Citations sur Cabale pyramidion (18)
Le plateau de Gizeh, à cette heure tardive de l’après-midi, accueillait encore des groupes de visiteurs. La lumière était moins dure et les rayons du soleil à son déclin ciselaient les contours des monuments. Des policiers en armes, montés sur leurs chameaux, patrouillaient à proximité des autobus et des véhicules garés aux pieds des pyramides.
Il connaissait la plupart des familles du voisinage et leur histoire, pas celle des papiers officiels, celle du poids qu'on garde dans le cœur.
(...) on ne sait jamais rien d'autrui, et si peu de soi.
Le Caire et ses seize millions d'habitants, la plus grande métropole d'Afrique et du Moyen-Orient, semblaient avoir aboli l'individu. C'était un cratère humain qui infusait, débordait, se répandait jusque dans les venelles ombragées où tanneurs, épiciers et vendeurs de tissus tenaient boutique.
Hassan respirait le désert et semblait absorber le vide alentour pour s’y fondre tout entier. Il oubliait les dunes de sable, cet immense linceul recouvrant le berceau du monde nilotique qui le fascinait depuis toujours. Un sourire ironique courut sur ses lèvres. Cette enflure de Menes le prenait pour une lope, mais ici, il était le Min de Coptos armé de son fléau, le dieu reproducteur qui fécondait chaque soir la déesse de la lumière pour donner naissance au soleil.
Excellent thriller. A consommer sans modération
– Mais pourquoi venir au Caire ? Vous n’êtes pas son mari. Fiancés peut-être ?
Provocation.
– Non, non… Si je suis là, c’est pour la retrouver, lui éviter des ennuis ou, qui sait, la protéger de certains dangers… commença-t-il à s’emporter.
– Lesquels ? Elle n’est pas en danger, monsieur Sauvage, elle est en fuite. Et vous en savez le motif, votre ambassade a dû vous l’apprendre. Elle a tenté de voler une pièce exposée dans une vitrine du musée égyptien. Elle a été confondue par un gardien et le conservateur en chef lui-même. Connaissez-vous Kamal Nasser ?
Chez Menes, fonctionnaire sorti du moule bureaucratique de l’ère Sadate, les formules de politesse se limitaient au strict minimum. On était reçu par un matricule. Menes avait fait ses classes dans les services de renseignement de l’armée.
Kamal Nasser, un talkie-walkie à la main, avait donné l’ordre d’inspecter toutes les salles, les bureaux, les locaux techniques, les toilettes, et de poster des hommes aux endroits stratégiques. D’après les premiers témoignages, la jeune femme aurait été aperçue dans le grand escalier puis dans l’allée centrale, d’autres assuraient l’avoir croisée dans la section des lapidaires gréco-romains. Partout et nulle part.
Inauguré en 1902, le musée de style néo-classique avait été, dès sa mise en chantier, le premier bâtiment conçu à cette fin. Ce n’était pas un édifice ancien qu’on avait réhabilité pour abriter des collections. Son architecte, un Français, l’avait dessiné en s’inspirant des temples égyptiens de la Basse Époque. Les visiteurs y circulaient librement, comme à l’intérieur d’un sanctuaire. Une vaste galerie à colonnades courait autour d’un hall central et desservait les salles d’exposition. Un handicap pour qui voulait s’y déplacer discrètement, un atout quand il y avait foule.