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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Un fort lointain souvenir de lecture d'un texte puissant, secouant, publié initialement par les éditions des Femmes, en 1977...J'en ai retrouvé une réimpression à la Librairie Mémoire7 [Clamart], que j'ai relue en une nuit...

Toutefois... la chronique n'est pas aisée...tant la révolte et l'émotion nous prennent à la gorge au fil du récit.

L'auteure, médecin psychiatre se rend dans une prison de femmes, au Caire...pour étudier les personnalités des détenues...Elle se sent attirée et fascinée par une prisonnière différente et mutique, Ferdaous ...


"Ferdaous en langue arabe signifie "paradis", et c'est donc une femme prénommée Paradis qui, la veille d'être pendue pour avoir tué un homme, interpelle, d'une "voix en enfer", toutes les femmes d'une société où l'oppression sexuelle séculaire commence à peine à être dite de l'intérieur.
Etapes successives de la vie de Ferdaous, devenue prostituée par révolte,après avoir traversé les cercles d'une exploitation implacable: son enfance en Haute-Egypte où le père, écrasé de misère, épargne sa vache mais non sa femme, ni sa fille; son adolescence au Caire où l'oncle, professeur, refuse de l'envoyer à l'université "où il y a des hommes" et la marie de
force à un vieillard. Femme battue, Ferdaous choisit la rue (...)
(p. 9)[Préface d'Assia Djebar, mai 1981]

L'auteure est intriguée par cette femme," meurtrière par défi"... souhaite la rencontrer, mais dans un premier temps, elle essuiera un refus catégorique; Ensuite, peu avant de subir sa condamnation à mort, Ferdaous accepte de raconter son lourd parcours, dans une société où une vache est mieux traitée qu'une épouse ou une fille, où ces dernières comptent pour rien....

L'auteure, par un style original (où des passages au lyrisme confirmé, très semblables reviennent régulièrement comme une sorte de psalmodie... qui nous berce comme le flux, le reflux de la mer...) met en avant le courage, la lucidité infinis de cette femme, éprouvée par une société archaïque, aux traditions oppressantes pour les femmes, sans omettre le machisme sans limite des hommes....maris, pères, frères, etc.

L'itinéraire acharné d'une femme qui souhaite trouver sa place, ainsi que dignité et indépendance...mais après avoir été rudoyée, violentée par les hommes de son entourage et les autres...elle retourne malgré elle à la prostitution...Je transcris un des passages les plus déchirants de ce récit , d'une femme qui a cru en l'amour d'un homme en qui elle avait mis toute sa confiance...


"Peut-être aussi parce que la vie d'une prostituée, c'est la rue et là, jen'attendais rien de lui.
Mais dans l'amour j'avais attendu quelque chose; dans l'amour, j'avais commencé à rêver que j'étais enfin devenue une personne. Quand j'étais prostituée, je ne donnais rien pour rien; mais dans l'amour, j'ai donné mon corps, mon esprit, mes forces pour rien. J'ai tout dépensé pour
l'amour. J'ai livré mon être sans armes et sans défense. Prostituée, je me tenais toujours sur la défensive, toujours l'esprit éveillé. Je protégeais mon être en soustrayant ma personne profonde et je livrais à l'homme un corps vide et insensible. C'était cela me défendre moi-même: m'abandonner , tout en me dérobant.

(...) Prostituée, j'économisais mon énergie, alors que dans l'amour, combien ai-je donné de mon être ! (...)
Je ne voulais rien d'autre qu'être ravie par l'amour et devenir ainsi moi-même, cette femme respectée que les autres ne méprisent plus. (p. 136-137)


On ne sort pas indemne de cette lecture qui exprime si fort les
violences insupportables faites aux femmes sous toutes les
latitudes... Tant que des hommes traiteront sans respect leurs
femmes, la planète débordera de guerres et de conflits...multiples.

"Je me sentais étrangère à ce monde et tout de ce monde m'était étranger: cette terre, ce ciel, ces arbres. C'était comme si je déambulais dans un monde irréel, sans que je lui appartienne, sans qu'il m'appartienne...
Faire ce que l'on veut et ne pas faire ce que l'on ne veut pas !
Liberté de n'appartenir à personne, volupté de se détacher de
l'univers ! Se sentir une femme indépendante, parmi d'autres êtres indépendants ! Ne subir le pouvoir d'aucun homme et ne se plier ni aux lois du mariage, ni à celles de l'amour ! Vivre en dehors du temps, en dehors des lois, en dehors même de l'existence ! (p. 138)
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Quand on est un homme, il n'est pas facile de lire ce livre. Mais cela vaut la peine de s'y confronter. Je ne lis pas seulement pour me distraire au coin du feu.

