Les yeux jaunes, tome 3 : La faim

L’enfant dans mon ventre ne cesse de me donner des coups de pieds. Ce sera une fille, et elle ne sera pas contaminée. C’est Alice qui me l’a dit. Je sais que les fantômes n’existent pas, mais les zombies ne le sont pas supposés non plus. Probablement que je suis tout simplement en train de devenir folle, mais je m’en fous ; j’ai besoin d’une amie, et tant pis si c’est un foutu fantôme. Elle m’a aussi dit que ma fille sera la clé. Je ne suis pas tout à fait certaine de ce qu’elle a voulu dire par là. Ça me laisse quand même quelques mois pour trouver la serrure.

Les femmes demeureraient toujours un mystère pour moi.

Un fils demeure un fils, peu importe sa foutue orientation sexuelle.

Ce n'était pas une perdrix idiote cette fois ni un lièvre paniqué ou encore un sanglier échappé d'un village gaulois de bande dessinée. Non, vous connaissez ma chance. Dieu m'envoyait carrément un petit cousin d'Obélix fou furieux : un colosse en tenue de boucher avoisinant le quart de tonne, avec des mains grosses comme des poêles de fonte en maniant une gigantesque planche à découper garnie de clous. Son visage reflétait celui d'un tueur en série, et il ne semblait pas avoir besoin de potion magique pour m'arracher la tête. Comme je n'avais pas envie qu'il me confonde avec l'ancêtre d'un centurion romain, j'ai fermé ma gueule en tentant de me relever de ma fâcheuse position.

La liberté, la vraie, n’existait plus. J’étais captive de cette île qui me maintenait loin de l’enfer, mais qui me condamnait aussi à y mourir toute seule.

En ce moment, c’est vrai que ce n’est pas facile de trouver le chemin du bonheur dans ce foutu merdier. Ça ne veut pas dire pour autant que c’est impossible. Qui sait ce qui nous attend ? N’essaie jamais plus de te faire passer pour quelqu’un que tu n’es pas, mon garçon. Tu es unique, Mathieu. Imparfait, comme nous tous, mais unique.

Leur histoire est tout aussi importante que la mienne, la vôtre ou n'importe quel autre survivant, et elle ne commence pas non plus par un "Il était une fois". Le ciel avait beau se parer de vert, aucune magie de contes pour enfants ne s'y cachait. Pas de fées, de lutins ou de magiciens. Que des humains confrontés à une réalité plus atroce que bien des cauchemars. Tout le monde ou presque a peur de la mort, non ? Que faire alors lorsque la vie devient encore plus terrifiante ?

Je m’habitue de plus en plus à ma plume, mais de moins en moins aux mots qu’elle laisse sur les pages blanches… Les abominations qui renaîtront sous l’encre noircissant le papier risquent également de salir votre âme. Elles portent la marque du mal, peu importe la forme que vous lui donnez : extraterrestre, biologique ou démoniaque. Ce qu’il vous faut retenir, c’est qu’il n’y avait aucun antidote ni remède miracle ou incantation religieuse contre ce mal étrange.

La colère était une motivation comme une autre pour aller de l’avant, même si ce n’était pas ce que le petit catéchisme m’avait enseigné.

J’étais dans une espèce de pays d’Oz où les méchants petits singes volants avaient été remplacés par une guérilla d’hommes-gorilles planeurs, ou encore dans une variation grotesque de La planète des singes, dirigée par un George Romero sous acide. Totalement absurde et fou braque !