La vie de couple c'est comme un convoi avec des wagons et une locomotive qui tire le tout. Parfois vous avez envie de sauter du train en route, parfois de prendre une correspondance, parfois de descendre à la prochaine gare, parfois vous vous dites qu'il y a eu une erreur d'aiguillage, et que vous vous enfermeriez bien dans le compartiment avec cet autre passager dont vous avez croisé le regard et vous vous consolez en contemplant le paysage défiler à la fenêtre.
Il en va des grandes catastrophes comme des petits désastres. Elles explosent, elles surprennent et fascinent. Puis la stupeur consommée, l'émotion dégustée, le drame digéré, elles se posent et se fondent dans le paysage. On dit souvent que plus rien ne sera jamais comme avant mais c'est faux, la minute de silence respectée la vie continue exactement comme avant.
La blonde on l'accepte comme une gentille crétine de service, bonne pour se distraire de sa légitime si vous êtes un homme, et à essuyer les vacheries des collègues si vous êtes une femme.
Vous connaissez la loi de la proximité maximale en journalisme qui veut qu'un chien écrasé au coin de votre rue vous intéresse plus que mille morts à l'autre bout de la planète ? Et bien en matière de plantes médicinales et de pharmacopée, c'est le contraire, plus ça vient de loin plus c'est intéressant.
Claude soupire. Il jette un coup d’œil à sa gauche. C'est un colosse à la caisse un peu creusée par l'âge, des cheveux neigeux où rêvent des souvenirs de mèches blondes, des sourcils jaunes qu'on croirait teints, un regard virant au gris. Il voyage en tenue de vacances, mal habillé d'un pantacourt et d'un tee-shirt fané. Sur la voie de gauche, une énorme Porsche Cayenne noire presque aussi volumineuse que son camping-car blanc est elle aussi vautrée dans l'embouteillage. Claude sourit narquois, c'est la lutte des classes sur l'autoroute du soleil.