Ils se sont mis à vieilllir très vite, comme si on leur avait inséminé une bactérie mangeuse de chair. (p.97)
Certaines personnes n’ont pas de famille ni d’amis proches. S’ils disparaissent dans la nature – ou à Kelowna, à l’autre bout du pays –, il peut se passer beaucoup de temps avant qu’on fasse appel à la police.
Quand j’étais jeune, j’aurais préféré mourir que de me mettre à genoux pour briser des mottes de terre. Maintenant, je pense que mes plantes m’ont sauvé la vie, d’une certaine manière.
Ce sont des hommes qui se tuent le plus souvent au volant de leur automobile, des hommes qui sont victimes de règlements de comptes ou d’opérations policières, des hommes encore qui se suicident de façon violente et ne se manquent pas.
Ce ne sont pas les bandits qui sont les pires ennemis des policiers, avait un jour dit un de ses professeurs de techniques policières, ce sont les j’aurais dû : j’aurais dû tirer plus vite, j’aurais dû attendre, j’aurais dû faire ceci ou cela, j’aurais dû suggérer à la mère d’Hitler de se faire avorter, j’aurais dû empêcher les avions de décoller et de foncer dans les tours, j’aurais dû offrir cinquante deniers à Judas pour qu’il ne trahisse pas le Christ, j’aurais dû convaincre Yoko de rester au Japon…
Aucun mot, aucune expression n’arrive à combler le gouffre qui s’ouvre devant les yeux de votre interlocuteur quand il vous aperçoit dans l’encadrement de la porte. L’uniforme. Le regard. L’attitude. Il a déjà compris.
La plupart du temps, c’est lui qui posera la question fatidique, et vous n’aurez qu’à hocher la tête. S’il n’y arrive pas, vous devrez lentement tourner le fer dans la plaie. J’ai le regret de vous annoncer que votre mari est décédé…
Il y a peu de corvées plus pénibles pour un policier que d’annoncer à la famille la mort d’un proche. On ne sait jamais quels mots choisir, ni comment les dire, ni même, parfois, à qui les adresser. La seule chose certaine, c’est qu’on ne les oubliera jamais.
Lysiane Laganière regarde Chloé en fronçant des sourcils,
comme si elle voulait s’assurer qu’il n’y avait ni mensonge, ni malentendu,
puis ses yeux semblent tracer un signe de croix :
elle regarde le ciel, puis le sol, et ensuite vers la gauche et vers la droite,
comme si elle ne savait pas où stocker cette information dans son cerveau.