Lorsque le créateur littéraire joue devant nous ses jeux ou nous raconte ce que nous inclinons à considérer comme ses rêves diurnes personnels, nous éprouvons un très grand plaisir dû sans doute à la convergence de plusieurs sources de jouissance. Comment parvient-il à ce résultat ? C'est là son secret propre, et c'est dans la technique qui permet de surmonter cette répulsion qui, certes, est en rapport avec les limites existant entre chaque moi et les autres moi, que consiste essentiellement l'ars poetica. Nous pouvons deviner deus des moyens qu'emploie cette technique : le créateur d'art atténue le caractère du rêve diurne égoïste au moyen de changements et de voiles et il nous séduit par un bénéfice de plaisir purement formel, c'est-à-dire par un bénéfice de plaisir esthétique qu'il nous offre dans la représentation de ses fantasmes. On appelle prime de séduction, ou plaisir préliminaire, un pareil bénéfice de plaisir qui nous est offert afin de permettre la libération d'une jouissance supérieure émanant de sources psychiques bien plus profondes. Je crois que tout plaisir esthétique produit en nous par le créateur présente ce caractère de plaisir préliminaire, mais que la véritable jouissance de l'œuvre littéraire provient de ce que notre âme se trouve par elle soulagée de certaines tensions.