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Critique de Apoapo


Publiée dans la première moitié des années 1970, lorsque Angela Davis avait à peine 30 ans, cette Autobiographie est en réalité axée autour de sa cavale, de son incarcération préventive et de son procès – accusée de meurtre, de kidnapping et de conspiration – suite à une révolte carcérale survenue le 7 août 1970, alors que, encore libre, elle était activement impliquée dans un mouvement politique visant à obtenir la libération d'autres prisonniers politiques noirs que les révoltés, détenus dans une autre prison nommée Soledad. Il en découle, par-delà les péripéties judiciaires de l'auteure, un cadre assez précis du racisme systémique états-unien des années 60, caractérisé par l'usage absolument arbitraire de la violence par les forces répressives d'État (police, justice, prison) contre ce qui est appelé le « peuple » noir, y compris l'abus éhonté du recours à l'incarcération et la discrimination raciste dans le judiciaire à tous les niveaux, sur fond de la persistance du sexisme et d'un anticommunisme maccarthyste primaire, ainsi que de la possession généralisée des armes à feu et explosifs. Mais on bénéficie aussi d'une description approfondie des méthodes de conscientisation, de mobilisation et de lutte collective, à partir des campus et des réseaux antiracistes et/ou communistes, grâce à tous les instruments de pression imaginables, que l'auteure ainsi que ses comités de soutien ont pu mettre en oeuvre à l'époque, au niveau national et même international. En somme, la lecture de cet ouvrage m'a fait penser par moments à la célèbre autobiographie de Nelson Mandela, par moments à celle non moins connue de Trotski...

L'ouvrage, qui ne s'illustre pas par sa concision, s'articule en six parties auxquelles s'ajoute, dans la présente édition, une très précieuse Postface qui consiste en un « Entretien avec Angela Davis » par Gilles Martin et Daniel Zamora daté de 2013, dans lequel, avec une lucidité et une capacité d'analyse de l'actualité tout à fait remarquables, l'auteure âgée alors de presque 70 ans traite de l'ensemble de l'engagement politique depuis 1974, aux États-Unis et ailleurs, et de l'évolution des mouvements de lutte progressistes (antiracistes, antisexistes, anticapitalistes, environnementaux, par ex. :« Occupy », etc.) à l'époque de la disparition du bloc communiste et de l'hégémonie de l'idéologie néolibérale.
La première partie, « Les Filets », d'août à décembre 1970, narre de façon haletante sa cavale et son arrestation. La deuxième partie, « Les Rochers », retrace l'influence du racisme dans l'Alabama de son enfance. La troisième partie, « Les Eaux » entre septembre 1961 et septembre 1963, se concentre sur les études et le cursus universitaire de l'auteure, que l'éveil de sa conscience émancipée conduit en Europe – France, Finlande, Allemagne –, études d'abord en littérature française (influences de Sartre, de Jean Genet et des poètes du XIXe siècle), puis dans un doctorat en philosophie sous la direction de Herbert Marcuse (en contact avec les professeurs de l'École de Francfort). La quatrième partie, « Les Flammes », entre avril 1968 et le 7 août 1970, montre la genèse de l'engagement militant d'Angela Davis, notamment dans la cause du soutien aux détenus politiques noirs, tout en commençant à exercer une activité professionnelle d'enseignement universitaire constamment menacée par son identité de femme noire se déclarant ouvertement communiste. La cinquième partie, « Les Murs », du 22 décembre 1970 (le lendemain de son arrestation) au 25 février 1971, décrit avec minutie les détails de son expérience carcérale. Enfin la sixième partie, « Les Ponts », du 28 février au 4 juin, relate tout aussi minutieusement le déroulement de son procès, dont l'issue est incertaine – entre peine de mort et acquittement – jusqu'au dernier instant.
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