N'oublie jamais que je t'aime

Ce soir-là, maîtresse Amandine reste tard à l'école.
Elle attend la maman de Valentin. Une maman qui travaille loin et qui arrive souvent la dernière. Une maman qui écoute la maîtresse lui raconter tout ce qui s'est passé à la bibliothèque.
Une maman fatiguée qui explique en sanglotant comment la vie lui a fait mal depuis quelques temps.

Alors la petite Zoé s'approche de Valentin:
- Moi, je t'appellerai mon loulou...
- Bravo Zoé! et si nous lui donnions tous un petit nom! propose Hélène.
Ainsi, peu à peu, les mots doux chassent les mots durs.

- Ma maman, elle a oublié les mots doux... Elle dit que des mots durs!
Echappant aux bras de la maîtresse, Valentin se plante au milieu du groupe et il crache tous ces mots qui l'étouffent.
Les mots durs ont envahi la pièce.
Plus personne n'ose respirer.
Plus personne n'ose regarder.

Valentin serre sa maman dans ses bras et lui déclare d'une voix très douce:
- Moi je t'appellerai Maman chérie adorée mignonne que j'aime!
Les yeux brillants, celle-ci répond:
- Moi aussi je t'aime, Valentin!
Même quand je me fâche après toi!
Même quand j'oublie de te le dire...

Aujourd'hui, comme tous les jeudis, maîtresse Amandine emmène les enfants à la bibliothèque. Deux par deux, mains dans la main, ils trottent sur les trottoirs. Ils ont rendez-vous avec Hélène, qui leur ouvre les portes de la Maison aux histoires.

- Et toi, Valentin, à la maison, c'est quoi ton petit nom?
Les petites bouches se sont fermées.
Les petits pieds ont cessé de remuer.
Perdu dans le silence, l'enfant rougit d'abord, puis éclate en sanglots.