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Critique de Merik


« La maison de poupée » est son histoire, nous informe la quatrième de couv'. L'histoire de Florence Hirigoyen. Ni récit ni fiction, simplement l'histoire qu'elle s'est résolue à photographier en reconstituant les décors de sa vie, en donnant le rôle de ses proches à des poupées, en narrant sa vie par couches subtiles d'évènements parlants. du noir et blanc pour l'enfance et la couleur pour l'âge adulte, avec interférences possibles et chronologie éclatée. C'est l'histoire à laquelle elle a pu accéder longtemps après l'indicible horreur, longtemps après que la bulle de son amnésie traumatique soit crevée. L'histoire d'une vie torturée et d'une enfance ravagée, reconstituée méticuleusement par le biais d'une mise à distance.

Car c'est surtout l'histoire d'une horreur avec sa suite de conséquences désastreuses. Un inceste. le pire que l'on puisse imaginer, s'il y a possibilité de classement dans l'horreur. Il concerne son père, dans une famille au modèle patriarcal, avec une mère qui s'évertuera à nier les faits et protéger la mémoire de son mari. Une famille qui en sortira désunie. C'est aussi l'histoire d'un inceste qui touche à l'universel, tant les faits et ses conséquences paraissent limpides de vérité depuis son enfance éteinte, son adolescence en repli, son âge adulte tourmenté de cauchemars.

Mais c'est aussi l'histoire d'un espoir, la possibilité d'un aller-mieux. le livre s'ouvre sur une scène avec son psy, où Florence Hirigoyen lui soumet l'idée de mise en scène de sa vie, suite à la découverte dans une brocante d'une poupée Caco des années 50. La poupée lui a fait penser à son père, comme beaucoup de choses de sa vie l'y ramènent. C'est donc l'histoire de cette forme de thérapie par la création et la mise à distance du moi, que l'on retrouvera sous les formes du moi-enfant, du moi-ado et du moi-adulte, une fois même les trois en simultanés dans une scène de mise en abyme.

C'est sans aucun doute l'histoire d'un beau livre, à la fois témoignage essentiel et oeuvre originale. Virginia Woolf y a sa poupée, en tant que mentor créatif pour construire "Une chambre à soi". La chambre qu'élaborera Florence Hirigoyen est un refuge où l'on écrit avec la lumière plus qu'avec les mots, où les personnages à l'expression de cire laissent une place libre à l'émotion chez le lecteur. Une émotion omniprésente, jaillissant autant des postures figées que du contexte et des dialogues brefs, concis, mais aussi éloquents. « T'as pris perpète, poulette » fait ainsi dire sur elle-même Florence Hirigoyen à sa poupée. On espère qu'elle se trompe, et que ce livre poignant l'aidera au moins à alléger sa peine.
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