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Citations sur Le Pays de la nuit (30)

L’homme écrivait, afin d’apaiser son esprit en exprimant son chagrin ; et Naani avait pu lire les mots et les comprendre, bien que pour son esprit à présent éveillé ils eussent été écrits dans un langage inconnu. Elle ne pouvait cependant se souvenir que d’une courte ligne, et du nom écrit au-dessus : Mirdath ; et elle me dit qu’il était étrange qu’elle eût rêvé de ce nom, tout en supposant que mes premiers appels l’avaient gravé dans son subconscient.

Je lui demandai alors de me dire, en subissant mentalement l’équivalent d’un tremblement, ce dont elle se souvenait des écrits de cet inconnu athlétique et affligé. Et, peu après, sa voix lointaine prononça :

« Mon amour, tes pieds foulent les ténèbres… » Elle ne se souvenait de rien d’autre, mais c’était suffisant. Et, enivré par une sensation de triomphe étrange et folle, je lui récitai la suite en projetant ma pensée. Mon esprit sentit que ces mots l’atteignaient avec violence et ravivaient ses souvenirs. Elle vacilla un court instant, muette face à une telle nouveauté et une telle certitude. Puis son esprit s’éveilla, et la peur et l’étonnement la firent presque pleurer.

Et, immédiatement, la vibration emplit l’air autour de moi. Et cette voix était à la fois celle de Mirdath et celle de Naani ; et les pleurs de son esprit
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Les humains de l’époque actuelle risquent de trouver étrange que ceux de ce lointain futur, possédant toutes les connaissances de l’éternité pour les aider, n’eussent pas d’armes lançant des projectiles pour tuer à distance.
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vrai dire, je ressentais la même chose au tréfonds de mon être ; c’était en quelque sorte comme si nous connaissions les moindres habitudes et dispositions d’esprit de l’autre, et découvrir tout ce que nous avions en commun fut une source de joie intarissable. Rien ne nous surprenait cependant, si ce n’est de trouver ces révélations agréables totalement naturelles. J’avais conscience que ma chère cousine avait été plus que tout impressionnée par la façon dont j’étais si facilement venu à bout des trois bandits de grand chemin. Elle me demanda sans détour si je n’étais pas un nouvel Hercule, et quand un orgueil fort compréhensible m’incita à en rire, elle tâta un de mes bras pour se faire une idée plus précise de ma musculature. Un bras qu’elle lâcha très vite en hoquetant après avoir constaté sa fermeté. Puis elle resta à mes côtés sans mot dire, pensive, sans plus s’écarter de moi. Mais si ma force était pour elle à l’origine de grands émois, j’étais pour ma part ébahi et émerveillé par la beauté qu’elle avait exhibée de façon absolument exquise tout au long du dîner, à la lueur des chandelles. Et les jours à venir me réservaient une abondance d’autres plaisirs. J’alimentais mon bonheur de la façon dont elle prenait plaisir aux mystères du soir, au charme des nuits, à la joie de l’aube, et dans toutes les choses semblables. Et ce premier soir, des moments qui resteront à jamais gravés dans ma mémoire, alors que nous nous promenions sans but dans le parc, elle laissa échapper — l’esprit ailleurs — que c’était une nuit pour les elfes. Elle s’interrompit aussitôt, comme convaincue que je ne pouvais la comprendre, alors qu’il s’agissait d’un de mes thèmes de rêverie de prédilection… Ce qui me permit de lui répondre très posément que la tour du Sommeil croîtrait très certainement et que je sentais tout au fond de moi-même que toutes les conditions requises étaient réunies pour permettre la découverte de la tombe des Géants, de l’arbre à la Grande Tête peinte ou… Je m’interrompis car elle m’avait agrippé le bras avec des mains tremblantes ; mais, lorsque je voulus lui demander de quoi elle souffrait, elle m’ordonna en un souffle de ne pas m’arrêter. Sans trop comprendre de quoi il retournait, je déclarai que je n’avais voulu parler que du jardin de Lune, un très vieux fruit de mon imagination. Lorsque j’eus tenu ces propos, lady Mirdath cria quelque chose d’une voix étrange et basse, puis elle m’imposa de m’arrêter pour pouvoir me faire face. Après quoi elle m’interrogea avec gravité, et je répondis à ses questions avec un sérieux égal au sien. Je me sentais soudain surexcité, car j’avais la conviction qu’elle connaissait, elle aussi, ce lieu imaginaire. Elle me déclara qu’il lui était familier mais qu’elle avait cru être la seule à connaître cette étrange contrée onirique. Je découvrais que j’avais parcouru en rêve les mêmes pays qu’elle. C’était merveilleux… absolument merveilleux ! Ce qu’elle me répéta maintes et maintes fois. Puis, tout en marchant, elle précisa que c’était une mystérieuse force intérieure qui l’avait incitée à m’appeler, plus tôt cette nuit-là, lorsqu’elle avait vu que je m’arrêtais sur la route. Elle considérait que ce n’était guère surprenant. Informée depuis longtemps de notre lien de parenté, elle m’avait souvent vu passer à cheval et s’était renseignée à mon sujet. Peut-être avait-elle trouvé irritant de constater que je faisais si peu cas d’elle. Mais, ne l’ayant pas encore rencontrée, j’avais alors bien d’autres choses à l’esprit.
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Leur bestialité les apparentait à des animaux étranges et monstrueux des temps anciens, mais ils avaient également quelques caractéristiques humaines. Et il convient de savoir que les pères et les mères des jeunes insensés assistaient à cet atroce combat depuis les embrasures, tout comme les autres membres de leurs familles, et des visions sinistres emplissaient leurs cœurs et leurs sentiments.

