Voici un livre tout à fait étonnant, qui prend le contre-pied, d'une certaine façon, de ce que l'on a l'habitude de lire en policier et/ou thriller. Pour commencer, remettons-le en contexte : je ne me rappelle même plus trop bien comme je l'ai découvert. Était-ce grâce à son apparition dans une en bande publicitaire sur le site de Babelio, avec quelques autres nouveaux titres des éditions du 38 ? Je sais qu'une telle annonce m'avait fait remarquer plusieurs autres de leurs livres, mais je ne jurerais pas que celui-ci en faisait partie. Était-ce tout simplement, alors, une suggestion de l'offre Kindle quotidienne ? Peu importe : quand il m'a été proposé dans le cadre de mon abonnement Boobox (une box livresque en ligne, qui a arrêté ses activités il y a quelques jours à peine ! pourtant c'était sympa…), alors que je venais de l'acquérir par ailleurs, j'ai su qu'il m'était destiné !
Cela dit, comme c'est le cas pour plusieurs autres livres actuellement, j'écris ma critique alors que j'ai terminé ma lecture il y a plus d'un mois. En effet, je n'ai absolument plus rien rédigé durant tout ce mois d'août : congé des enfants (et de l'homme), vie familiale intense, mais activités personnelles en suspens, et voilà ! Dès lors, les souvenirs de ma lecture se sont bien un peu estompés et, contrairement à ce que j'avais fait pour d'autres livres, dans ce cas-ci je n'avais pris aucune note au cours de ma lecture, tant j'étais scotchée je suppose (vous avez dit page-turner?), si bien que je pars dans un certain flou…
Je ne vais pas réécrire le résumé proposé par l'éditeur, mais j'avoue que ce 4e de couverture ne prépare (absolument) pas à ce qu'on va trouver dans ce livre ! Oui, c'est l'histoire d'un certain Sepp, policier chevronné, habitué à travailler en équipe avec un Black, qui porte sans aucun doute un nom également mais que j'ai complètement oublié, car il n'est jamais appelé (par Sepp et dès lors par les autres) autrement que « Grand Blond » ! Ainsi, d'emblée le ton est donné : ce livre, pourtant très dur par moments, est bourré de ce type d'humour sympathique et un peu décalé, parfois même quand le propos ne s'y prête guère ! Il faut lire, par exemple, les dialogues entre Sepp et le coroner (qui, dans ce livre, joue un rôle quasi identique à celui d'un médecin légiste, ce qui m'a parfois semblé un peu confus, mais je ne suis pas spécialiste des subtilités en la matière, surtout écrites par un Québécois qui place son intrigue aux États-Unis, et de toute façon c'est vraiment un détail), dialogues qui ont lieu, en plus, sur chaque nouvelle scène de crime : c'est à chaque fois une nouvelle page d'anthologie de ce genre décalé pince-sans-rire ! Or, même si ça ne fait pas toujours tout à fait mouche, on peut reconnaître sans aucune hésitation que cette façon d'aborder plus légèrement certaines scènes par ailleurs bien sanglantes, les dédramatise, les rendrait presque « acceptables » - pas dans le sens où des tueries seraient admissibles, mais dans le sens où le lecteur va accepter de continuer à lire malgré tout, et son intérêt sera même amplifié!
Ainsi, Sepp et son coéquipier le « Grand Blond » sont confrontés à une série de meurtres qui finissent par les faire frémir : outre la barbarie affichée à chaque nouvelle scène, les deux flics se rendent compte que, apparemment, un copycat reproduit les mises en scènes des plus célèbres tueurs en série qui ont sévi plus ou moins récemment dans tous les états-Unis, en tuant à leur tour et à leur façon lesdits serial killers ! Ainsi, on a compris le titre, et c'est déjà complètement flippant, d'autant plus que l'auteur ne nous épargne pas les détails sanglants… mais on est loin du compte encore !
Sepp va se faire quasi « kidnapper », et contraindre à retrouver ce tueur hors normes, dans le cadre de la Konvention… Cette Konvention, avec un K comme killer, est un événement épisodique extrêmement sélect, et bien entendu tout à fait secret même s'il a lieu dans un grand hôtel, où ne sont conviés… que des serial killers, pour parler de leurs méthodes, de leurs façons de faire face à la justice, et autres joyeusetés. La seule exigence : il leur est strictement interdit de pratique leur « art » durant cette Konvention – voilà pourquoi l'organisateur a recruté Sepp, connu pour son expérience de flic, pour que le tueur anarchique soit identifié, que l'hécatombe cesse et que les killers eux-mêmes règlent son compte à celui qui ne respecte pas la seule et unique règle de la Konvention. Inutile de dire que ce recrutement est « obligatoire » (sous la menace de s'en prendre à la famille de Sepp), qu'il lui est interdit d'en parler à quiconque de ses collègues ou supérieurs dans la police (pour eux il est tout simplement en congé !), et qu'il va en plus se retrouver à devoir faire équipe avec une profileuse très douée elle aussi dans son domaine, Hélène, qu'il va trouver insupportable dès le début.
En disant cela, je me demande si je ne suis pas déjà à la limite du divulgâchis, pourtant j'aurais aimé entendre parler de cette « Konvention » de façon plus claire dans le résumé, qui reste assez évasif sur ce dont il s'agit réellement, alors que ce n'était pas bien difficile à expliquer !
