Citations sur Malamute (129)
Boire seul, c’est de l’alcoolisme, boire à deux, c’est de la convivialité !
À quoi bon supporter ce déballage permanent de drames et de misère, de guerres, de catastrophes, ce voyeurisme imposé qui n’apportait rien de bon ? Allumer la télé, c’était laisser entrer le malheur dans la maison.
Germain lisait les arbres de la même manière que d'autres lisent les livres, passant d'un cerne à un autre comme on tourne des pages, sans aucune prétention que celle d'interroger les géants sur la marche du temps, à la recherche d'une certaine logique dans ces successions concentriques.
Là où mes amis passaient leurs maigres économies à s'étourdir d'alcool et de danses le week-end, jusqu'à l'abrutissement, j'ai toujours préféré trouver refuge dans les livres. Eux seuls possèdent ce pouvoir fantastique de m'arracher, le temps de la lecture, à la fange dans laquelle je me débats à longueur de jour.
Le vieil homme enviait les arbres. Leur faculté à retirer du monde à l'approche de l'hiver, à figer la course du temps dans le cœur des racines avant de laisser la sève gorgée de vie affluer de nouveau vers leurs branches à l'arrivée des beaux jours le fascinait. Une existence passée à mourir pour mieux ressusciter.
Depuis toujours, la jeune femme trouvait l'exercice de la parole difficile, non quelle manque de vocabulaire, mais elle faisait preuve de défiance vis à vis des mots, ces petites choses qui parfois vous échappent sans qu'il soit possible de les ramener dans le fond de votre gorge une fois libérées, comme ces invectives crachées la veille au soir à la face du vieux voisin tandis qu'elle s'emportait. Prendre le temps de trier les mots, choisir les meilleurs et les garder en bouche le temps de la réflexion avant d'en délivrer le juste compte.
Remonter le temps, cercle après cercle, de la naissance du hêtre au jour de sa coupe, de l'écorce externe à la moelle au centre en passant par liber, le cambium puis l'aubier, la partie vivante et le duramen, son coeur mort. Le vieillard ignorait que cette science si particulière qu'il pratiquait portait le nom barbare de dendrochronologie. Une information dont il n'aurait eu que faire. Germain lisait les arbres de la même manière que d'autres lisent les livres, passant d'un verbe à un autre comme on tourne des pages, sans autre prétention que celle d'interroger les géants sur la marche du temps, à la recherche d'une certaine logique dans ces successions concentriques.
Germain avait coché d'un trait de feutre le deux cent cinquante et unième cercle, l'année de sa propre naissance, une lanière de faire partie intégrante de l'Histoire lui aussi. Il arrive que les arbres conservent dans leur tronc la trace des soubresauts de l'humanité, des troncs cribles de mitraille et farcis d'éclats d'obus sur lesquels venait mourir parfois la chaîne des tronçonneuses.
Clotilde aimait consigner les choses, des choses aussi insignifiantes que la chute des premiers flocons. De la même manière elle se plaisait à emprisonner l'existence dans un corset d'habitudes, le feuilleton télé du début d'après midi, la séance de cinéma du lundi avec les amies, les cours de poterie du mardi soir, le marché du mercredi matin, la médiathèque le vendredi, la pâtisserie du dimanche, autant d'oeillets où glisser le lacet pour bien enserrer les jours, et avancer d'un rendez vous à un autre sans avoir à contempler l'abîme du temps qui passe. Sans parler de cette manie exaspérante de dresser la table du petit déjeuner pour le lendemain avant l'heure du coucher comme on dresse un pont entre deux rives.
Avec l'arrivée de la nuit, alors que plus aucune lumière n'était là pour repousser les ténèbres, on redécouvrit les peurs primitives de l'Homo sapiens face à la toute puissance de Dame Nature .