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Critique de maevedefrance


Traduit par Elodie Leplat

La salle de bal a obtenu le Grand Prix des Lectrices Elle 2018 catégorie roman. C'est la raison qui m'a incitée à le lire, par curiosité. Parce que c'était aussi une bonne occasion de découvrir l'auteure. A l'heure où j'écris, il a tout été dit sur ce roman, ou presque.

Je vais me contenter de reprendre la 4e de couverture du roman, qui décrit (un peu trop) en détail l'histoire :
"Lors de l'hiver 1911, Ella Fay est internée à l'asile de Sharton, dans le Yorkshire, pour avoir brisé une vitre de la filature où elle travaillait depuis l'enfance. Révoltée puis résignée, elle participe chaque vendredi au bal des pensionnaires, unique moment où hommes et femmes sont réunis. Elle y rencontre John, un Irlandais mélancolique. Tous deux dansent, toujours plus fébriles et plus épris. A la tête de l'orchestre, le docteur Fuller observe ses patients valser. Séduit par l'eugénisme et par le projet de loi sur le Contrôle des faibles d'esprit, Fuller a de grands projets pour guérir les malades, dont les conséquences pourraient être désastreuses pour Ella et John."
TADAM ! En fait en l'achetant, je n'ai pas du tout lu la 4e de couverture, ni après d'ailleurs. Seulement pour écrire ce billet et c'est maintenant que je me rends compte d'un certain aspect eau de rose dans la rédaction. :) de toutes façons, elles sont rarement bien écrites ces 4e de couverture.

En tout cas, l'histoire se déroule en 1911 et 1934. C'est même en 1934 que commence cette histoire, par un prologue qui amène le lecteur à y revenir à la fin de sa lecture.
Ce qu'il faut savoir aussi, c'est que cette histoire est tirée de celle de l'arrière-arrière-grand-père d'Anna Hope, qui était irlandais et s'appelait John Mullarkey. Il a été interné en 1909, dans l'asile de Menston, dont celui de Sharton est la transposition littéraire. Son dossier décrit un homme déprimé qui a dû travailler très dur et était inquiet à propos de son travail (aujourd'hui, on parlerait sans doute de burn out, je ne sais pas). Il y est mort en 1918, en mauvaise santé. Anna Hope dédie ce roman à sa mémoire.

Nous suivons donc au début du XXe siècle, l'histoire de trois personnages.
Celle de John Mulligan, l'Irlandais pensionnaire de l'asile, fossoyeur, poète dans l'âme. Il est celui qui observe : "(...) il existait une règle : les irrécupérables étaient amenés chaque matin en fauteuil roulant et installés dans une moitié de la pièce, où il passait le reste de la journée. Des ruines d'hommes, le visage mangé par la maladie, dont beaucoup ignoraient jusqu'à leur propre nom. (...). Au milieu de la pièce, il y avait une ligne, invisible, et pourtant plus forte que si elle avait été tracée au goudron, que ceux du côté de John refusaient de franchir, même lorsqu'une bille de billard tombait de la table et allait rouler derrière. de l'autre côté, à partir du milieu de la cheminée, se trouvait le reste d'entre-eux. Peut-être pas aussi mal en point que les autres, mais ça ne voulait rien dire. Il y avait le vieux soldat qui ne parlait que des Pachtouns (...); un vieux de la vieille dénommé Foreshaw, duquel on disait qu'il était là depuis l'ouverture de l'asile, près de trente ans plus tôt, et qu'il avait un jour bu le sang d'un mouton".

Ella Fay, fileuse depuis l'âge de 12 ans dans à l'usine du coin, qui un jour pète un plomb et casse une vitre, qu'on envoie aussi sec à Sharton. Sa beauté émoustiller la curiosité de certains pensionnaires, qui questionnent John qui l'a vue partir à fond de train pour empêcher d'être enfermée, semant assez facilement poursuivant si elle n'avait pas chuté en cours de route. Celle qu'on appelle la fugueuse.

