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Critique de Fandol


En lisant le Rocher blanc, je me suis laissé emporter par l'écriture d'Anna Hope, bien traduite par Élodie Leplat. Comme j'avais bien apprécié La salle de bal et Nos espérances, je voulais poursuivre l'aventure avec cette autrice et je n'ai pas été déçu.
Autre source de motivation, notre rencontre, avec cette écrivaine britannique aux Correspondances de Manosque 2022. J'avais été intrigué par la présentation de son nouveau roman bâti sur un défi familial ramenant Anna Hope et son mari, bien loin, là-bas, sur la côte pacifique du Mexique malgré un voyage difficile à bord d'un minibus.
Ce fameux rocher blanc existe et fait partie de la culture d'un peuple indien, les Wixárikas qui pensent que c'est là que notre monde a émergé des eaux. Comme les Yeome, ce peuple a été décimé, réduit en esclavage par les colonisateurs ainsi que cela s'est produit sur la majeure partie du continent américain.
Au cours de ma lecture, j'ai apprécié qu'Anna Hope remette en évidence quelques mots d'usage courant, mots encore utilisés par ces peuples, me faisant aussi partager leurs souffrances, les atroces persécutions infligées par le pouvoir mexicain au début du XXe siècle.
Cette partie, de loin la plus poignante, arrache des larmes au plus endurci. Elle se déroule en 1907 et s'intitule « La fille ». Si je commence par son évocation, c'est parce que les deux parties qui y sont consacrées me semblent les plus importantes à cause de ce génocide relégué dans les oubliettes de l'Histoire.
Cette fille et sa grande soeur, Maria-Luisa, ont été arrachées à leur village parce qu'elles ont voulu aider les rebelles. Sans ménagement, elles ont été déportées, entassées sur le pont d'un bateau qui les a débarquées près de ce fameux rocher blanc, à San Blas, côte nord du Nayaritan, au Mexique. Anna Hope fait bien ressentir la solidarité entre ces enfants, ces femmes et ces hommes dont la disparition est programmée, le moins pire étant l'esclavage… le Rocher blanc est d'abord, il faut le dire, une histoire familiale, celle d'un couple qui ne parvient pas à avoir d'enfant. Par chance, un voyage au Mexique, justement près de ce rocher blanc, la rencontre avec un chaman a, peut-être, permis à « L'écrivaine » d'être enceinte. Aussi, leur fille a trois ans quand, avec son mari, ils vont, ensemble, honorer ce rocher blanc, même si le couple va se séparer...
Avec ça, Anna Hope me plonge, en 1969, dans la vie d'un chanteur mondialement connu, Jim Morrison, comme son groupe, les Doors, sans les nommer. Pour fuir toutes les contraintes de la célébrité, cet homme qui boit et se drogue au maximum, tente de retrouver la paix près du rocher blanc. Pour moi, c'est le volet le moins intéressant.
Le quatrième élément de cette oeuvre littéraire remonte un peu plus le temps pour revenir en 1775 avec « le lieutenant ». J'ai bien aimé cette partie qui permet de côtoyer ces hommes formés pour naviguer mais dont la principale tâche est de dresser la cartographie du monde, en suivant les côtes. S'ils sont financés par leur pays d'origine, l'Espagne, c'est surtout pour s'approprier de nouvelles terres et donc imposer ce qu'ils pensent être la civilisation avec les conséquences désastreuses qui en découlent.
Anna Hope conte magistralement leur formation, leurs échecs, leurs espoirs, leurs luttes fratricides qui trouvent leur apogée, justement, dans la baie d'où émerge le rocher blanc. Comme elle a choisi de le faire pour « La fille » et « le chanteur » ou même « L'écrivaine », son principal personnage n'a pas de nom, désigné simplement par son grade dans la marine.
Le Rocher blanc est un roman instructif, émouvant, vite addictif qui m'a emmené dans un lieu mythique, chargé d'histoire où la magie côtoie le drame et les espoirs fous. Tout cela est conté avec beaucoup de pudeur car la crise du couple, celle du coronavirus et ces civilisations menacées de disparition ne peuvent que tenter de se raccrocher à cet élément solide impressionnant émergeant de l'eau : le Rocher blanc.

Lien : https://notre-jardin-des-liv..
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