La société ne comprend rien à l’amour ; elle en parle sans cesse, mais en réalité elle lui est contraire, et blâme ceux qui lui consacrent leur vie, réduisant leur comportement à du donjuanisme.
Chacun mène comme il le peut le mystère de sa propre existence ; notre blessure s'apaise ou s'infecte, selon la manière dont nous considérons notre âme. Mais il arrive un moment où chacun de nous parvient à se cacher non plus dans l'obscurité, mais dans la lumière, et il ne faut pas rater ce rendez-vous.
Il n'y a rien de plus beau qu'un roman qui s'écrit ; le temps qu'on y consacre ressemble à celui de l'amour : aussi intense, aussi radieux, aussi blessant. On ne cesse d'avancer, de reculer, et c'est tout un château de nuances qui se construit avec notre désir : on s'exalte, on se décourage, mais à aucun moment on ne lâche sa vision. Parfois un mur se dresse, on tâtonne le long des pierres, et lorsqu'on trouve une brèche, on s'y rue avec un sentiment de liberté inouïe. Les lueurs, alors, s'agrandissent, et c'est toute une mosaïque de petites lumières qui s'assemble peu à peu, jusqu'à former non seulement un soleil, mais aussi une lune : un univers complet, avec ses nuits et ses jours.
Il expliqua que la planète entière était fondée sur l'économie, c'est à dire sur l'épargne ; que chacun ne fait que ça, économiser- ses forces et son argent- ; qu'on ne cesse d'accumuler, et que l'accumulation est une manière de s'éteindre car la vraie vie réside dans la dépense.
Il raconta que dans certaines sociétés primitives on brûlait les richesses : l'excédent doit se consumer dans la fête, dans les actes sexuels- dans ce qui s'accomplit sans compter.
Sous le ciel couvert du Nord-Pas-de-Calais, d'un gris presque anthracite, la grande plaine de l'Artois découvrait un paysage scandé de montages noires qui ressemblaient à des fourmilières géantes. C'étaient les célèbres terrils, constitués de déchets miniers qui lui rappelaient les anciennes houillères qu'il avait vues dans sa jeunesse en Lorraine.
Lui qui passait ses journées à établir des lignes de comptes, à évaluer des ratios, à contrôler des taux d’intérêt ... chaque jour, lorsque à 17 heures pile il sortait de la banque, il ne pensait plus qu’à ça : aller embrasser Lilya, mêler follement sa langue à la sienne, se fondre dans cette humidité de lune qu’avaient ses baisers, et à travers le plaisir que lui procurait cette étreinte, oublier tout, les chiffres, la banque et la fatigue de ses nuits blanches.