Au réveil, je fus assailli par les souvenirs de la nuit.
De quoi se retourner de l'autre côté, se foutre un oreiller sur la gueule et se rendormir en songeant à Malibu, Mexico City, Acapulco et tous les coins aux noms merveilleux où, je le sais, je n'irai jamais.
Tout était insupportable. Les voix trop fortes, les lumières trop crues, la veuve qui hurlait à la mort, lèvres arrondies en trou du cul de poule - il est vrai que je n'ai jamais réellement inspecté le susdit anus mais qu'importe puisque la France entière a consacré l'expression. Peut-être que, histoire de marquer notre singularité profonde, nous autres, "le peup' de France", devrions adopter , comme emblème national, le trou du cul de poule...
p43
Au Capital sa place, toute sa place mais rien que sa place. Au Travail sa place, rien que sa place, mais toute sa place ! [...]
Du Jacques Doriot !
p75
- Tu connais "Hautes-Etudes" ?
- Je me plaçai instinctivement sur la défensive :
- Un petit commissaire-stagiaire diplômé de l’École pratique des Hautes études ?
- Tout juste ! Une crotte de bique.
- Pourquoi une crotte de "bique" ?
- Pourquoi pas de bique ?
"De long en large, comme une croix, s'étend ce qui est accepté. Portes-y le feu de ta haine."
[...] Du Paul Eluard.
p67
Ce fut un tonnerre de rires, de ces rires dont seuls les paysans normands sont capables : rocailleux, évoquant - vision subjective - tout à la fois le Calvados, le Livarot, la cigarette papier-maïs-qui-fait-dégueuler, les vaches laitières et les mouches à merde.
« Il [l’assassin] avait posé comme possible une part d’imprévisible. Il l’avait même chiffré. Il appelait ça la théorie du 1 %. Le 1 % qui peut tout foutre en l’air.
Il avait attendu trois heures du matin. L’heure somnolente. L’heure où les sentinelles titubent. Il avançait dans les marais d’un pas moins rapide mais plus agile que jamais.
De longue main il avait relevé ses petites éminences et, lorsqu’elles n’existaient pas, les avaient construites lui-même.
Ça lui avait pris trois ans. Trois longues années où, nuit après nuit, il avait poursuivi cet interminable travail de terrassement.
Et combien de bains glacés ! Mais tout était prévu : pour ne pas avoir à hésiter une seconde, pour ne jamais risquer d’être pris, il avait choisi de se laisser doucement glisser dans l’eau à la moindre alerte. »