Il faudrait une machine qui efface la mémoire pour ignorer ce genre de chose et, si une telle machine existait, je serais la première à en vouloir une. Je ferais effacer à jamais de mon esprit les images terribles des derniers instants de Carole.
Si Carole avait aguiché, séduit, roulé ou trompé l’assassin, alors il y aurait un doute fondé. Une provocation. C’est le mot qui a été utilisé. Une provocation ferait toute la différence. La différence entre une faute totale et une faute partielle. La différence entre un meurtre et un homicide involontaire. La différence entre les faits et une histoire inventée de toutes pièces, uniquement censée prouver que l’assassin n’était pas pleinement responsable de ses actes.
L’assassin a alors fondu en larmes, comme s’il était émotionnellement dévasté par cette expérience. Mais ça ne me semblait pas sincère. On appelle ça des larmes de crocodile, je ne sais pas pourquoi, mais c’est comme ça.
...c’est mal de vouloir que le temps passe plus vite, que c’est comme si on voulait abandonner une partie de sa vie, mais j’abandonnerais volontiers une heure pour que tout ça se termine. J’abandonnerais une journée de ma vie pour voir la fin de celle d’un autre…
Nous ne cherchions pas les ennuis, mais les ennuis semblaient savoir où nous trouver.
Certains cherchent la consolation dans le bruit, d’autres dans la solitude. Certains n’ont pas le choix et ne trouvent aucune consolation. Il n’y a pas de réconfort dans la routine, car la routine n’est rien qu’un rappel du passé. Il n’y a pas non plus de réconfort dans la nouveauté et l’inconnu, car vous êtes déjà confronté à une abondance de nouveauté et d’inconnu, même si c’est intérieur, émotionnel.
Quand un événement dramatique survient, il y a trois possibilités : soit il vous définit, soit il vous détruit, soit il vous renforce.
Mais dans son monde à soi, dans son monde intérieur, une minute recèle des possibilités infinies. Les souvenirs d’événements qui se sont étalés sur une année peuvent défiler en cinq secondes, peut-être moins. Comme un rêve. Le rêve d’une décennie, vécu en un battement de cœur.
Dans le monde réel – même si je ne sais plus avec certitude ce qui définit le réel ces temps-ci –, une minute n’est rien.