Puis le combat cessa et nous ne vîmes plus que les masses difformes et sinistres des vingt-sept géants jonchant le sol, car il était impossible de distinguer clairement les cadavres des humains.

Et ceux qui se trouvaient dans la Grande Pyramide virent que les chefs regroupaient les survivants dans les ténèbres, et j’utilisai la grande lorgnette pour procéder à un décompte sommaire et découvrir qu’ils n’étaient que trois cents environ à avoir survécu, malgré leurs armes prodigieuses. Je communiquai la nouvelle à l’ensemble de la Pyramide, afin que tous sachent combien étaient morts, car rien n’est pire que l’incertitude et aucune longue-vue n’était aussi puissante que la Grande Lorgnette.

Après cet affrontement, les jeunes gens passèrent un certain temps à soigner leurs blessures, et quelques-uns furent séparés des autres. J’en comptai une cinquantaine. Puis, tandis que leurs compagnons repartaient vers la Route où marchent les êtres silencieux, leur chef ordonna aux cinquante blessés de regagner la Pyramide et je les vis peu après revenir lentement vers nous, épuisés et contraints à de fréquentes haltes, souffrant des graves blessures reçues au combat.

Mais les autres (environ deux cent cinquante jeunes gens) s’enfonçaient plus encore dans le pays de la Nuit ; et bien qu’inquiets pour eux nous étions fiers qu’ils se fussent ainsi comportés dans la bataille, eux qui n’étaient hier encore que des enfants. Ils avaient accompli un exploit admirable et je savais que si leurs mères pleuraient, inconsolables, le chagrin de leurs pères devait être adouci par une incommensurable fierté.

Les blessés approchaient donc peu à peu, malgré leur nombreux arrêts. Les plus valides aidaient leurs compagnons, et une onde de surexcitation et d’affliction se répandit parmi les habitants de la Grande Pyramide, car tous étaient impatients de savoir qui revenait, qui continuait sa route et qui reposait à jamais au-dehors, sur les lieux du massacre. Mais personne ne pouvait dire quoi que ce soit avec certitude ; car même la grande lorgnette de la tour d’observation ne permettait pas de les voir nettement, hormis lorsque les flammes des feux du pays de la Nuit s’élevaient plus haut que de coutume. Et il m’était alors impossible de les reconnaître, car nous étions si nombreux à l’intérieur du Grand Bastion que nul ne pouvait se targuer d’être capable d’identifier ne serait-ce que la moitié de nos dirigeants.
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Ces armes avaient été conçues pour repousser toute armée de monstres à même de pénétrer dans le Bastion. Leur aspect me faisait penser à des haches de guerre dont le manche pouvait être allongé en tirant sur la poignée.
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Les femmes prenaient à peine le temps de s’occuper de leurs enfants, et elles se hâtaient de retourner observer cette bande de jeunes insensés qui tentaient de rejoindre à tâtons ce Petit Bastion inconnu, quelque part dans le lointain de la nuit de ce monde.
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Et chaque mot était un trésor et une caresse pour mon âme ; et je cessai de manger et de m’accorder du repos, tourmenté par mon chagrin et ma douleur face à cette séparation inévitable.
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Tout ce que j’ai dit devrait décrire à ceux de notre époque une partie de la terreur qui régnera en cet autre temps, afin qu’ils adressent un remerciement serein et sincère à Dieu, grâce auquel nous n’avons pas à souffrir de ce que l’humanité future devra endurer.

Mais, il serait faux de croire que les humains de cette époque lointaine assimilaient cela à une souffrance. C’était pour eux une chose habituelle et naturelle, ce qui nous enseigne que l’homme peut tout affronter, s’y accoutumer et vivre au sein des pires horreurs avec sagesse, à condition de faire montre d’un minimum de prudence.

Et tout le pays de la Nuit connaissait un réveil extraordinaire des monstres et des forces du Mal. Nos appareils de mesure enregistraient constamment un accroissement de la puissance de ce qui était à l’œuvre au sein de l’obscurité. Les Monstruwacans s’affairaient à tout enregistrer et surveiller. Et cette période se déroula ainsi, dans une atmosphère de changement, d’éveil et de prodiges.
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J’étais devenu plus célèbre que je ne l’avais jamais été, car la nouvelle du premier appel n’avait presque pas circulé, l’événement ayant été mis sur le compte de la nature trompeuse des vents-esprits des rêves à moitié remémorés. Il n’en restait pas moins vrai, comme je l’ai déjà écrit, que mes récits concernant les premiers jours du monde, lorsque le soleil était encore visible et la lumière abondante, avaient été diffusés dans toutes les cités et largement commentés et exposés dans les fichiers horaires, provoquant ainsi bon nombre de discussions et de querelles.
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Et ainsi, durant un instant d’émerveillement, je m’entretins avec la femme qui se trouvait au-dehors, dans la noirceur de ce monde, et qui connaissait mon nom et mon surnom d’amour d’un très lointain passé : Mirdath.

Je la questionnai sur son identité et je ressentis un profond désappointement, car elle ne s’appelait pas Mirdath, mais Naani et déclarait ne pas me connaître. Elle avait trouvé dans la bibliothèque du lieu où elle vivait un livre racontant l’histoire d’un homme portant mon nom, amoureux d’une certaine Mirdath.
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