisent des villes géantes pour des vies minuscules et la haine de cette petitesse les pousse à toutes les grandeurs.
Nous sommes nos pires ennemis.
Il rêvait des premiers mots de sa mère, les jours de beau temps. « C’est un temps à vivre », répétait-elle, chaque matin.
sa mère lui avait dit : « Les cauchemars n’existent pas, ce sont des rêves un peu tordus.
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C’est ainsi qu’avance la mort, avec le visage de la jeunesse, avec des jambes vives quand celles d’avant sont rongées, avec des yeux malicieux quand le regard d’autrefois n’est plus qu’un trou de souvenirs. Elle vient quand on l’appelle, elle parle la langue des hommes, des femmes et des enfants, mais elle en connaît mille autres, sa bouche est un monde mais, surtout, elle connaît la langue des choses cachées.
En ville, on n’avait pas besoin d'elle, la langue des choses cachées était enfouie sous d'autres mots, plus métalliques, coupés aux médicaments, alourdis par la paperasse.