"Amour (subst. masc.) : Folie temporaire qui peut se guérir par le mariage." Ambrose Bierce
Déjà, dis-moi si tu as compris ce que tu éprouves en pensant à lui loin de toi.
L’unique façon de se donner la possibilité d’aimer, c’est de se sentir libre d’aimer qui l’on veut ; en sachant qu’en le voulant, il n’y a pas d’erreur possible, pas de péché, simplement l’essence du désir.
Il y a des moments, dans la vie de tout le monde, où les choses que nous avions devant les yeux mais que nous ne remarquions que distraitement, en passant, se révèlent soudain à nous. Ce sont des moments où nous nous retrouvons sans défense, face à quelque chose que nous ne pourrons plus voir comme nous le faisions avant.
Il s'était laissé regarder par elle, tandis qu'elle se laissait regarder par lui, et il s'étaient dit la stupeur d'avoir montré, par confiance et tendresse, leur peur, entière et nue sous les yeux de l'autre.
Quoi qu'il en soit, on tombe amoureux aussi de ce qui reste caché au premier regard ; même des cicatrices.
Aimer n'est pas posséder, mais voir grandir la joie d'être au monde avec quelqu'un d'autre, qui reste un Tu.
Vous y avez déjà prêté attention ? Cela arrive, lorsque deux personnes sont très attirées l'une par l'autre. De l'extérieur, on pourrait même trouver ça grotesque, tant il est facile de s'en rendre compte et tant, à les observer comme ça, du dehors, leurs symptômes semblent comiques. La bouche discrètement en cul de poule, la très légère torsion du cou qui incline à peine la tête en direction de l'interlocuteur ; les discours, généralement insignifiants, ou en tout cas menés avec une indolence distraite, ponctués d'une riche modulation de pauses et de sourires. Le battement des paupières augmente d'intensité : les cils, comme des papillons inquiets, se baissent, se relèvent, masquant et révélant les yeux au regard un peu flou, liquide, puis soudainement fixe, pénétrant, carrément insolent. Mais de telles conversations, qui de l'extérieur peuvent frôler le grotesque, ne sont en réalité presque jamais ridicules. Parce qu'elles renferment dans leur dramaturgie un secret et qu'il arrive même qu'une tierce personne dans l'assistance - à condition que cette personne ait déjà vécu pareille conversation de l'intérieur, et qu'elle ne se sente pas trop douloureusement exclue de celle en cours - connaisse parfaitement ce secret. Le fait est que ces entretiens, si éphémères soient-ils, donnent peut-être lieu aux moments les plus enchanteurs qui soient.
Aux réunions de famille, noces de cousins éloignés comme déjeuners de Noël, il y avait toujours une vieille tante pour lui donner une petite tape sur la joue en agitant devant elle de sombres avenirs de "vieille fille". "La vie est dure", psalmodiaient les vieilles moustaches en lançant à la ronde des séraphiques regards qui disaient combien elles avaient dû avaler de couleuvres, "comment peux-tu envisager de l'affronter seule ?". Et elles se précipitaient plus loin pour rattraper leurs maris, la cravate déjà relâchée, qui forçaient sur la bouteille ; elles les grondaient tant et si bien qu'ils finissaient par s'endormir sur le canapé, attristés par l'ennui, à côté de leur autoritaires compagnes. Mina observait ces scènes et se disait : et au pire, si je restais "vieille fille" ? Je n'aurais pas de mari pour ronfler à côté de moi sur le canapé pendant que je brutalise une petite nièce pour le seul plaisir de lui imposer une perspective de mariage aussi soporifique que le mien.
Ce risque - avoir le cœur brisé -, nous le courons tous les jours, dans la vie ; et il n'y a pas d'autre remède que la vie elle-même, le temps miséricordieux qui apprivoise le tourment, la force présente en chacun de nous pour nous relever et voir nos blessures se transformer en cicatrices.