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3,54

sur 231 notes
C'est une soirée banale, « presque chiante ». Chérif fête ses partiels universitaires avec ses copains Astor, Issa et Demba autour d'un barbecue improvisé au pied des tours de leur quartier, sur la dalle où trône la pyramide emblématique de la cité, un bâtiment où l'on se rassemble en sous-sol pour la musique et la fête. Mais soudain tout bascule. Un énième contrôle d'identité en surface et une évacuation, à coups de gaz lacrymogène, de la teuf souterraine en cours, tournent au drame et à la bavure policière : Samy, le petit frère de Chérif, est abattu d'une balle. Pour les jeunes du quartier habitués au harcèlement des « gens en bleu », c'est la goutte de trop : entre douleur et colère, ils préparent une sédition collective, pour le moins explosive.


Issue des banlieues, Diaty Diallo est aujourd'hui une militante antiraciste, une fidèle des « trop nombreux événements de commémoration et marches qui ponctuent [les] années de lutte ; des mères, pères, frères, soeurs, ami·es qui à la suite de la perte de l'un.e des leurs ont été forcé·es de s'engager au combat. » Ce roman crie sa rage et sa révolte, au fil d'une écriture incandescente et vibrante, pleine d'une oralité brute, sans fard ni artifice, qui ne le rend que plus percutant. Dans un crescendo enflammé dépeignant des quartiers de plus en plus encerclés, par la pression immobilière qui grignote inexorablement friches et espaces encore libres, par le harcèlement policier qui, sempiternellement, force les habitants à justifier d'une existence invalidée « par principe », s'appesantit une atmosphère de cocotte-minute, que chaque nouvelle humiliation, chaque injustice supplémentaire, rendent dangereusement plus explosive.


C'est donc assez logiquement, qu'après avoir créé l'empathie pour ses personnages endeuillés après des années d'iniquité et d'impuissance, après avoir partagé leur sentiment de révolte grossi depuis des profondeurs qui ne suffisent plus à le contenir, le récit s'achemine vers sa déflagration finale, une insurrection collective qui retentit comme une prémonition crédible et un véritable acte politique de la part de l'auteur engagée.


Résolument manichéen dans sa colère et dans sa détermination à se faire entendre, ce livre est un véritable cri de guerre, un brûlot qui n'a que faire du politiquement correct et met les pieds dans le plat pour crier à la face du monde l'urgence, la révolte, la peur aussi : « Faut pas nous plier, faut pas nous plier, faut pas nous pourchasser, arrêtez de nous faire courir, faut pas nous tabasser, nous violer, nous flinguer. Faut arrêter s'il vous plaît. » C'est aussi un premier roman admirablement maîtrisé.

Lien : https://leslecturesdecanneti..
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Musical, entêtant, ce premier roman suit Astor et ses amis, les mouvements de leur corps alors que la musique retentit, le balancement de leurs membres, leur démarche, jusqu'à la déflagration et l'envie de soulèvement. A la fois hachées et mélodieuses, rythmées et aqueuses, les phrases de Diaty Diallo envoûtent, fascinent et défendent son message, son manichéisme assumé (plus de détails : https://pamolico.wordpress.com/2022/10/24/deux-secondes-dair-qui-brule-diaty-diallo/)
Lien : https://pamolico.wordpress.c..
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« Depuis le temps, on a évidemment appris à exécuter les ordres sans faire de commentaires pour que ça aille plus vite, poursuivre la fête ou rentrer chez nous. Mais ce soir-là ce n'est pas tout a fait pareil. Mais il y a toujours des soirs où ce n'est pas tout a fait pareil. »

Une friche, une porte de métal, la pyramide, l'enfance et ses souvenirs, l'underground, de la joie, des décibels, de la danse, une jolie fille, de la fumée, des bécanes, de l'amitié, des vies, des questions, des fouilles, des renforts, des fantasmes, une inhabituelle rumeur, des sombres pensées, un adorable parfum, la pyramide, des photos de famille, action ou vérité, des balles, porter la douleur, la pluie, de la fureur, des amendes, des coups, le bordel, des fêtes, une clairière, un chaudronnier, des mauvaises vibes, de la pression, des hallucinations, des lueurs, les agents, fuir le zéro, des galères, la chaleur, les mamans, les barbecues, une communauté, une symphonie, le mouvement, l'au-delà, des toits, un combat, se raconter des trucs, un lancement, l'honneur ...

Un grand merci à lecteur.com et aux Éditions du Seuil (Crées en 1935 !) pour le premier roman de l'intéressante Diaty Diallo... Un roman intensément fébrile lucide et vibrant.
Une voix, un style, une histoire qui brûlent le coeur et bien plus que deux secondes.

