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Citations sur La place (358)

Pour rendre compte d’une vie soumise à la nécessité, je n’ai pas le droit de prendre le parti de l’art, ni de chercher à faire quelque chose de « passionnant », ou « d’émouvant ".
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Je voudrais dire, écrire au sujet de mon père, sa vie, et cette distance venue à l'adolescence entre lui et moi. Une distance de classe, mais particulière, qui n'a pas de nom. Comme de l'amour séparé.
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C'était un dimanche, au début de l'après-midi.

Ma mère est apparue dans le haut de l'escalier. Elle se tamponnait les yeux avec la serviette de table qu'elle avait dû emporter avec elle en montant dans la chambre après le déjeuner. Elle a dit d'une voix neutre: "C'est fini." Je ne me souviens pas des minutes qui ont suivi. Je revois seulement les yeux de mon père fixant quelque chose derrière moi, loin, et ses lèvres retroussées au-dessus des gencives. Je crois avoir demandé à ma mère de lui fermer les yeux. Autour du lit, il y avait aussi la sœur de ma mère et son mari. Ils se sont proposés pour aider à la toilette, au rasage, parce qu'il fallait se dépêcher avant que le corps ne se raidisse. Ma mère a pensé qu'on pourrait le revêtir du costume qu'il avait étrenné pour mon mariage trois ans avant. Toute cette scène se déroulait très simplement, sans cris, ni sanglots, ma mère avait seulement les yeux rouges et un rictus continuel.
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Il me conduisait de la maison à l'école sur son vélo. Passeur entre deux rives, sous la pluie et le soleil. Peut-être sa plus grande fierté, ou même la justification de son existence : que j'appartienne au monde qui l'avait dédaigné.
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Il s'énervait de me voir à longueur de journée dans les livres, mettant sur leur compte mon visage fermé et ma mauvaise humeur. La lumière sous la porte de ma chambre le soir lui faisait dire que je m'usais la santé. Les études, une souffrance obligée pour obtenir une bonne situation et " ne pas prendre un ouvrier ". Mais que j'aime me casser la tête lui paraissait suspect. Une absence de vie à la fleur de l'âge. Il avait parfois l'air de penser que j'étais malheureuse.
Devant la famille, les clients, de la gêne, presque de la honte que je ne gagne pas encore ma vie à dix-sept ans, autour de nous toutes les filles de cet âge allaient au bureau, à l'usine ou servaient derrière le comptoir de leurs parents. Il craignait qu'on ne me prenne pour une paresseuse et lui un crâneur. Comme une excuse : « On ne l'a jamais poussée, elle avait ça dans elle. » Il disait que j'apprenais bien, jamais que je travaillais bien. Travailler, c'était seulement de ses mains.
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Quand j'ai commencé à fréquenter la petite-bourgeoisie d'Y..., on me demandait d'abord mes goûts, le jazz ou la musique classique, Tati ou René Clair, cela suffisait à me faire comprendre que j'étais passée dans un autre monde.
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Ma mère n'a fermé le commerce que pour l'enterrement. Sinon, elle aurait perdu des clients et elle ne pouvait pas se le permettre. Mon père décédé reposait en haut et elle servait des pastis et des rouges en bas.
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Ce qui le rendait violent, surtout, c'était de voir chez lui quelqu'un de la famille plongé dans un livre ou un journal. Il n'avait pas eu le temps d'apprendre à lire et à écrire. Compter, il savait.
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« Je pensais qu’il ne pouvait plus rien pour moi. Ses mots et ses idées n’avaient pas cours dans les salles de français ou de philo, les séjours à canapé de velours rouge des amis de classe. L’été, par la fenêtre ouverte de ma chambre, j’entendais le bruit de sa bêche aplatissant régulièrement la terre retournée.
J’écris peut-être parce qu’on n’avait plus rien à se dire. » (p.57-58)
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Anecdote qui plaisait beaucoup : un paysan, en visite chez son fils à la ville, s'assoit devant la machine à laver qui tourne, et reste là, pensif, à fixer le linge brassé derrière le hublot. A la fin, il se lève, hoche la tête et dit à sa belle-fille : "On dira ce qu'on voudra, la télévision c'est pas au point."

- p.70 -
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