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Critique de Lamifranz


« En oubliant le passé, on se condamne à le revivre ». Telle est l'exergue de ce roman policier pas comme les autres. Par le biais de ce type d'écriture (le roman policier) l'auteur nous invite à intégrer le passé dans notre présent : ne pas oublier, afin que la mémoire reste, ne pas oublier, parce qu'aussi les coupables sont toujours là, ou s'ils sont morts, d'autres reprennent leurs idées et leurs méthodes, et tout recommence. L'enfance de Didier Daeninckx (né en 1949) est rythmée par la guerre d'Algérie (1954-1962), ce qui est le cas de la grande majorité des babyboomers.
Ecrire en 1983 un livre (fût-ce un roman) faisant allusion aux répressions abusives de la police française en 1961 contre les manifestations pro-algériennes (répressions particulièrement cruelles, responsables d'une centaine de morts et passées sous silence pendant des années) représentait un réel acte de courage, principalement parce qu'on était en plein procès Papon, et que les esprits n'étaient pas prêts à entendre certaines vérités dérangeantes.
L'histoire de « Meurtres pour mémoire » commence le 17 octobre 1761. Une manifestation pro FLN, mais pacifiste (les manifestants n'étaient pas armés), est chargée par la police parisienne. Roger Thiraud, un professeur d'histoire y est tué par un policier d'une balle dans la tête. Il laisse une femme enceinte. Vingt ans plus tard, à Toulouse, son fils, Bernard, est tué également, de deux balles dans le corps. L'inspecteur Cadin est chargé de l'enquête. Il a vite fait le lien entre les deux affaires. Bernard, vingt ans après, poursuivait les mêmes recherches que son père sur le camp de concentration de Drancy pendant la Seconde Guerre mondiale. L'inspecteur va devoir élucider le rapport qu'il peut y avoir entre les deux meurtres et le génocide des juifs, à chaque fois vingt ans d'écart…
La recherche policière, se double ici d'une recherche historique et politique. Il faut être un policier parfaitement intègre pour oser enquêter dans les méandres de sa propre corporation, ne pas céder aux pressions, policières ou politiques. Il se trouve que Cadin est un flic atypique, justement parce qu'il est intègre et ne veut pas « rentrer dans le moule ». Lucide et désabusé, il cherche quand même la vérité, quelle que soit cette vérité.
Aujourd'hui que nous en savons plus sur ces pages sombres de notre Histoire, ce roman perd un peu de son actualité, et nous le lisons comme un roman policier historique, et ce qui était choquant ou à tout prendre dérangeant en 1983, est banal aujourd'hui, nous apprenons tous les jours des scandales présents ou passés concernant nos dirigeants, et nous finissons par être blasés. Pourtant ce roman était une sacrée piqûre de rappel. L'histoire se répète, et les mêmes causes font les mêmes effets, si nous n'y prenons pas garde.
Didier Daeninckx fut traîné dans la boue à la sortie du livre par une intelligentsia gaulliste et ultradroitière. Aujourd'hui, ce roman figure dans certains programmes scolaires, est étudié au baccalauréat et a été traduit dans des dizaines de langues.
« Meurtres pour mémoire » est le troisième tome des enquêtes de l'inspecteur Cadin, après « Mort au premier tour » et « le géant inachevé » et avant « le bourreau et son double » et « le Facteur fatal ». Ces cinq enquêtes passionnantes ont été réunies sous le titre de « Mémoire noire » (Folio policier)
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