Les auteurs ignorent que les hommes se sont toujours préoccupés de vivre moins malheureux et plus heureux. Pour eux, « la recherche du bonheur est l'un des traits les plus distinctifs de la culture nord-américaine » (p. 13). Faire des recherches sur le bonheur et enseigner les résultats c'est faire le jeu de « la société capitaliste néo-libérale ». Faire croire que le bonheur des peuples est une chose essentielle « c'est la stratégie de Pinochet au Chili, suivi de Cameron au Royaume-Uni et de Sarkosy en France » (sic, p. 53).
N'étant pas à une contradiction près, les auteurs affirment que les recherches sur le bonheur — notamment l'analyse des « Big Data » —n'ont « quasi rien appris » (p. 59), mais affirment un peu plus loin que ces analyses permettent aux grandes entreprises « d'exercer une influence non seulement sur les aspects les plus courants des existences individuelles, mais aussi sur les modèles comportementaux les plus généralisés ».
La « psychologie positive » est la cible privilégiée. Les auteurs affirment que ce courant « a insufflé de l'oxygène à une discipline, la psychologie, chroniquement incapable de trouver son objet d'étude » (sic, p. 41). Pour eux ce courant est « une industrie mondiale pesant des milliards ». Sans fournir leurs sources, ils affirment que le Centre de psychologie positive de l'université de Pennsylvanie a reçu « des sommes énormes » de « personnages ultra-conservateurs », de multinationales (notamment Coca-Cola) et des Émirats arabes. La psychologie positive serait « une sorte de pornographie émotionnelle » (p. 12s).
Pour eux, les procédures qui aident les personnes — en particulier les travailleurs — à mieux gérer leurs émotions ne font rien d'autre que le jeu des patrons : elles façonnent « le citoyen néolibéral idéal » et produisent des « happycondriaques ».
Un défaut majeur de l'ouvrage est que la psychologie positive est présentée comme une doctrine unifiée. En réalité c'est l'étude, en principe scientifique, de ce qui permet de vivre plus heureux, et le résultat actuel est loin d'être une conception totalement unifiée. L'autre grand reproche aux auteurs est qu'ils publient un ouvrage de 270 pages pour exposer quelques idées qui peuvent tenir dans un article. Sur ces idées, il existait d'ailleurs déjà un bon nombre d'articles parfaitement redondants.
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