Nos corps sont impatients. Nos cœurs rebelles. Notre amour invincible. Lui et moi, rien ne nous arrêtera.
Je suis à nouveau Thelma la guerrière, Thelma Bellamy-McNeil, que rien ne peut arrêter. Plus j’avance et plus je le sais, plus je le sens : Finn est vivant. Impossible autrement.
– Jusqu’à ce que la mort vous sépare, d’accord, mais pas maintenant ! répété-je pour moi-même, comme une folle.
Folle amoureuse, folle de rage, folle à lier. Prête à tout pour le retrouver. Pas de destin brisé, pas de vie en noir, pas cette fois, pas lui, pas moi.
– Ne pars plus jamais, soufflé-je.
Son torse musclé se soulève lorsqu’il rit doucement.
– En fait, si. Repars ! À chaque fois que je crois mourir sans toi, je réalise à quel point je t’aime…
– Ma guerrière…
– Alors repars, mais reviens toujours.
– Si un jour je ne reviens pas, c’est parce qu’on m’en empêche. Ou que je ne respire plus. Parce que si je suis sûr d’une chose, d’une seule, c’est que je t’aimerai jusqu’à mon dernier souffle ! grogne-t-il avant de m’embrasser follement.
Dans un coin de cette vaste pièce que j’adore déjà : mon précieux. Ce bureau en bois massif que j’avais dégoté chez un brocanteur du Bronx et qu’Abe m’avait aidé à monter jusque dans ma chambre d’étudiante. Il prenait une place folle dans mon territoire de 7 m2 . Mais il était à moi. Il me faisait me sentir à ma place dans cette coloc un peu bancale. Il me rappelait pourquoi j’avais quitté le Queens, abandonné mes frères et pris un nouveau départ à Columbia. Le revoir ici fait remonter tous les souvenirs de cette année surréaliste : les devoirs d’économie commencés à la dernière minute ; les missions impossibles remplies grâce à mes Trois Fantastiques ; les lettres adressées au proviseur pour excuser le comportement de Neo ; les comptes de ma mère à refaire et les chèques à signer à sa place ; les essais éprouvants à rendre fébrilement à Mr McNeil ; les nuits blanches à écrire des nouvelles sans pouvoir m’arrêter ; les pizzas et les M&M’s grignotés sur un coin de table, là où il restait encore un peu de place ; les plongeons dans le sommeil et les réveils en sursaut, le visage écrasé contre un livre. Ce bureau sait tout de moi.
À mon arrivée au loft, deux énormes valises m’attendaient dans l’entrée. J’ai d’abord cru que Finn me foutait dehors (réflexe d’une gamine au passé semé d’abandons en tout genre, j’imagine). J’ai ensuite cru qu’il se barrait à l’autre bout du monde sans moi (le réflexe frappe toujours deux fois). Et j’ai finalement découvert que mon rebelle avait une tout autre idée en tête. Comme m’emmener en Europe pendant trois semaines.