J'avais la rage au ventre, et la rage faisait des petits.
Et le Grand Mahlke, avec ses bras en anses de cruche, suivit le professeur Klohse dans le cabinet directorial et, en franchissant la porte, ôta son calot de ses cheveux raides : son occiput était bosselé. Un lycéen en uniforme était sur la voie d'une grave discussion dont je n'attendis pas l'issue, bien que mon attente fût extrême : j'aurais bien voulu savoir ce que la souris déjà bien réveillée et avide d'entreprises dirait après la discussion à ce chat qui, bien qu'il fût empaillé, rampait toujours.
"Mesure voir !" lança Jürgen Kupla. Tulla dut écarquiller la main gauche une grande fois et une petite. Quelqu'un, puis un autre, murmura : "Au moins trente centimètres." Naturellement, ce chiffre était exagéré. Schilling, qui parmi nous avait la plus longue carabine dut s’exhiber, se mettre en batterie et s'aligner : Mahlke était primo plus gros d'une pointure, secundo plus long d'une boîte d'allumettes et tertio son aspect était beaucoup plus adulte, plus dangereux, plus adorable.
Il avait une fois de plus montré ses capacités, et il nous les montra une fois encore aussitôt après en tirant deux fois de suite, comme nous disions, les vers du nez.
On croirait que la cité répand une odeur fraiche, propre, de sable, conformément à la saison - mais dans l'Allée de l'Est, dans l'Allée de l'Ouest, dans le Chemin des Ours, non, partout à Langfuht, Prusse-Occidentale; mieux encore, toute l'Allemagne en ces années de guerre sentait l'oignon, l'oignon cuit à petit feu dans la margarine, je ne veux pas m'arrêter: l'oignon bouilli avec, l'oignon frais coupé, voilà ce que ça sentait, bien que les oignons fussent rares et presque introuvables, bien qu'on fit des bons mots sur les oignons rares en connexion avec le maréchal du Reich Gering qui avait dit quelque chose à la radio sur la rareté des oignons, des bons mots que l'on colportait à Langfuhr, Prusse-Occidentale, dans toute l'Allemagne; c'est pourquoi je devrais frotter superficiellement de jus d'oignon ma machine à écrire et lui donner ainsi qu'à moi une idée de cette odeur d'oignons qui, en ces années-là, empestait toute l'Allemagne, la Prusse occidentale, Langfuhr, l'Allée de l'Est comme l'Allée de l'Ouest, et masquait l'odeur prédominante de cadavre.