Charles Fuller, musicien contrarié dans sa vocation, médecin à moitié raté qui a trouvé un emploi à l'asile comme il aurait trouvé du travail dans un cirque. "En matière d'évasion, il s'en était fallu de peu : après quatre années de médecine, il avait réussi de justesse ses derniers examens, avec des résultats trop médiocres pour occuper le poste à Barts que son père avait obtenu au prix d'un travail acharné. (...) L'ennui. Il s'était ennuyé. A cause de ces gros morceaux d'informations indigestes délivrés par des enseignants désséchés (...). Il s'était mis à lire les journaux à la bibliothèques, en s'intéressant tout particulièrement aux offres d'emploi, copiant les noms de celles qui frappaient son imagination. (...) Son oeil fut attiré par quelques lignes lapidaires : "Personnel infirmier. Masculin ou féminin. Sachant jouer d'un instrument. Asile de Sharton." Incroyable annonce, non ?

Si on sait d'emblée les raisons qui ont amenées Ella à se retrouver enfermée dans cet asile, (rébellion), le secret de John reste gardé un bon moment avant que le lecteur comprenne.
Charles est le médecin fou, le type frustré pour lequel personnellement je n'ai pas eu d'empathie, malgré sa passion artistique pour la musique. C'est la caricature du raté, du frustré, qui a de la rancoeur et doit trouver un truc pour devenir une "star", si je puis dire. Charles découvre les théories eugénistes de Darwin. Celle de sauver la nation de la décadence. Mais d'une drôle de manière ! Charles, à la suite des théories folles de l'eugénisme, a l'idée de transformer l'asile en hôpital, en faire "un établissement universitaire susceptible d'être précurseur en matière de stérilisation une fois que le projet de loi sur les faibles d'esprit serait passé" . Il reçoit le soutien de Churchill, alors ministre de l'intérieur. Nous sommes en 1911, et l'on sait ce que les théorie eugénistes pourront inspirer aux nazis bien plus tard. Alors, il est difficile, pour un lecteur du XXIe siècle de se mettre à la place de ce médecin et même de Darwin dont les idées sont complètement dingues alors qu'il est pourtant un génie scientifique d'autre part.

Anna Hope osculte la folie sous toutes ses formes. Les plus dingues sont en liberté et pas prisonniers d'un asile. A cette époque, le monde s'apprête à devenir dingue. Nous sommes à 3 ans dans la Grande Guerre qui saignera l'Europe.

Et puis il y a cette histoire d'amour qui occupe finalement beaucoup plus le devant de la scène dans ce roman. Comme toute histoire d'amour, il y a toujours une troisième personne. Ici il y a Clem, pensionnaire de l'asile de Sharton, devenue l'amie, la confidente d'Ella. Quand Ella reçoit les premières lettres de John, celui-ci ignore qu'elle ne sait pas lire. C'est Clem qui lui lira les lettres et y répondra. Jusqu'au jour où... ce qui devait se passer se passa. Et quelque chose se cassa entre elles et surtout en Clem.

J'ai presque deviné la fin du roman. J'ai trouvé la fin trop "pathos", trop trémolo, arrache-larmes, à mon goût. Pas drôle.

Anna Hope se lance dans un livre très romanesque sur fond historique. On a de l'empathie pour ses deux personnages principaux, très attachants, libres et lucides. Pas fous, contrairement aux autres. Par instants, ce livre m'a rappelé le testament secret de Sebastian Barry, que j'ai nettement préféré, qui raconte aussi l'histoire d'une jeune femme enfermée dans un asile, irlandais. Même s'il n'est pas question d'eugénisme. C'est aussi une histoire inspirée de la vie d'un membre de la famille de l'auteur.

J'avoue que si j'ai passé globalement un bon moment de lecture, je ne suis pas totalement entrée dans la valse de la salle de bal. J'attendais le thème de l'eugénisme beaucoup plus creusé, le contexte historique aussi. Pour un roman qui obtenu le Grand Prix des Lectrices Elle l'an dernier. Sans doute l'aspect biographique a joué un rôle. J'ai été scotchée par l'opinion de Churchill sur l'eugénisme ! Sans parler de Darwin !
Lien : http://milleetunelecturesdem..
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