Gueule du temps et Vers de l'espace s'affrontent dans un voyage sidéral et sidérant, avec les humains comme spectateurs.
Voilà un livre qui débute très mal : vous savez que si à la fin vous appréciez l'histoire, il vous sera impossible de le chroniquer et d'en donner l'envie comme le fait Franck Selsis dans la préface.
Ne reste qu'à espérer que le voyage se passe mal...
Ce que les premières pages confirment : l'histoire d'un gosse de riche qui s'acoquine avec un pauvre ado, tout en essayant de berner sa nounou de garde du corps. Et, triste coup du sort, le malheur s'abat sur eux via des pirates de l'espace. Bref, lu, relu et re-relu. Problème, tout ça tient en 20 pages et il en reste 360. Mais quel reste ! 380 pages bien tassés dévorées en trois jours.
Le space opera, c'est le fameux Sense of Wonder, le "merveilleux vertige" comme le dit Franck Selsis (Selsys - SysSol) dans sa préface, celui qui vous emporte dans l'histoire pour vous laisser pantelant lors de la dernière page tournée. Toute la quincaillerie du space opera est présente : IA, Vaisseaux spatiaux, Lutte de pouvoir, Espace intergalactique, Concepts physiques et forcément, un soupçon de pirates de l'espace. Nous sommes dans la hard SF, compréhensible, mais l'auteur ne s'y attarde pas trop, préférant nous perdre dans les méandres tortueuses de ces gueules de vers. Ici, il n'est pas question de singularité technologique, mais bien de singularité physique. Qui sont ces vers aux propriétés inconcevables ? Face à ce mystère, Dick Hanson va devoir se démultiplier pour tenter de comprendre l'énigme de sa vie. Ajouter à cela une trame temporelle facétieuse, et vous avez une intrigue qui ne cesse de prendre de l'épaisseur, des personnages dont la psychologie s'affine au fil des pages, une dualité au gré du périple. Mention spéciale au personnage de Colorado, à l'intelligence hors du commun. L'auteur joue avec le lecteur, entre les sauts en arrière, dans le futur et cela fonctionne à merveille. Bref, cela débute par une histoire linéaire pour s'étoffer peu à peu et devenir très complexe. Si vous aimez le space opera et désespérez du peu de talent francophone dans ce genre, jetez vous dans la gueule de ce roman.
Moi pour qui les voyages dans l'espace laisse souvent froid, j'ai attrapé quelques suées lors de ce voyage, grâce surtout à cette trame temporelle fourbe et la duplicité des personnages. Je ne dévoile pas plus les tenants de l'histoire, préférant vous laisser la surprise de la découverte.
Dans le dernier tiers, quelques petits défauts : certaines hypothèses sur les gueules de vers sont discutées entre les protagonistes, dont l'une plus probable, mais cette dernière sera tut au lecteur. Donc nous voguons dans l'expectative et ce mystère agace plus qu'il ne happe. Certaines choses restent assez peu développées, comme l'histoire des androïdes ou la géopolitique. Cela donne de l'épaisseur à l'univers mais frustre par son côté léger. D'autres tomes à venir qui viendront peut être ou pas combler les trous. de petits bémols qui ne remettent pas en question la qualité de l'ensemble.
380 pages bien denses, compléter par une petite préface qui donne envie de plonger dans ce roman sans en déflorer l'intrigue, un lexique et une petite chronologie, voilà le genre de petit plus que j'aime découvrir, surtout en grand format.
Dernier avertissement, à lire ce livre, vous risquez d'être happé par une de ces gueules et en ressortir ahuri quelques heures plus tard.
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Un space opera où les gueules de vers sont comme des perles où, par les trous, le fil du temps et de l'espace forment un récit à couper le souffle. À lire absolument.
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