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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
“Enigma, Géorgie, était un cul-de-sac”.
Enigma, prototype du trou du cul de l'Amerique, de ces petites agglomerations du Sud isolees, un Sud profond et defait ou proliferent, au debut du 20e siecle, l'analphabetisme et l'ignorance, le fanatisme religieux, la haine raciale.
Enigma, une culture de micro-pourritures dans une boite de Petri.
Enigma, ou bataillent des reformes de l'entendement dans les marecages de la mauvaise fortune.

C'est la que Crews fait coincider, pour deux jours fatidiques, un noir qui a tue la plus belle jeune fille blanche du lieu a coups de piolet (j'ai du laisser le politiquement correct a la consigne, bien qu'il n'y ait pas de gare dans le coin), un chanteur de gospel celebre, natif du lieu mais qui ne pense qu'a le fuir, un cirque exhibant des “freaks” (pour qui n'aurait pas vu le celebre film eponyme de 1932, des personnes de constitution anormale, des monstres), un precheur avide de gain qui a plante un enorme chapiteau pour un “revival” religieux ou doit se produire le chanteur.

Ce chanteur est repute pour ramener son public vers Dieu, sauver des ames, et meme faire des miracles. Mais il n'est en fait qu'un pecheur invetere, pour qui “chanter les évangiles c'était un moyen de gagner du pognon, un moyen de s'échapper d'Enigma, un moyen de ne pas passer sa vie à barboter dans le purin. Il n'avait pas prévu que Dieu viendrait glisser son nez là-dedans. Lui qui n'était pas particulièrement porté sur la religion, il perdait un peu les pédales et prenait peur quand quelqu'un venait lui raconter qu'il avait sauvé une âme”.

Ca ne peut que mal finir. Tres mal finir. C'est du Crews. Apres avoir developpe longuement les tenants il nous mene vers les aboutissants en un crescendo oppressant, ou le lecteur, affole, panique, asphyxie, attend la catastrophe qu'il subodore sans pouvoir la spécifier exactement.

C'est le premier livre de Crews. Son premier jet. Je l'ai trouve un peu moins abouti que les prochains que j'ai lus. La fin est un suspense angoissant mais il tarde beaucoup a se mettre en route.
Et pourtant la marque de fabrique qui va caracteriser Crews est deja la. Les freaks pour lesquels il a une enorme compassion, meme de la tendresse. Et les autres, les paumes oublies de la civilisation, abandonnes a eux-memes par la societe environnante, objets de la rapine de precheurs vereux, qui ne peuvent se rebeller contre leur destin que par la violence, ou la folie.
Beaucoup de ce qu'on trouvera dans ses ecrits ulterieurs est deja la. La mauvaise distribution des opportunités, les mecanismes affligeants de la renommee, l'absence de veritable justice, qui amene les gens a la prendre en mains, les perversions de ce qu'on presente comme la morale, le vice et sa penitence, et autour de cela sa critique a l'influence de la religion. le theatre d'un monde decadent, dans lequel les freaks jouent les maitres de ceremonie. Ou comme toujours il semble nous jeter à la figure sa sempiternelle question: qui sont les vrais freaks? Les veritable monstres?

