Je vous demande le droit de mourir

Cette envie de mourir, je l'ai depuis des mois. Depuis mon réveil. Mais elle était engloutie au fond de moi. C'était un peu comme un bouton plein de pus qui grossit lentement sous votre peau et qui un jour éclate parce que quelqu'un appuie dessus. Eh bien pour moi ce fut la même chose. Tout ce que je pense aujourd'hui, j'y ai toujours pensé mais ce n'était pas encore mûr. J'espérais que cela passerait, que mon état s'arrangerait. Et le Dr Rigaud est venu appuyer sur ce bouton qui a giclé sur mon semblant de vie, et sur la vie de ma mère.

Alors je lui ai dit, et le me rappelle les termes exacts employés :
- Si tu m'aimes, tu n'as plus le choix, ou alors c'est que tu ne m'aimes pas.
Elle n'a pas répondu. Et comme c'était l'heure pour elle de s'en aller et de rentrer chez elle, elle s'est approchée de moi, m'a longuement embrassé comme chaque fois qu'elle quitte ma chambre et m'a dit :
- Bon, allez, bisous Chouchou, je t'aime, à demain.
Là, je lui ai fait signe de reprendre ma main pour lui dire ce que je voulais lui dire depuis plusieurs jours. Il fallait que je le fasseµ. L'instant était, je crois, le mieux choisi, le plus opportun.
- Arrête de dire que tu m'aimes, parce que tu ne m'aimes pas.
Elle a sursauté. C'est la première fois que je lui disais cela.
- Ca ne va pas Vincent, bien sûr sur je t'aime !
- Non, tu ne m'aimes pas, lui ai-je répondu. Si tu m'aimais, tu me tuerais.

Cette nuit-là, je n'ai pas dormi. Je me sentais coupable d'avoir fait tant de mal à ma mère. Je l'imaginais chez elle, toute seule, ressassant les phrases assassines que je lui avais jetées en plein figure. J'étais partagé entre le soulagement de lui avoir dit ce que j'avais sur le cœur et le chagrin de lui avoir fait tant de mal. Parce qu'il est dur, très dur et terriblement difficile, de demander à celle qui vous à donné la vie qu'elle vous donne la mort.