Les
ballets russes ! J'aime la danse (même si personnellement, je danse comme un pied). J'aime l'élégance des lignes dans le classique, la puissance terrienne dans le moderne. J'ai donc été ravie d'avoir l'opportunité de lire "Moi,
Tamara Karsavina" et je remercie NetGalley et les éditions du Rocher de me l'avoir permis.
Nous rencontrons la danseuse en 1969 : c'est l'automne de sa vie qu'elle passe, avec sa femme de chambre, Emilienne à Beaconfiels, dans un foyer pour personnes âgées à proximité de Londres.. Elle ne danse plus depuis longtemps et elle a déjà donné une première version de ses souvenirs d'artiste et de femme. Malgré son âge, elle reste une vivante figure de la danse et elle continue à être une référence dans son art.
1911: les
Ballets russes menés par Diaghilev (alias Chinchilla en référence à sa mèche blanche) explose à Paris. le tout Paris mondain s'arrache les danseurs, créateurs qui composent cette troupe toujours en quête de financement. Nous croisons l'aristocratie du faubourg : les Greffulhe (dont la comtesse inspira
Marcel Proust), créature divine et malheureuse en ménage, les Gramont mais aussi le monde la finance, de la politique.
Les
Ballets Russes furent et restent une étonnante compagnie, riche d'idées, d'inventivité, capable de créer un ballet sur 3 fois rien, intégrant les plus grands artistes de son temps dont Picasso, et aussi Baskt et Benois, les musiciens des plus classiques aux plus audacieux.
La danseuse revient sur ses amours, (son premier mari, Vassili Moukhine et Henry Bruce, son époux, leur fils Nicolas, son frère, Lev, philosophe et victime des répressions sous le régime communiste), ses succès, ses échecs aussi, les relations complexes qui existent entre le Directeur de la compagnie et "ses" danseurs, danseuses. On note la fascinante capacité de Diaghilev a amené à lui, à repérer le talent qui apportera la touche indiscutable à ce mythe que sont les
Ballets Russes. On observe
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Nijinski, le danseur qui devenait royal quand il dansait, sous la tutelle de Diaghilev, et qui sombra dans la folie en 1918 (son journal est bouleversant),
- Bronislava, soeur de
Nijinski, créatrice de ballets,
- Ida Rubinstein, ni danseuse, ni actrice, qui provoquera un engouement sans précédent en apparaissant sur scène sans rien faire,
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Anna Pavlova, la petite et délicate danseuse qui devient le symbole de la mort du cygne ..
Karsavina, elle est liée à un ballet que j'aime beaucoup : "l'oiseau de feu" sur la puissante musique de Stravinski, vêtue de costumes à tomber créés par Léon Baskt.
Par le biais de ses souvenirs traversés par les grands courants artistiques de différentes époques, Karsavina nous explique le mécanisme de création des ballets, leur impact sur la mode et la vie française.
C'est un livre très bien documenté, élégant, vivant, qui arrive à ressusciter la troupe des
ballets russes, les différents milieux dans lesquels elle baignait, l'histoire de ceux qui la composait parfois fort tristes sur fond de maladie mentale, les histoires aussi des membres de la famille de Karsavina, restée en Russie après la révolution d'octobre 1918 et qui va souffrir comme beaucoup d'intellectuels de persécutions du régime soviétique. J'ai juste regretté qu'il n'y ait pas plus de photos, dessins, images insérées dans le livre afin d'enrichir la lecture et de donner envie au lecteur d'aller plus loin dans sa connaissance d'une époque révolue.