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Citations sur La forêt de tournesols (3)

Assise dans un compartiment de seconde classe crasseux, avec un gros bébé sur les genoux, elle parlait de l'Amérique comme du pays des merveilles. Comme maman parlait de pays où elle n'était jamais allé, et qu'elle parait de tous les charmes. J'ai tenté de la dissuader. Je lui ai dit que la Floride était très dangereuse, qu'il s'y commettait, comme partout aux États-Unis, bien plus de crimes qu'aux pays de Galles. Que les gens se faisaient voler et assassiner, qu'ils ne pouvaient pas aller à l'hôpital quand ils étaient malades, que personne ne s'occupait de personne à moins d'y trouver son compte. L'argent, lui ai-je-dit. Là-bas, il n'y a que cela qui compte. Sans se laisser impressionner, la jeune fille a haussé les épaules. "Un jour, a-t-elle dit, je veux aller me faire bronzer en Floride".
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Mais je ne crois pas que ce soit une question d'amour. L'amour et la perfection n'ont rien à voir. On n'aime pas les gens pour les récompenser d'être bons ou parfaits. Ni pour compense leurs souffrances. On les aime, c'est tout.
- Mais pour quoi faire ? Le seul résultat, c'est qu'on souffre aussi. Si ça ne sert à rien, si ça ne compense rien, si ça ne rend pas les gens meilleurs, pourquoi se tuer à les aimer alors ?
- Parce que, quand tu réfléchis bien, tu t'aperçois que c'est la seule véritable liberté dont tu disposes.
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Ce qui l'avait blessée le plus profondément, c'était manifestement notre refus de l'aider à réclamer le retour de Klaus. Elle l'a répété cent fois. Pourquoi l'avions-nous abandonnée ? Elle avait raison. Elle savait de quoi elle parlait. Elle avait l'expérience de ce genre de choses, mieux que nous. Pourquoi ne lui faisions-nous pas confiance ? Comment nous étions-nous laissé rouler par les sales tours qu'ils jouaient ? Comment nous avaient-ils convaincus de les croire eux, et pas elle ? Elle savait qu'elle avait raison, et elle était horrifiée par la malice qu'ils avaient dû déployer pour que les gens en qui elle avait le plus confiance se détournent d'elle d'un seul coup. Ou alors, c'était que nous étions des êtres faibles, voilà tout.

"Je n'arrive pas à comprendre. Pourquoi est-ce que tu restes planté là, O'Malley ? Tu disais que tu m'aiderais à récupérer Klaus. Tu me l'avais promis. Promis, O'Malley ! Tu as juré ! Et maintenant, tu me trahis !"

Puis elle s'en est pris à moi. "Et toi, espèce de grosse vache ? Pourquoi tu restes tout le temps assise sur ton gros cul, comme une merde dans une cuvette ? Pourquoi tu n'écoutes pas ce que te dit ta mère ? Tu es douce. Tu es gâtée par une vie trop facile. Tu ne sais pas ce que c'est, quand des gens te battent tous les jours, que tu n'as rien à bouffer, sauf des trucs qu'on n'oserait même pas donner à des chiens, ici ! Tu n'imagines même pas que ça pourrait t'arriver. Tu es gâtée. Tu es une grosse vache !"

Je baissais la tête, le nez plongé dans le journal.

"Eh bien, réponds ! Ne reste pas assise là comme une gourde ! Tu crois que j'ai survécu à Ravensbrück pour avoir un enfant comme ça ? J'aurais mieux fait de crever là-bas ! ça oui. Je ne te comprends pas. J'ai essayé de faire de toi quelqu'un de bien. Pourquoi ne veux-tu pas m'aider ?

- Parce que cette fois-ci, tu n'as pas raison, maman."

Papa a froncé les sourcils. Il a posé un doigt sur ses lèvres, pour me faire taire. Enervée, triste, j'ai baissé la tête.

Maman s'est enfin mise à pleurer. Ce n'étaient pas des larmes de reddition. Elle était toujours furieuse. Mais, dans les trois langues, les mots lui manquaient. Elle a sangloté longtemps, debout au milieu de la cuisine. Elle s'essuyait vaguement le visage de ses avant-bras, les poings serrés.

"Vous me traitez comme une enfant. Vous tous. Même elle, le bébé." Elle montrait Megan du doigt. "Vous croyez que je m'en rends pas compte ? Vous croyez que c'est ça que je veux ? Vous croyez que ça me rend heureuse ?"

J'étais bouleversée. Maman avait très bien perçu la situation, bien mieux que je ne le croyais. Manifestement, elle avait vécu ces quelques semaines comme un véritable calvaire. A l'écouter, on ne pouvait qu'avoir le cœur brisé. Et comment ne pas l'écouter ?

"Pourquoi, mon Dieu ? Pourquoi me traitez-vous comme ça ? Comme si j'étais une irresponsable ? Une idiote ? Ein Dumm opf. Bin ich ja ruzdumm ? Hein, O'Malley ? Bin ich ?"

Stoïquement, mon père ne bougeait pas.
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