Les flammes crépitaient, tournoyaient, se contorsionnaient autour de lui en un mouvement presque irréel. Elles finirent par l’encercler et lui barrer le passage. Terrifié, son cheval rua, se cabra. Sachairi avait perdu de vue les combattants, leurs cris lui parvinrent de loin. Le brasier perdit de l’ampleur et il discerna une silhouette qui se découpait devant lui à mesure que les flammes s’amenuisaient. Sa jument se cabrait toujours. Il sauta à terre pour calmer sa monture. Le brasier achevait de se dissiper. Lorsque les flammes eurent totalement disparu, il reconnut le jeune Alistair.
Fascinée, Lera riva son regard sur les cinq arrivants. Une impression se dégageait d’eux et si elle avait dû la résumer en un seul mot, elle aurait dit que c’était la sagesse. Elle avait eu maintes occasions de voir des guerriers de passage à Eghenell dont l’arrivée en grande pompe était loin de produire le même effet que l’apparition solennelle des membres de la Confrérie. Lera se tourna vers la foule et constata que les villageois étaient tout aussi captivés qu’elle. De part et d’autre de la place, les commentaires allaient bon train.
À ces mots, Alistair se baissa et posa un genou à terre. Lera entoura ses épaules de ses bras et se cramponna maladroitement à lui, osant à peine resserrer son étreinte.
— Agrippe-toi bien.
— J’ai comme une légère appréhension, dit-elle d’une voix quelque peu inquiète.
— Surtout ne bouge pas tant que je ne te l’aurai pas dit. Prête ?
— Heu… non !
Alistair n’attendit pas qu’elle lui donne sa réponse. Il agrippa ses jambes. En une fraction de seconde, il se releva, prit de l’élan et sauta en l’air. Lera attendait le moment où il allait retomber sur le rocher suivant mais constata avec stupéfaction qu’il continuait de s’élever dans les airs à une vitesse vertigineuse. Elle eut la sensation que ses poumons s’étaient comprimés dans sa poitrine et que son cœur tentait désespérément de s’ancrer au sol. Si au départ elle avait timidement enlacé Alistair, à ce moment-là tout sentiment de gêne s’évanouit. Elle resserra fermement ses bras autour de ses épaules et enfouit sa tête dans son cou. Elle resta pétrifiée dans cette posture, osant à peine bouger.
— Lorsque j’ai commencé ton entraînement, je me doutais que tu passerais un jour par cet état d’esprit, dit Alistair au bout d’un moment.
— Pourquoi ? Parce que je suis une fille ? répliqua vivement Lera.
— Non, répondit-il avec un sourire, parce que tu es intelligente.