C'est un témoignage coup de poing sur la condition des femmes en Égypte dans les années septante. Nawal El Saadawi insiste pour rencontrer une condamnée à mort en prison. C'est Ferdaous, dont le nom signifie 'paradis'. Ferdaous refuse jusqu'au jour même de son exécution, puis accepte. Nawal El Saadawi recueille son témoignage. Ferdaous est exécutée aussitôt après.
Le parcours de Ferdaous dénonce sans détour l'enfermement des femmes égyptiennes, même après la révolution nassérienne. Non plus un enfermement physique, comme ce que l'on lit chez Naguib Mahfouz, mais la vie dans une société qui empêche les femmes d'assumer une existence indépendante. de ce point de vue toutes les portes sont fermées. Ferdaous trouvera une liberté temporaire dans la prostitution. Mais là aussi elle est contrainte de se soumettre, sauf à payer le prix le plus élevé.
Heureusement, en Belgique et en France nous ne sommes plus dans une société de ce type. Mais tout de même, par analogie, certains préjugés et réflexes masculins restent tenaces et, si l'on est sincère, on est un peu effrayé de les découvrir en soi.
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Nawal El Saadawi, Ferdaous une voix en enfer, des femmes /Antoinette Fouque, 2007



Nawal El Saadawi est médecin en Egypte. Elle est née en 1931 près du caire. Elle est connue dans le monde entier pour son engagement dans la lutte pour les droits et les libertés des femmes arabes. En 1972, elle est révoquée de son poste au ministère pour avoir publié Les femmes et le sexe, qui traite de sexualité, de religion et du traumatisme de l'excision– autant de sujets tabous dans le pays. Sa mère, musulmane traditionaliste, insiste pour que sa fille soit excisée à l'âge de six ans. Health est interdit et les livres de Nawal El Saadawi sont censurés. Elle est emprisonnée en 1981 pour s'être opposée à la loi du parti unique sous Anouar el-Sadate Elle a publié en janvier 2007 une pièce de théâtre en arabe intitulée Dieu démissionne à la réunion au sommet. Jugé blasphématoire par l'université islamique du Caire, ce livre a été retiré de la vente avant même l'ouverture du procès qui lui est intenté.

Après son roman La Chute de l'iman, en 1987, publié au Caire, elle a commencé à recevoir des menaces de la part de groupes fondamentalistes. En 1993, elle est jugée pour hérésie et condamnée à mort. ( source wikipédia)

En 1982, elle a reçu en France le prix de l'amitié franco-arabe pour la première édition de ce livre aux éditions Des femmes-Antoinette Fouque.

Elle a écrit une quarantaine de livres essais et fictions confondus. (Toutes ces informations ont été vérifiées et recoupées avec le site de l'auteur en anglais).

Site de l'auteur en anglais



Ferdaous une voix en enfer évoque la rencontre entre une doctoresse psychologue et une prisonnière « Ferdaous » accusée d'avoir tué un homme et condamnée à être pendue le lendemain. Ce livre est le récit de la confession de Ferdaous, et l'explication de son geste qui s'enracine bien au-delà d'elle, dans les coutumes, les interdits et la violence faite aux femmes dans son pays. Elle raconte son enfance en Haute-Egypte, dans une famille écrasée par la misère, où le père bat sa femme, mange le premier quand ses enfants ont faim et règne en despote. Il raconte l'excision aussi, ce bout ce chair et de plaisir qui s'envolent à jamais, plaisir qu'elle avait découvert dans des jeux d'enfant, et dont elle se souviendra toute sa courte vie comme d'un paradis perdu : « J'ai eu l'impression que ce plaisir existait extérieur à mon être, comme s'il avait surgi avec moi mais que, tandis que je grandissais, lui ne grandissait pas. ». Les hommes instruits ne sont guère plus cléments ; l'oncle abuse sexuellement de sa nièce et refuse de l'envoyer à l'université car il y a des hommes. le premier homme qui l'écoute et lui apporte de l'aide n'est qu'un proxénète. Il n'y a pas d'issue. Il n'y a pas d'amour. Chacun est pris , les femmes comprises, dans les rets d'une tradition séculaire , prisonniers de structures mentales extrêmement rigides, et de lois qui contraignent les femmes
(Pour lire la suite, cliquez sur le lien)
Lien : http://www.litterama.fr/arti..
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Ferdaous, une voix en enfer.
Récit à la première personne dans sa partie centrale d'une femme, emprisonnée et condamnée à mort pour meurtre, elle qui toute sa vie, entre subir le patriarcat et la domination de la société égyptienne de son temps, et la liberté, aura toujours choisi cette dernière, même au prix d'une vie de réprouvée, puisque Ferdaous se prostitue.

Une voix en enfer, mais surtout une voix puissante. Celle de Nawal El Saadawi qui, par ce court récit, par ses mots, ses lignes ô combien percutantes, parfois dérangeantes, nous livre un plaidoyer d'une force rare sur l'émancipation des femmes dans un univers marqué par la domination sans partage des hommes, acceptée souvent sans conditions par nombre de femmes.

Ce ne sera pas le cas de Ferdaous.
Qui fait le choix de la liberté, au prix de sa vie.

Une voix puissante.
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Ecrit bouleversant sur une égyptienne condamnée à mort pour avoir tué un homme. Montre une société dans laquelle la femme a peu de droits et de liberté.
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