"mais le principe de légitime défense ne suffisait pas encore à la délester du poids de cette vie ôtée au monde."
"Tu penses sûrement que la confiance est un mot curieux pour parler d'une bande de criminels, mais un serment de pirate est ce qu'il existe de plus sacré et respectable pour ceux qui s'y soumettent,"
"Ne perds pas ton temps à te demander quelle est la signification de tout ça, parfois il faut accepter de fermer les yeux pour y voir plus clair."
C'était la ligne de conduite propre aux pirates : une maîtrise de soi remarquable dans les situations ardues, proportionnelle à une totale absence de retenue le reste du temps. (p.101)
Lorsqu'on laisse une vie derrière soi, on en fait le deuil. Et ce n'est pas toujours bon d'y revenir.
Enfant, Prudence goûtait à tout, touchait à tout et allait partout... surtout là où c'était défendu. Les soeurs du couvent disaient qu'elle était nommée de la seule vertu dont elle était complétement dépourvue.
Gareth avait écouté avec une certaine gravité cette enfant lui faire le récit d'une vie faite de deuils et de peur quotidienne. C'était justement ce genre de vies qui menait à devenir un pirate ; des existences marquées par le chagrin, de mauvaises décisions ou simplement la malchance. Comme eux, la petite avait du se débrouiller très tôt, à sa manière et avec ses propres ressources. Gareth se fit la réflexion qu'elle avait plus en commun avec eux qu'elle ne le soupçonnait.
- Votre cabine est-elle à votre convenance, très chère ?
- Il y a un cadavre dans le placard, dit Prudence en se demandant pourquoi diable était-ce la première réponse qui lui passait par la tête.
Mais les pirates ne semblèrent pas le moins du monde étonnés.
- Ah oui ? Et bien cela explique où était passé notre médecin de bord depuis tout ce temps, répondit Petrus. Ce tonneau de rhum ambulant a dû boire jusqu'à se noyer dans sa propre bouteille.
- On ne pouvait lui souhaiter plus belle mort, commenta Ezekiel. Certains parmi nous lui doivent les pires amputations et les balafres les plus laides de l'histoire de la piraterie. On pouvait rentrer chez lui pour un ongle incarné et en ressortir avec une prothèse jusqu'à l'épaule, continua-t-il.
- Quand on en ressortait vivant ! renchérit Petrus.
Il avait ôté sa chemise. Ses tatouages ondulaient sur les muscles de ses bras, montrant tout un bestiaire fantastique qui semblait galoper d'un biceps à l'autre.
D'une manière qu'elle ne s'expliquait pas, son rêve lui avait donné la solution de l'énigme... à moins que ce fût l'inverse ? C'était là toute l'ambivalence de son don, il fallait parfois que la réalité rejoigne le rêve pour que l'un et l'autre se révèlent.
Depuis qu'elle vivait parmi eux, elle prenait conscience que la vie d'un pirate du ciel n'était pas uniquement faite de meurtres, débauches et pillages. Elle entrevoyait aussi ce qu'elle pouvait exiger de sacrifices et d'abnégation. Bien sûr elle ne cautionnait pas leurs actes de barbarie mais elle avait vu avec quelle facilité l'on pouvait se retrouver de l'autre côté de la frontière de moralité ; ou du moins l'idée qu'on s'en faisait.
« C’était la ligne de conduite propre aux pirates : une maîtrise de soi remarquable dans les situations ardues, proportionnelle à une totale absence de retenue le reste du temps. »