-Je t'avalerai, continuait-il sans quitter la fleur des yeux, et la pauvre rose vit avec effroi ses pattes gluantes se cramponner à sa tige. Le crapaud montait avec peine ; après chaque effort il regardait la fleur qui se balançait la-haut, et la fleur se sentait mourir.
-Mon dieu, soupirait-elle, si je pouvais au moins mourir d'une autre mort.
Elle lui mit la fleur dans la main, l’aidant à l’approcher de son visage ; il en aspirait le parfum et, souriant d’un air heureux : « Comme c’est bon ! » dit-il. Puis sa figure devint grave , immobile, et il se tut….pour toujours
La rose ne savait rien de tout cela, elle devait le lendemain s’épanouir en plein, et le surlendemain se faner et s’effeuiller. C’est là toute la vie d’une rose, mais, dans cette vie si courte, elle avait encore à passer par bien des épreuves, des angoisses et des tourments.
L’enfant était si faible, si doux, si tranquille, que les petits animaux du bon Dieu n’en avaient pas peur longtemps
Une larme tomba de ses yeux, sur la fleur : ce fut le moment le plus heureux dans la vie d’une rose
la rosée y avait laissé quelques larmes transparentes : la rose semblait pleurer. Autour d'elle tout était si clair, si doux, si lumineux en ce jour de printemps que, lorsqu'elle aperçut pour la première fois le ciel bleu, et qu'elle sentit la brise, et que les rayons éblouissants du soleil traversèrent ses fins pétales d'une lumière ambrée, la rose eût pleuré si elle l'avait pu, non de chagrin, mais du bonheur de vivre. Elle ne pouvait parler, mais elle répandait autour d'elle un suave parfum : ce parfum, c'étaient ses paroles, ses larmes et sa prière.
Les orties avaient envahi tout un coin du jardin ; sans doute elles piquaient encore, mais de loin elles faisaient un beau fond de verdure sombre aux couleurs pâles et délicates d’une rose épanouie