La révolution égyptienne a eu lieu il y a dix ans. Tout a changé et pourtant rien n'a changé. Kaouthar, cairote, 20 ans à l'époque, s'est affranchie de ses parents, a rencontré celui qui deviendra son mari, a goûté au parfum de l'indépendance et de la liberté. Aujourd'hui, coincée avec un mari qui a depuis perdu ses idéaux, elle a perdu ses espoirs et la colère a fait place à la résignation. Jusqu'à ce que son fils brise le miroir aux alouettes.
A Paris, Mariam ne garde de l'Egypte que des souvenirs ensoleillés et poussiéreux de vacances chez sa grand-mère. Pourtant, il y a dix ans, devant son téléviseur, ses racines égyptiennes se sont fait entendre. Depuis, elle a remis le couvercle sur ses fantasmes de révolution jusqu'à ce que son mari déterre des carnets intimes qu'elle avait écrits avec la fougue de l'adolescence.
Marion Guénard plonge son lecteur dans le maëlstrom de la révolution du 25 janvier et de ses conséquences, pour ceux qui restent et ceux qui n'étaient pas là. Parce qu'aujourd'hui, la révolution couve toujours dans les ruelles cairotes, à l'ombre de la place Tahrir, point névralgique de l'action.
Partir du point de vue de deux femmes, l'une qui était sur place et l'autre, européanisée, qui n'y était pas, est un parti pris très intéressant. En effet, le procédé permet de mieux rendre la complexité de la situation pour les personnes directement ou émotionnellement engagées dans les événements.
Le premier roman de l'autrice propose donc un contenu très intéressant, surtout pour la néophyte que je suis par rapport à cette tranche de l'histoire. J'ai par contre regretté un manque d'émotion à travers tout l'ouvrage. Je suppose que c'est la plume de la journaliste qui a inconsciemment pris le pas sur la plume de la romancière. Ce qui nous donne un roman paradoxalement assez froid alors qu'on y parle révolution, émeutes, prise de pouvoir, oppression des masses,... Pourtant lors des premières pages, pour la visite en prison, c'était bien parti de ce côté-là mais très vite l'intrigue se focalise sur les faits et même quand on tente une immersion dans la psyché de Kaouthar et Mariam, cela se déroule de manière tellement objective que l'émotion n'est pas au rendez-vous. Ce qui m'a empêchée de m'attacher aux personnages et m'a laissée simple spectatrice.
Ceci n'enlève rien à la qualité de ce premier roman, proposé par un éditeur engagé dont je vais de ce pas explorer le catalogue.