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Citations sur Finir les restes (5)

Réaliser que tes souvenirs, à présent, ne seront plus jamais que les miens.
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Seuls nos yeux se cherchaient encore au fond d'un puits impartageable. Vers quoi aurais-je bien pu t'accompagner quand je n'avais plus que nulle part où te conduire ? Ce lieu insensé auquel je ne t'avais pas destinée. Certains mots sont restés figés là. Dans toute leur maladresse. On ne peut pas vraiment leur en vouloir, nous sommes des êtres maladroits. On n'accompagne jamais ses vivants vers la mort. Jamais.
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Je suis l’humble orphelin selon l’ordre des choses.
L’ordre des chiffres. 1 + 1 = 0.
Faut-il s’en prendre à l’arithmétique ?
Absurde. Ferme ton clapet. Avance. Marche dans la nuit de ta petite poésie ventriloque. Digère ton encre noire. Nu comme le premier homme. Le premier fils. Craché comme un noyau de cerise du cul des jardins de l’Éden.
Pupille de la nation, je veux. J’en appelle à la loi du 27 juillet 1917. Le roi a dit je veux et on lui a coupé la tête. M’en fous la tête. Je veux. Je veux que le ministre de l’Instruction Publique prenne en considération le préjudice dont je fais l’objet.
Non, dit le ministre. Tu n’entres pas dans les cases.
Mais j’entre dans les cases, moi ! Faites-moi une place dans les cases ! Cochez-moi ! J’ai froid. La Nation me doit un geste de salut public. De secours populaire. J’ai nourri de mes fèces la terre de mon pays. J’ai lu La Légende des siècles. J’ai payé mes impôts. J’ai voté. J’ai suivi des débats politiques à la télévision. J’ai fait des dictées avec zéro faute. J’ai bu tout le vin de mon pays.
J’ai été exemplaire.
Et les miens sont morts quand même.
Oui, mais pas à la guerre dit le ministre.
J’emmerde le ministre. Les miens sont morts à la guerre de la vie. Ni faite ni à faire. Ils ont été tués à l’ennemi. Et ils m’ont laissé bête. Ignorant. J’ai droit à un second tour d’école gratuite. À une bourse de lumières.
Tu croyais quoi au juste ? Que les pierres chantent ? Que l’âme des morts flotte le soir au-dessus des hortensias ?
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Dans Autoportrait au radiateur, il y a ces mots de Christian Bobin, écrits le 8 mars 1997 : « Le désenchantement est plus à craindre que le désespoir. Le désenchantement est un rétrécissement de l’esprit, une maladie des artères de l’intelligence qui peu à peu s’obstruent, ne laissent plus passer la lumière. »
Et il ajoute : « Ce que j’ai et ce qui me manque : tout me donne de la force et me réjouit également. »
Je voudrais pouvoir porter sur le moindre parterre de fleurs, le monde, les visages, la tombe des miens, le regard que cet écrivain semble ici poser sur toute chose. Sa phrase me soulève, me rend plus léger et plus fort.
Mais une fois passé le point, je retombe comme une chose lourde. L’apesanteur n’est pas mon lot et le lecteur enthousiaste est un mauvais élève : la mort me révolte, le manque me désenchante, l’absence de ceux que j’aime me diminue. La lumière ne passe pas.
Je suis l’obstrué.
Racler le sol et n’y rien surprendre.
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Il n’était pas une fois pour les morts.
On doit sans doute considérer que les histoires qui commencent par Il était une fois n’ont guère de vertus pour ce type de public un peu particulier.
On attend toujours tant des histoires.
Peut-être est-ce une vue de l’esprit qui espère trop.
Ou une peur.
Imaginons que, nourris d’histoires, les morts se dressent soudain comme un seul homme. Nous reviennent en fanfare. Réveillés, désenchaînés et déchaînés. Affamés. (Les histoires nourrissantes donnent faim.) Saurions-nous encore les accueillir ? Quelle place pourrions-nous bien leur faire auprès de nous, alors que nous avons déjà oublié comment partager notre espace avec les vivants ? Ceux et celles d’à côté, de plus loin, qui sont pourtant exactement comme nous : des pas-encore-morts.
Tout est affaire de territoire.
Chacun chez soi et tout ira bien. Le silence là-bas, la douleur ici. Et entre les deux, le long fil, le long filet du deuil. Histoire d’être sûr que personne n’éclaboussera le sol. Car lorsqu’on s’y fracasse, le sol vibre. Et ça dérange tout le monde. Alors oui, le deuil. Qui n’est pas ce long travail nécessaire, mais la prophylaxie qu’on impose au survivant amoindri pour l’autoriser à revenir danser la gigue avec les immortels. Une douche sous laquelle on pousse le pouilleux pour le débarrasser de ses petites bêtes. Le tour de magie obligé. Le prix à payer pour qu’il puisse à nouveau s’ébrouer dans le cercle des chiens de la vie.
J’ai lu quelque part que dans certaines sociétés, autrefois, l’endeuillé était tenu à l’écart, au même titre que le criminel. La perte d’un être cher ? Une souillure. Celui qui la subit porte le sceau d’une étrange menace qui ne laisse personne indifférent. On lit à son front la fissure, le tremblement. Il exhibe un savoir contagieux.
On dit qu’il est absurde de refuser l’inévitable. Mais c’est le contraire qui est vrai. Ce qui peut être évité n’a pas besoin que nous le refusions. Il faut simplement s’efforcer de l’éviter, puisque c’est possible. Et réserver notre capacité de refus pour ce qui ne peut l’être.
Les morceaux immangeables que l’on devra avaler.
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