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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Humbert Fabrice – "Eden utopie" – Gallimard, 2015 (ISBN 978-2070144433)

Bien qu'il ne s'agisse "que" d'un texte de témoignage largement autobiographique, le lecteur éprouve d'abord (et avant tout ?) le plaisir de retrouver ici la grande qualité d'écriture littéraire de cet auteur, qui renforce celle du témoignage.

Comme le précise la quatrième de couverture, Fabrice Humbert retrace ici l'histoire de la communauté protestante "Fraternité", fondée à Clamart après la seconde guerre mondiale par des ascendants de sa propre famille, qui vit passer des personnalités politiques appelées à jouer un rôle important, dont le plus connu fut un certain Lionel Jospin.

Deux aspects (parmi d'autres) m'ont particulièrement intéressé.

Le premier réside bien entendu – inépuisable source d'interrogation pour les ex-soixante huitards – dans ce mécanisme infernal qui amena certaines et certains (ayant pourtant reçu une éducation morale et éthique qui eût du les mettre à l'abri d'une telle atroce dérive) à participer ou à soutenir le groupe terroriste "Action directe" sans voir combien cette violence meurtrière ne pouvait trouver aucune, absolument aucune justification. Une fois de plus s'impose la comparaison avec la "Rote Armee Fraktion" de la bande à Baader, puisque la plupart de ses membres – surtout les femmes – étaient d'origine protestante... Entre autres qualités, l'auteur montre, avec délicatesse et pudeur, combien les agissements d'une seule personne ont profondément secoué leur cercle familial.

Le deuxième aspect concerne l'avènement de cette couche sociale particulière, communément nommée "gauche caviar". Dans ce récit, l'auteur nous montre, avec une grande finesse et une profonde pudeur, le chassé-croisé entre la branche familiale (issue de Sarah) qui – juste après la guerre – s'assure une certaine réussite sociale, fonde et anime cette communauté utopique pour finir dans la dèche, et l'autre branche, (issue de Madeleine) partant d'une situation sociale difficile mais assurant sa réussite sociale en bénéficiant de l'accession au pouvoir du Parti Socialiste à la mode mittérrandienne.

Il se trouve que j'ai lu ce livre peu après avoir lu celui de Philippe Claudel intitulé "L'arbre du pays Toraja" (cf recension), qui montre combien cet auteur, issu lui aussi d'un milieu fort modeste, se vautre et s'exhibe en toute naïveté dans l'autosatisfaction typique de la "gauche bobo", satellite indispensable de la "gauche caviar".
Le témoignage de Fabrice Humbert est infiniment plus nuancé, plus distancié, plus critique, mais il montre à quel point une bonne part de l'intelligentsia d'origine modeste fut subjuguée par cette gauche caviar, et participa activement à son installation durable dans les rouages de l'appareil d'État et plus généralement dans les allées du Pouvoir, manipulant la plupart des grands médias, dominant largement le monde universitaire, phagocytant l'appareil judiciaire, s'emparant de la direction des grands centres urbains (dont la capitale parisienne), rejetant dans un mépris insondable (la ringardisation) son milieu d'origine, largement provincial et "petit-bourgeois" de la France périphérique.

Un livre à lire et relire.

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Un livre sur deux familles, essentiellement à partir des années 60 vu par le petit-fils d'une des deux fondatrices des Rougon et Macquart de l'époque.
La seule histoire familiale, intime, est intéressante, touchante et humaine donc intemporelle.
Mais l'auteur ajoute à ces portraits une analyse de la transformation de la société ante et post soixante-huitarde formidablement crédible, entre autres parce que certains membres de ces familles sortaient de la norme.
Sans la prétention du sociologue-intellectuel de comptoir, donc polémique, Humbert tisse son raisonnement sans que l'on s'en aperçoive avec un degré d'honnêteté intellectuelle, d'humilité, qui permet la subtilité et évite tout manichéisme. Ce n'est qu'une façon de voir le Monde mais elle semble par-dessus tout expliquer pourquoi toute idéologie, tout choix a ses limites, ses conséquences inattendues et pas toujours positives.
Au bout du bout il reste l'être humain qui, dans le meilleur des cas rira de ses utopies et pensera avoir touché du doigt l'Eden… Sans s'en être rendu compte.
Je m'en vais mettre une étoile supplémentaire : cela fera cinq.