"Un sacré boulot d'orfèvre."


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"Deux secondes d'air qui brûle" est le premier roman de Diaty Diallo bien qu'elle pratique depuis l'adolescence différentes formes d'écriture dont la tenue d'un Skyblog et surtout la composition de chansons, ce qui n'est pas surprenant car les références musicales de ce livre sont nombreuses.
Cela commence par une soirée parking en banlieue décrite par Astro, le narrateur. On est vite en immersion dans une cité où tout ce qui est organisé (barbecues dehors, motos cross sur un terrain, rodéos urbains, fêtes arrosées, drogues...) est interdit et surtout violemment sanctionné par la police. Je dirais que, même lorsqu'ils ne font rien de particulier (ce qui arrive souvent), les jeunes de la cité sont souvent contrôlés voire harcelés, ce qui crée une tension permanence jusqu'au drame, la mort de Samy.

Si le sujet est passionnant puisque l'on vit les événements à l'échelle humaine, ce roman n'est pas entièrement convaincant.
Il y a un côté factuel qui laisse un peu perplexe sur les raisons du drame comme si les jeunes devaient subir la guerre avec la police, comme une fatalité. Il n'y a aucune tentative d'explication ou d'analyse.
La particularité de ce livre est le langage qui est celui des cités. Je le connais un peu pour vivre en banlieue depuis longtemps et cette partie-là est assez réussie. Mais je trouve qu'il y a quelque chose qui ne fonctionne pas bien parce que la narration est variable : il y a des échanges avec un langage parlé et une narration parfois trop classique qui ne colle plus à l'histoire.
Pour autant, il y a de bons passages et j'aime beaucoup les titres des chapitres qui correspondent aux lieux ou aux personnes même si je trouve qu'elles ne sont pas suffisamment incarnées.
Dommage qu'avec ce sujet grave et important (Diaty Diallo a raison de dénoncer les violences policières dans les quartiers pauvres) elle n'arrive pas à rendre ce premier roman plus palpitant.

J'ai eu la chance de lire ce livre en avant-première en tant que jury du 21ème Prix du roman Fnac pour la rentrée littéraire 2022.


Challenge Riquiqui 2022
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Lu dans le cadre de la dernière masse critique, merci beaucoup de m'avoir sélectionnée !

Malheureusement aucun plaisir ressenti à la lecture de ce premier roman. Je l'ai trouvé très brouillon. Les personnages ne sont absolument pas développés donc aucun attachement ni empathie pour eux. L'intrigue ne tient qu'à un fil. Quant à l'écriture on a vu mieux, même si par moment elle s'avère assez poétique. Un livre plat, heureusement court ce qui m'a permis de rapidement en achever sa lecture.

J'ai lu mieux dans les mêmes registre et sujet, beaucoup mieux. Tanpis !
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Diaty Diallo place son récit au coeur d'une cité de banlieue où les jeunes, livrés à eux-mêmes s'ennuient en été. le soir ils se regroupent pour faire la fête. Lors d'un contrôle de police tourne mal, un gamin de 15 ans qui faisait du rodéo à moto est abattu. La mort d'un jeune abattu par un policier est inacceptable. Ce roman relate une triste réalité qui ne peut être cautionnée. Les grands frères sont atterrés et prépare une revanche.
J'ai aimé l'actualité du sujet. Diaty Diallo dénonce les violences policières considérées comme une fatalité et le désoeuvrement des jeunes dans les cités mais ce récit est de parti pris, sans nuance avec des personnages caricaturaux. le sujet est traité de manière factuel, sans profondeur. J'ai été agacée par les personnages, alors que j'aurais dû être émue.
Je vais faire ma snobe, j'ai horreur des textes écrit en langage jeunes de banlieue. Forme d'expression qui plaît pourtant à un certain parisianisme, des textes similaires ayant reçu des prix. En plus il y a plein de mots que je ne connais pas ! le langage est souvent très pauvre avec des phrases courtes et vraiment sans intérêt telles : "Quoi, il demande en arrivant" (p 27). Et pourtant, de temps à autre, l'auteure se lâche et écrit des pages entières dans une jolie langue avec un vocabulaire choisi.
Ce roman n'était pas pour moi.
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Les belles surprises, les jolies rencontres, tiennent finalement à peu de choses ... Un présentoir dans une médiathèque, un titre qui attire l'oeil ...

Deux secondes d'air qui brûle, c'est une plongée en apnée dans un monde qui nous paraît si étranger, si lointain, et pourtant si familier ...

La banlieue parisienne, ses barres d'immeubles HLM, ses grands parvis bétonnés et ses parkings souterrains, ses dalles si pleines de vie, des gamins qui tapent le ballon à longueur de journée, ses rodéos urbains et ses barbecues sauvages ...

