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Citations sur Vivre avec nos morts (318)

En sortant du cimetière, le jour de l'enterrement de Sarah, j'ai invité son fils à me suivre pour faire ce que font les "bons juifs" avant d'en repartir, se laver les mains avant de quitter ces lieux. C'est-à-dire symboliquement séparer les espaces, ceux de la mort et ceux de la vie, et laisser là ce que le Talmud appelle l'impureté des cadavres. Bien entendu, tout cela est très symbolique. On emporte ses morts partout avec soi, et s'ils restaient au cimetière, cela se saurait. La vie et la mort ne sont pas hermétiquement séparées, et l'eau qui coule n'imperméabilise pas nos vies du deuil. Parfois, il me semble au contraire que, à la manière d'un panier passé sous l'eau, ces ablutions rétrécissent les mailles et nous disent qu'ainsi nous resserrons les liens avec ceux qui nous quittent. De génération en génération.
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Les parents qui ont perdu un enfant : à l’instant où la nouvelle arrive, ils perçoivent que la terre se dérobe sous leurs pieds et ce séisme les expulse à tout jamais hors d’un territoire qui les abritait et dans lequel ils n’auront jamais plus leur place. Ils sont confinés sur une île, coupés pour toujours de la terre de ceux que cette tragédie a épargnés. Ils habitent hors du monde, hors du temps, dans un lieu duquel on ne revient pas. Exilés sur une terre que personne ne peut visiter, à part ceux à qui il est arrivé la même chose. Ils sont « shakoul » qui veut dire branche de vigne dont on a vendangé le fruit.
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Tout est dit ou presque dans ce texte : l’angoisse d’un homme de ne pas être à la hauteur, la peur de mourir avant de savoir. Il révèle aussi ce qui pourrait permettre à un homme de partir en paix, et d’apprendre à mourir. Moïse a reçu la Thora au mont Sinaï mais, bien après lui, surgirent des hommes capables d’interpréter ce que lui ignorait. Ces érudits en savaient davantage mais continuaient à dire que ce qu’ils détenaient, ils le lui devaient.
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Les juifs affirment qu’ils ne savent pas ce qu’il y a après notre mort. Mais ils pourraient le formuler autrement : après notre mort, il y a ce que nous ne savons pas. Il y a ce qui ne nous a pas encore été révélé, ce que d’autres en feront, en diront et raconteront mieux que nous, parce que nous avons été.
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Quelles traces ont laissées dans nos vies ceux qui sont partis ? Que portons-nous de ce qu’ils ont fait ou au contraire de ce qu’ils n’ont pas pu réaliser ? Que laisserons-nous à notre tour, sur cette Terre où nous ne faisons que passer ? Nul besoin d’être un assassin pour connaître l’angoisse de Caïn : la peur de renoncer à ce qui semble acquis, et la terreur de se savoir évanescent.
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Pour décrire ce que j’ai ressenti dans ce cimetière, un mot me vient à l’esprit : celui de « solastalgie ». Ce concept, inventé au début des années 2000 par un philosophe australien, décrit une nostalgie d’un type particulier, celle d’un lieu où l’on se trouve mais dont on sait pourtant qu’il n’existe plus. Ce qui était n’est plus, mais les traces d’un monde disparu en conservent le souvenir aussi solidement que s’il était indemne.
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La laïcité dit que l'espace de nos vies n'est jamais saturé de convictions, et elle garantit toujours une place laissée vide de certitudes. Elle empêche une foi ou une appartenance de saturer tout l'espace. En cela, à sa manière, la laïcité est une transcendance. Elle affirme qu'il existe toujours en elle un territoire plus grand que ma croyance, qui peut accueillir celle d'un autre venu y respirer.
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« (…) Mes parents regardent la 2e chaîne passée en couleur récemment, pendant que moi, seul dans ma chambre, dans le noir, je me tourne et me retourne sous mon drap. Je ne le sais pas encore mais mon inconscient a ouvert une porte qui ne se refermera plus jamais. Exit l'insouciance de l'enfance, envolées toutes ces belles années vécues où le temps ne compte pas, où il s'écoule en de longues minutes, de longues heures à attendre… mais là, ce soir-là, je prends conscience que je viens de vivre dix ans de ma vie ! Dix ans déjà de consumés comme une bougie dont la matière fond inexorablement jusqu’à l'extinction. Comme un sablier qu'on ne peut retourner. Encore une fois comme ça et j'aurai 20 ans point encore autant et cela fait 40… et encore une fois cette quantité qui me paraît ridicule à compter et j'aurai quatre-vingts ans… pour ainsi dire la fin, la mort. » p.56
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Rencontrer des proches et préparer une cérémonie de funérailles est un moment sacré. Il peut sembler trivial de l'écrire. Mais ces quelques heures ou quelques jours passés auprès de ceux qui se séparent d'un être aimé constitue un temps « sacré », […] la disparition d'un être cher fait entrer ceux qui lui survivent dans un temps à part : elle interrompt sa linéarité. p.41
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… nos corps se sculptent par la mort des éléments qui le composent. Il en est ainsi de chaque extrémité digitale mais aussi de bien des cavités de notre organisme, cœur, intestins, ou système nerveux. Ils ne remplissent leur fonction que parce qu'un vide en eux a été creusé. C’est la disparition d'une partie d'eux-mêmes qui permet l'action de ces organes. Nous devons donc la vie à la mort qui y a œuvré. P.20
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