Citations sur Le clan des nocturnes, tome 1 : Jacob (45)
Il interrompit brusquement son baiser et, toujours emmêlés, ils restèrent là à se balancer au rythme de leur souffle court et saccadé. Avec nervosité, il chercha des yeux le visage d’Isabella, l’examina comme si elle incarnait une énigme insolvable. Elle ne pouvait que s’accrocher à lui, prise au piège contre son corps puissant.
— Vous m’avez déshabillée ?
À ce moment précis, il parvint à la conclusion qu’elle ne pouvait pas être humaine. Une simple mortelle ne pouvait pas nimber une banale question d’un si grand pouvoir. D’ailleurs, aucune femme saine d’esprit n’oserait la poser à demi-nue, à quelques pas d’un étranger à l’évidence sexuellement excité.
Ils étaient simplement victimes de la malédiction de leur race. Pendant les lunes sacrées de Samhain et de Beltane, les démons passaient leurs nuits à lutter pour garder le contrôle. Chaque minute de ces deux fêtes puissantes constituait une torture alors que leurs esprits et leurs corps brûlaient d’obéir à la furie lunaire. Lors de ces phases, le besoin de copuler supplantait tout le reste. C’était inscrit dans leurs gènes. Comme des bêtes en rut, ils souffraient d’une envie dévorante à laquelle ne résistaient ni le plus poli ni le plus civilisé.
Il était interdit aux démons de blesser un humain innocent de quelque façon que ce soit. C’était la règle d’or que Jacob se devait de faire respecter avant toutes les autres. Rien, pas même les désirs de Noah, ne pouvait excuser un manquement à cette loi. En particulier, toute tentative de coït avec un humain était taboue. Trop fragiles, ces derniers ne survivraient pas à une épreuve aussi explosive. Jacob repensa à Isabella, si délicate et menue comparée aux siens. Les relations charnelles entre démons étaient régies par une férocité élémentaire qui frisait souvent l’agressivité. En proie à une telle passion, Isabella craquerait comme une frêle brindille.
— Jolie viande, reprit l’immonde créature.
Oh, oh, ça sent le roussi, conclut-elle.
— Euh, tu sais… il paraît que le végétarisme a le vent en poupe de nos
jours, suggéra-t-elle d’une voix de plus en plus aiguë à mesure que la bête
s’avançait vers elle, la forçant à reculer.
Il croyait dur comme fer qu’un individu incapable de dominer ses émotions n’était pas en mesure de diriger les siens.
— Même si notre culture et nos traditions demeurent archaïques, ces livres prouvent à quel point nous nous sommes modernisés. J’ai l’impression de lire une langue étrangère.
— Une langue est vivante. En tant qu’érudit, tu dois sans doute
apprécier que même un langage aussi ancien que le nôtre évolue au fil du
temps.
Jacob fit volte-face et jeta un coup d’œil à la rue que le couple venait de remonter. Le manque d’instinct de conservation des humains n’avait de cesse de l’étonner. Malgré les progrès de leur civilisation et de leurs technologies, ils avaient perdu un élément crucial en renonçant à leurs intuitions animales. Cette femme ignorerait à jamais qu’elle avait échappé à la mort de peu. Aucun mortel ne souhaiterait croiser un démon en perdition sous la lune maudite.
C'est tellement typique des humains [...] d'émettre des jugements sur un peuple uniquement parce qu'il est différent. Vous êtes incapables de prendre le temps de nous comprendre, et considérez comme une menace quiconque est né un peu plus fort ou plus intelligent que vous. L'ignorance et la peur sont les signes millénaires des oppresseurs de ton espèce... (p244)
- Tu me pardonnerais si je te disais que je suis un peu rouillé en ce qui concerne les relations amoureuses ?
- Un peu ? On doit entendre tes articulations grincer jusque Mars!