De nulle part, certes... mais vers où ?
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Les histoires de jumeaux me fascinent, et c'est sans doute ce qui m'a attirée sur la 4e de couv', dont je n'ai lu que les premières lignes - heureusement, car elle spoile. Je garde des souvenirs intenses des 'Météores' de
Michel Tournier et du roman 'Twins' (
Bari Wood &
Jack Geasland, 1977), adapté par
David Cronenberg en 1988 sous le titre '
Faux-Semblants' pour la VF (double interprétation magistrale de Jeremy Irons ♥).
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Cette intrigue de
Claire Favan est tellement bien construite et riche en surprises qu'il serait dommage d'en dévoiler des événements qui n'interviennent qu'après 80 pages, même si on a pu émettre certaines hypothèses à la lecture.
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Il est question de l'ASE (Aide Sociale à l'Enfance), et du sort désastreux des orphelins et des enfants retirés à la garde de leurs parents, qu'ils atterrissent en foyer ou en famille d'accueil. On y voit deux garçons "amis pour la vie" qui semblent assez rapidement prendre des chemins différents - l'un d'eux a-t-il encore comme moteur l'amour parental dont il a bénéficié jusqu'à ses cinq ans ?
On aimerait que la niaque suffise pour que les statistiques s'améliorent :
"Seul 1/3 d'entre eux peuvent bénéficier d'un contrat jeune majeur [à 18 ans], censé assurer la transition entre la majorité et l'autonomie. (...) Selon les chiffres de l'avant Covid, 25% des sans-abri sont d'anciens pensionnaires de l'ASE. Chiffre qui passe à 40% pour les SDF de moins de 25 ans." (p. 45)
"70% des enfants de l'ASE sortent du système sans qualification, les conséquences immédiates sont faciles à deviner." (p. 57)
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Hélas, le déterminisme est à l'oeuvre, malgré des périodes d'espoir et même de rémission, tellement fragiles que le jeune homme est constamment sur le fil et lutte pour sa survie comme une proie au dernier niveau de la chaîne alimentaire... L'engrenage du trafic de drogue est écoeurant, mais je n'ai hélas rien appris ; j'ai pensé en revanche aux récentes & pathétiques gesticulations gouvernementales pour mimer une lutte contre un 'fléau pour les jeunes' - lequel répond à une mécanique parfaitement huilée à haut niveau, comme le montre notamment Hannelore Cayre dans 'La Daronne'.
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Ce roman captivant et édifiant ne laisse pas le lecteur souffler, car certains personnages semblent tournicoter dans un labyrinthe - sans issue ?
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