On a tous des images en tête. Mais si on n'y vit pas, on ne sait pas. Diaty Diallo en vient. Et elle manie à merveille la langue, ses langues, pour nous faire vivre de l'intérieur un feu qui couve, un embrasement à venir ...

J'ai eu quelques craintes avant ma lecture. Parce qu'en parcourant quelques critiques de babelionautes - ce que je fais rarement avant lecture - j'ai eu peur d'une langue à laquelle je resterais hermétique, d'un énième livre sur la rage des banlieues, la violence qui peut la gangréner, celles des habitants, des trafiquants, la violence ordinaire, et celle d'un système aussi. J'ai eu peur d'un jugement, d'un parti pris aussi.

Et je crois m'être trompé. Parce que Diaty Diallo parle juste, qu'elle met des mots mais sans jeter d'anathème, sans condamner. C'est mon sentiment et il ne sera sans doute pas partagé par tous. Mais ces "Deux secondes d'air qui brûle" sont une bien belle surprise d'une plume prometteuse dans mes dernières lectures.
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Juste deux secondes et la vie bascule, comme le rappelle Diaty Diallo dans son premier roman écrit comme un cri de protestation, avec à l'arrière plan le son d'un rap strident, pour dénoncer les violences policières où la jeunesse finit par inonder l'air qu'ils ont brûlé.

Car Diaty Diallo écrit la langue qui ne s'écrit pas. Celle de ces zones reléguées, abandonnées, plus pauvres que la pauvreté déclarée. Alors, après un énième contrôle d'identité de jeunes qu'ils connaissent pourtant par coeur, la police dérapage et la vie d'un jeune s'envole.

Qu'il s'appelle ici, Samy, ou alors Aboubakar ou Amada, leur vie les a quittés, alors que la police se devait de les protéger.

Alors Astor se met à raconter l'avant avec les fauteuils sur la pelouse décimée, les barbecues au coin de l'immeuble et surtout la bande de copains. Il y a Chérif, Isaa, Demba et Nil, et tant d'autres.

Ils partagent le quotidien et se connaissent depuis des lustres. Mais quand au cours d'un énième contrôle de police, la vie d'un plus jeune lui sera arrachée, alors, tout va s'embraser. Et cet incendie dans les corps et les têtes investit le quartier.

Difficile de qualifier cette écriture : la poésie est une constante et la musique accompagne, scandant les mots habituels mais ici écrits souvent sans fioritures mélangés au langage des quartiers. Elle accompagne les regards, les corps, les oublis aussi. de ceux duquel quelqu'un s'échappe aux autres pour mieux se découvrir.

Mais, Diaty Diallo partage les odeurs des plats des mères, leurs amours dans les casseroles, la fumette omniprésente et aussi l'alcool comme une normalité. Elle vante aussi ces pages comme de jeunes chevalier sur leurs destriers modernes flambant devant les potes mais aussi les plus vieux avec leurs motos, comme les fantassins du quartier.

Pas sûr que l'écriture reste sa seule expression !

Même si il y a quelques longueurs qui viennent ralentir ce rythme nerveux et sensible, Diaty Diallo invente un langage poétique pour faire entendre une colère qu'il n'est pas sûr qu'elle se soit assagie !
Lien : https://vagabondageautourdes..
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D'entrée de jeu, j'ai eu du mal avec le style qui utilise le verlan et le parler de la cité. Si à l'oral, je n'ai pas trop de mal avec, à l'écrit, je dois avouer que je trouve cela beaucoup moins fluide.

Le sujet était intéressant, pourtant, les personnages bien présentés et haut en couleurs, mais je me suis rapidement perdue dans le dédale des immeubles, et que vient faire cette pyramide au milieu ?!

Le personnage d'Astor le narrateur promettait d'être passionnant, son regard sur les événements et ses ami.e.s.

Mais j'ai fini par lâcher ce roman, perdue.
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La vie banale et injuste dans une cité où le profilage racial et la violence policière sont institutionnalisés.
J'ai aimé de ce roman l'écriture, incandescente, obsédante qui reflète bien la rage et la colère de l'injustice. On reconnait le style rap : les phrases courtes, le langage des cités, efficace et percutant. Et aussi au détour, on tombe sur quelques pages d'une envolée lyrique étonnante car contrastant avec le reste du texte. J'ai beaucoup moins aimé la position (assumée) manichéiste de l'auteur, les personnages un peu trop caricaturaux : (étudiant en droit, jardinier, éducateur. Pas de dealers, ni de délinquants.), et la fin qui n'est pas à la hauteur de l'explosion qu'on est en droit d'attendre vu la cocotte-minute qui bout tout au long du récit.
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