Tu sais qui j'envie ? Randazzo. Il a appris le métier de paysan tout petit, il connaît les plantes et il sait à quel moment les cultiver. [...] depuis toujours, ses mains connaissent les arbres, les branches, les fruits. Un boulot, ça devrait s'apprendre quand on est enfant.
L'autre con, sans comprendre que le jeu n'était qu'un prétexte pour lui casser la gueule, s'y colla, sans protester. Il alla vers le mur, traînant les pieds. Une marche inexorable. Il savait qu'il allait vers une souffrance certaine, mais il tenait tellement à être avec nous que sa dignité semblait avoir laissé place depuis longtemps à la résignation. Pourquoi ne cherchait-il pas d'autres copains comme lui, des gros, des inutiles ? [...] C'était un faible. Les faibles ne méritent pas le respect.
- Et comment on apprend ?
- En se trompant.
La première fois que le Nègre lui avait expliqué comment on frappe le sac. Il y a deux façons. La première, quand le sac s'éloigne et le coup sera alors un défoulement, un geste long, avec l'articulation en ouverture. Le second, quand le sac revient, un coup bas, les coudes près des côtes. Ne jamais frapper le sac quand il est immobile. On frappe ce qui bouge, pour déséquilibrer ou pour freiner. La vie est dans le mouvement, ce qui est immobile est mort. Frapper un sac qui ne bouge pas, ça ne fait que te bousiller les doigts.
(P89)
Et sa mémoire repêcha en même temps un souvenir qu’il croyait avoir refoulé. La première fois que le Nègre lui avait expliqué comment on frappe le sac. Il y a deux façons. La première, quand le sac s’éloigne et le coup alors sera un défoulement, un geste long, avec l’articulation en ouverture. Le second, quand le sac revient, un coup bas, les coudes près des côtes. Ne jamais frapper le sac quand il est immobile. On frappe ce qui bouge, pour déséquilibrer ou pour freiner. La vie est dans le mouvement, ce qui est immobile est mort. Frapper un sac qui ne bouge pas, ça ne fait que te bousiller les doigts.
Le tempérament d'un boxeur ne s'exprime pas dans la furie de ses frappes mais dans la sagesse de l'attente, sa manière d'affronter l'adversaire, la distance qu'il crée et qu'il annule par sa seule volonté. Le chaos traduit seulement l'angoisse. Pendant la phase d'étude, c'est lui-même que le boxeur teste, pas son adversaire. Mon poing peut-il atteindre sa cible ?
(P268)