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Il m'a plu, ce livre, à cause de la grand-mère du narrateur, qui m' a rappelé la mienne : une femme taiseuse, ayant eu 2 maris, ayant confié l'éducation de ses enfants à d'autres car ne pouvant y parvenir elle-même.

L'auteur nous prévient tout de suite : ce ne sera pas un roman. Il a lui-même tenté d'écrire ce livre sous forme de roman, mais la forme se refusait à lui. Ce seront donc des souvenirs éparses récoltés dans la famille.

J'ai découverte La Fraternité protestante, ont est également issu Lionel Jospin.

Puis, les 30 Glorieuses et ses révolutionnaires : Action Directe en France, dont un membre de la famille fera partie.

L'auteur compare sa famille avec celle des Rougon-Macquart, puis les positions sociales s'inversent.

J'ai aimé suivre cette famille depuis la fin de la guerre de 39-45 jusqu'à nos jours.

J'ai aimé la vision de l'auteur de l'Eden comme une utopie, différente pour chacun de nous.

Quelques citations :

Ils était malades, comme si leur milieu se déchiffrait dans leur corps : ma grand-mère respirait mal, mon grand-père avait le coeur fragile. (p.45-46)

Le gauchisme radical est venu des cadets (de famille) qui n'ont pas pu participer de façon active à mai 68. (p.198)

Elise n'avait rien d'une terroriste, elle avait seulement mal surveillé ses fréquentations. (p.236)

J'ai plus d'argent que toi, mais jamais j'achèterai de Ferrari. JE PEUX ENTRER A CHEVAL DANS UNE EGLISE. (p.280)

L'image que je retiendrai :

Celle du narrateur qui est resté longtemps dans le monde de l'imaginaire.
Lien : https://alexmotamots.fr/eden..
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Fabrice HUMBERT nous raconte ,avec talent, l'histoire de deux grandes familles dont la sienne…Dans un milieu Protestant, l'une est riche ,l'autre pauvre…
Au sortir des ravages de la guerre,tous ,très unis , croyaient sincèrement devenir la génération de la relève…
Ils bâtissent alors tous ensemble une communauté rigide qu'ils nomment la Fraternité…
Fabrice HUMBERT nous fait rentrer dans la personnalité de chacun,jeune ou âgé, et tous naviguent à la fois dans le rêve, la réalité, la fiction et l'imaginaire…
Ce livre écrit avec amour est attachant.
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A partir de l'histoire de sa famille maternelle, Fabrice Humbert nous plonge dans une analyse de la « génération 68 », entre ascension sociale et recherche d'un monde nouveau. En entrecroisant les axes psychologiques et sociologiques, il parvient à restituer à la fois le changement de société qui s'est opéré dans ces années-là et la portée de l'héritage des valeurs morales au sein d'une famille.

Deux cousines élevées ensemble, qui donnent naissance à deux lignées aux fortunes différentes et qui se côtoient au sein d'une communauté idéaliste, la Fraternité : les descendants choisiront ils de s'éloigner de cet idéal ou de tenter d'en inventer la suite ?
Si l'on peut regretter parfois la retenue dont fait preuve l'auteur – à la fois narrateur et acteur de ce roman – elle lui permet cependant de créer la distance nécessaire pour donner au récit une portée plus générale. Bienveillant et observateur, il nous interroge en filigrane sur ce qui nous constitue.
Lien : https://yaourtlivres.canalbl..
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