Ce livre est un noir de noir, dur de dur, qui finit en orgie psychotique, aux accents tristement sudistes. Mais Crews a eu pitie de nous, ses lecteurs. Il a accole a cette fin un epilogue. Comme une legere brise d'esperance. Ou serait-ce son ultime pied de nez? Tout n'est peut-etre pas perdu. Comme le dit la pancarte: “NOUS ON NE PISSE PAS DANS VOS CENDRIERS – ALORS NE JETEZ PAS DE MÉGOTS DANS NOS PISSOTIÈRES”.
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Eh, eh, le chanteur de gospel est arrivé sans s'presser, avec sa cadillac rutilante, avec sa belle gueule et sa voix d'ange,
son vieux banjo et son nouveau impresario...
Son retour à Enigma en Georgie ne passe pas inaperçue.
Tout le bled des bouseux est de sortie pour accueillir l'enfant prodigue convié à chanter pour Mary Bell, son ancienne dulcinée trucidée par un illuminé..On l'accueille comme une star au son des guitares, des braillements et des cris de gorets.
Sûr que c'est un saint, qu'il peut faire des putains de miracles. Ils sont tous là, les paralytiques, les sourd-muets, les freaks à lui tourner autour comme des mouches.
Le chanteur n'est pas une vache, il ne peut pas les chasser d'un coup de ...fouet. Alors que va t-il faire ? Ben, chanter un gospel d'enfer !
Le premier Harry Crews est sorti en 1968 en pleine période psychédélique. Il a dû manger des champignons hallucinogènes et écouter en boucle Purple Haze de Jimmy Hendrix pour voir des freaks partout comme leur chef surnommé Pied qui a le plus grand panard du monde...
Avec Harry Crews, on plonge les pieds dans le purin puritain de l'Amérique profonde en compagnie de Redneck, de monstres de foire et d'allumés de premières, ses frères de sang. Et on assiste à un revival gospel déjanté inoubliable.
Un beau pied de nez à tous les prédicateurs et les idoles en toc.
Le chanteur de gospel, c'est le genre noir très spiritual !
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Harry Crews est l'écrivain qui vous transporte dans de l'Amérique profonde dans "le trou du cul du monde". La nature est aussi sauvage et tarée génétiquement que les Red Necks. Pour survivre dans cette jungle il faut être un psychopathe d'une intelligence hors norme...
La suite sur mon blog auteur :) :
http://linnelharsson.blogspot.fr/2015/07/lecture-le-chanteur-de-gospel-harry.html
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Enfant, Harry Crews contracta la poliomyélite, puis tomba accidentellement dans un chaudron d'eau bouillante, événements malheureux qui lui laissèrent de lourdes séquelles physiques qui le firent considérer comme un phénomène de foire. Est-ce pour cela que plus tard, il travailla pour une foire itinérante de monstres (freaks) en tant que Mr Loyal ? Toujours est-il qu'il a conservé de ces expériences un sentiment d'affinités avec tous ceux qui sont considérés comme hors norme ; à l'inverse, il n'a que mépris pour ceux qui exhibent un physique aseptisé, imbus du pouvoir que leur confèrent leur plastique irréprochable, mais qui sont finalement les vrais « monstres », symboles de l' « American way of life » qu'il exècre.

Tel est, entre autres, le thème du « Chanteur de gospel », excellent roman caustique et terrifiant, qui stigmatise la dictature des apparences et la bêtise des foules qui se laissent séduire jusqu'au fanatisme par le premier quidam venu, pourvu qu'il renvoie une image conforme à celle de leurs espérances… C'est le cas du « Chanteur de gospel ». Né à Enigma, bled de péquenots du Sud des États-Unis, d'une famille qui élève des porcs, il est LE miracle de cette bourgade de 600 âmes. D'une blonde beauté angélique, il est surtout doté d'une voix exceptionnelle et charismatique, qui lui a apporté une notoriété nationale. Il se rend ainsi d'un endroit de la nation à l'autre afin de chanter devant des foules qui ont eu vite fait de déduire qu'un tel talent ne pouvait être que divin. Et de prêter à notre chanteur la capacité de guérir les malades et de convertir à la foi les plus sceptiques. C'est pourquoi tout Enigma est en émoi : l'enfant chéri du pays a prévu d'y donner un spectacle, et chacun l'attend avec impatience, y compris Willalee Bookatee, qu'il connaît depuis l'enfance. Ce dernier vient d'échouer en prison, accusé d'avoir violé et sauvagement assassiné la belle et pure Mary Bell, autre enfant chérie du pays, crime d'autant plus horrible pour les habitants d'Enigma que Willalee est noir.
En même temps que « le chanteur de gospel », une foire de monstres, dirigée par un nain affublé d'un pied démesuré, s'installe au village.
Les attentes des uns, les frustrations des autres, font que la situation va devenir explosive...

Harry Crews s'y entend pour restituer l'atmosphère de ce patelin de « bouseux », où, si certains individus peuvent sembler assez sympathiques, ils se révèlent, pris en masse, capables du pire, guidés par l'obscurantisme, le racisme, la violence… Il fait preuve d'un humour cynique pour dénoncer également leur extraordinaire hypocrisie : créant eux-mêmes les idoles qu'ils vénèrent par le truchement d'une religion-superstition censée absoudre leurs actes, ils sont aussi prompts à les anéantir si elles ne répondent plus à leurs exigences. L'auteur semble presque prendre plaisir à briser les mythes galvaudés de ces ploucs à l'esprit étroit, en insistant sur les travers de leurs prétendues idoles, et en restituant à ceux qui sont considérés comme des monstres leurs statuts d'êtres humains.
Lien : https://bookin-ingannmic.blo..
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