Citations sur Ainsi battent les coeurs amoureux (32)
Rien ne me satisfaisait. Il manquait quelque chose. Le petit truc qui faisait la différence. Une vraie envie, un vrai feeling. Je n’avais aucune idée de comment l’appeler. Mais sans ça, ce n’était que du bruit, des sons décortiqués qui ne trouvaient aucune harmonie, ensemble. Du moins, à mon oreille.
Ce que j’avais, ça me suffisait. J’étais heureux. Du moins, j’essayais. Mais il y avait quelque chose, au fond de moi, quelque chose d’obscur et de douloureux, qui m’empêchait de l’être vraiment. Je faisais semblant, la plupart du temps. Je me forçais à sourire pour ne pas avoir à expliquer pourquoi c’était si dur. Pourquoi, souvent, je m’asseyais devant une église… Tout aurait dû être parfait.
Je n’étais le mec de personne. Je voulais bien partager une nuit, voire deux, boire quelques verres après mon mix du week-end, manger un morceau avant de rentrer et de s’envoyer en l’air. Rien de plus. Et il le savait. S’il attendait quelqu’un qui se souviendrait de sa date d’anniversaire, du prénom de son chat ou de son traiteur préféré, il n’avait pas frappé à la bonne porte. Je vivais la nuit. Je dormais le jour. Je bossais mon son.
L’avantage d’avoir été enlevé par ma mère alors que je n’avais que quelques jours, pour être retrouvé dans une communauté sectaire, perdue en Argentine, dix longues années plus tard. Une éternité pour un père qui n’avait jamais cessé de me chercher. Une autre vie, pour moi. Une vie que j’avais oubliée.
Tant que nous étions tous ensemble, debout, connectés ; tant que les lumières éclairaient l’obscurité ; tant que le beat brisait les silences nocturnes, je n’avais plus peur de rien.
FAITES DU BRUIT !
La fatigue ne comptait pas. L’ardeur de la musique me faisait tenir. Elle courait dans mes veines, notes furieuses qui cognaient jusqu’à mes tempes. Et je n’avais besoin que de ça pour exister. De cette frénésie que je suivais, en sautant, faisant jouer cette cadence de plus en plus rapidement. Elle devenait un pouls qui s’emportait, un crissement sonore qui semblait sortir tout droit d’un autre monde.
Je suis photographe, c’est délicat de raconter leur amour en images, à moins que je ne sois trop pudique parce que ce sont mes parents. Dans tous les cas, c’est difficile de n’avoir rien à me mettre sous l’objectif, et difficile de garder l’énergie de créer dans leur béatitude lénifiante.
Être DJ c’était improviser constamment, se réinventer d’un soir à l’autre. J’étais toujours en train d’essayer de nouveaux tracks, pour voir comment ils bougeaient dessus.
Les gens pensent que le temps guérit l’amour. Mais ils ont tort. Lorsqu’il est là, ancré profondément, il devient une part de tout, une part de vous. Il est dans tout ce que vous voyez et dans tout ce que vous espérez. Il est la lumière au creux de vos rêves et une ombre vos nuits de doutes.
Rien ne peut plus l’effacer.
Il ne guérit jamais.
Aujourd’hui, chaque petit bonheur que je ressens, cette vie que je me suis construite, je les lui dois. Je lui dois tout. De mes notes de musique au premier album que j’ai signé avec Kolwaski Records. Le dernier single tourne sur les stations de radios et je m’étonne toujours d’entendre ce morceau de soul, ce saxophone pour unique voix.