AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Lamifranz


Avez-vous connu la guerre d'Algérie ? Moi, si. Enfin, presque. J'avais neuf ans à la signature des accords d'Evian, mais j'ai quand même des souvenirs précis de cette époque. Par exemple j'ai vu arriver dans ma petite ville au pied des Pyrénées ce qu'on a appelés les Pieds-Noirs, avec leurs valises et leur accent ensoleillé. Et puis, autre souvenir marquant : le journal Sud-Ouest, grand quotidien régional, présentait le jeudi un supplément destiné aux jeunes entre 17 et 24 ans, intitulé avec beaucoup d'à propos 17/24, (c'était une double page en papier jaune). J'étais étendu à plat ventre sous la table de la salle à manger (une de mes positions favorites) et je lisais ce supplément (les limitations d'âge, n'avaient déjà plus d'effet sur moi, en tous cas pour les lectures !) quand un article attira mon attention : le récit par un garçon (ou peut-être une fille) à peine plus âgé (e) que moi, qui décrivait avec force détails sa vie à Alger, entre explosions, fusillades, angoisse mais aussi l'insouciance de la jeunesse. Ce témoignage m' avait marqué pour longtemps.
Ce n'est qu'une bonne douzaine d'années après, à la faveur de je ne sais quelle circonstance (film, émission à la télé, lecture, conversation avec un ami), que j'en vins à m'intéresser au sujet de la Guerre d'Algérie, et c'est d'instinct (c'est souvent par instinct que je choisis mes lectures) que je tombai sur Les Fils de la Toussaint, le premier tome de la Guerre d'Algérie d'Yves Courrière. Et comme souvent mon instinct ne m'avait pas trompé.
Car La Guerre d'Algérie est un monument. Conçu en quatre parties (Les Fils de la Toussaint, le Temps des Léopards, L'Heure des colonels, et Les Feux du désespoir) il couvrait toute la période de la guerre entre 1954 et 1962 (en débordant même un peu avant et un peu après). C'est un monument à plus d'un titre : par la masse de documents que l'auteur a recueillis auprès des deux parties belligérantes, sans compter toutes les archives extérieures. Par le nombre inimaginable de témoignages de combattants et de civils des deux camps, témoignant à la fois du déroulement politique et militaire de la guerre mais aussi des conséquences qu'elle pouvait avoir sur la vie des gens, sur les destinées individuelles noyées dans les destinées collectives. Enfin, et ce n'est pas le moindre argument, c'est un monument par l'honnêteté, la rigueur, l'objectivité que met l'auteur dans la rédaction et la présentation de cette ouvre de première importance.
Rassurez-vous, je vous ferai pas tout l'historique de la guerre. Je me bornerai à présenter très succinctement les quatre volumes :
Les Fils de la Toussaint décortique l'insurrection du 1er novembre 1954, ce qui l'a déclenchée, le déroulement des évènements, et les suites immédiates.
Le Temps des Léopards couvre la période 1953-1955, et relate entre autres le combat féroce qui opposait les Léopards (paras) aux insurgés du FLN (Front de Libération Nationale)
L'Heure des colonels (1955-1957) traite d'une période cruciale de la guerre où entre guérilla urbaine, complots, arrestations, tortures et assassinats, "la peau d'un homme, ou d'une République, ne vaut pas cher"
Les Feux du désespoir (1958-1960) constitue la fin du drame. le putsch des généraux, l'OAS, les négociations (officielles ou occultes), jusqu'à la signature des accords d'Evian, et la fin d'un amour (contrarié) entre la France et l'Algérie, amour qui durait depuis 1830.
La Guerre d'Algérie a été couronné par L Académie Française. Son auteur (déjà lauréat du prix Albert Londres en 1966) accrut sa popularité, et se consacra par la suite à une carrière de romancier (Le roman des Hauts de Saint-Jean - 1974, Les Aubarède - 1999) et de biographe (Joseph Kessel ou Sur la piste du lion - 1985, Roger Vailland ou Un libertin au regard froid - 1991, Pierre Lazareff ou le vagabond de l'actualité - 1995, Jacques Prévert, en vérité - 2000).
En 1972, Yves Courrière et Philippe Monnier présentent La Guerre d'Algérie, un documentaire de 2h30 tiré de l'oeuvre. Il fait toujours référence, et a été salué autant par le Général de Gaulle que par Krim Belkacem (un des Fils de la Toussaint, organisateur de l'insurrection en 1954).


Commenter  J’apprécie          40



Ont apprécié cette critique (3)voir plus




{* *}