Bref, Sepp et sa coéquipière Hélène, tout aussi forcée que lui à collaborer à ce qui ressemble bien un peu à une mascarade, mais alors hautement mortifère, vont se mettre en devoir de retrouver l'assassin, intégrant ainsi la Konvention sous la fausse identité d'un couple de serial killers. Bon, on l'a compris : Sepp n'est pas un débutant, et c'est aussi un homme de caractère qui sait qu'il peut compter sur son (ex-)coéquipier quoi qu'il arrive ; il n'empêche qu'il mène son enquête dans un environnement extrêmement angoissant (y compris pour le lecteur) et que, en même temps, on a presque peur qu'il aboutisse, car on devine que le sort réservé au tueur par ses pairs, sera insoutenable… Vont-ils arriver au bout de leur enquête, alors que les cadavres dévastés s'accumulent, et que l'organisateur de la Konvention leur met une pression qu'on ne peut qualifier que de diabolique ?
Hélas, on arrive à l'irréparable en cours de route – qui pour moi a été une grande claque, je ne m'y attendais pas du tout j'ai été littéralement « soufflée » par la mort d'Hélène ! je ne m'habitue pas aux (heureusement très rares) thrillers dans lesquels l'un des personnages principaux est tué prématurément… – qui nous mène à une 2e partie, post-Konvention, encore plus musclée, pas tant dans l'action, quoique… mais certainement dans la description des scènes de crime, qui devient de plus en plus nauséabonde. Désormais, Sepp tourne définitivement le dos à son métier de policier et part pour ce qui ressemble furieusement à une croisade personnelle, dont il veut arriver au bout quoi qu'il (lui) arrive !
Avec tout ça, mon sentiment vis-à-vis des personnages est un peu mitigé. J'ai beaucoup apprécié le personnage d'Hélène, véritable pendant à celui de Sepp, d'abord opposé, mais on devine d'emblée qu'ils vont finir par savoir travailler ensemble – et peut-être même plus ? J'ai apprécié aussi que l'auteur, à travers tous ces événements monstrueux, continue de s'attarder à la vie privée et familiale des protagonistes : la fidélité mutuelle entre Sepp et le « Grand Blond » quelles que soient les circonstances ; la difficile vie de famille de Sepp, qui adore sa femme, mais regrette de n'avoir pas pu avoir d'enfants (avec ce détail qu'ils ont tous deux faits des tests mais ont refusé de savoir qui des deux ne pouvait procréer, et Sepp aime tellement sa femme, qu'il ne lui dira jamais qu'en réalité il sait, et que c'est elle qui est stérile…) ; ou encore le passé difficile d'Hélène, qui s'est retrouvée orpheline à la suite du meurtre de sa famille… par un serial killer quand elle était enfant ! Mention aussi, bien entendu, au « Grand Blond », qui apparaît relativement peu, mais dont j'ai aimé le côté « cool » et son indéfectible amitié envers son coéquipier, même quand ce dernier part en vrille.
En revanche, j'ai eu du mal à suivre Sepp dans la deuxième partie… Oh ! certes, on comprend ses motivations, qui correspondent à son caractère et à tout ce qu'on nous a présenté de lui jusque-là, mais son choix de s'enfoncer aussi profondément dans l'illégalité, même pour traquer des êtres pires que tout, reste le choix controversé d'un homme qui se prend tout à coup pour un justicier sans peur et sans reproche, ce qui pose l'éternelle question : où est la limite entre justice et vengeance et/ou peut-être rendre justice soi-même ? Je ne veux pas trancher, ce n'est pas le but ici, mais le choix clairement assumé de Sepp (j'allais dire : de l'auteur) a quelque chose de dérangeant quoi qu'il en soit, peut-être précisément parce que l'auteur (cette fois je n'hésite pas) donne l'impression qu'il ne se pose pas cette question, ou en tout cas le personnage de Sepp l'élude, tant il est obsédé par sa quête… Au risque de me répéter : je le comprends, et même à 200%, mais décidément je ne parviens pas tout à fait à approuver cette démarche !
Dès lors, même si cette deuxième partie est passionnante – et encore plus barbare que la première partie, c'est dire ! avec foisons de détails crus et cruels, mais tout à coup « justifiés » - je n'ai jamais réussi à accrocher tout à fait. Je ne lisais plus que pour savoir où tout cela allait nous mener (même si, à un certain point, on devine le fin mot de l'histoire), ce qui est bien un peu la définition d'un page-turner… mais avec un mouvement de recul à chaque nouvelle page tournée !
Quoi qu'il en soit, on ne peut nier que ce sont tous des personnages forts et bien campés… qui portent une histoire quand même tout à fait invraisemblable (non ?) et parviennent à nous y faire croire !
Ainsi, je recommande ce thriller pour sa grande originalité, et son humour décalé omniprésent même dans les pires moments. Mais sachez que c'est une histoire très sanglante, avec profusion de détails macabres dans le chef de serial killers avérés, puis de celui qui s'autoproclame justicier contre ces derniers, si bien que la limite entre justice et vengeance est ici complètement effacée, ce qui peut déranger.
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