Les
Bordes, d'
Aurélie JeanninBrune est mère. Et femme. Et juge. Et seule, souvent. Seule face à ses angoisses, face à ses enfants, face à sa belle-famille. Débordée, épuisée, à fleur de peau.
Brune est tout ça et se voudrait mieux, meilleure mère, meilleure femme, meilleure tout. Elle rêve de perfection, celle que l'on croit voir chez les autres, mais se rend compte que les journées ne sont pas étirables et que la tête non plus. Que l'on ne maîtrise pas tout. Mais elle s'en veut quand même, de ses craquements, de ses fêlures, de ces moments où le vernis cède et où le bois brut apparaît. Elle aimerait être la mère formidable que les dessins et les photos nous vendent autant que notre éducation. Elle aimerait se défaire de ses peurs, lâcher la bride, mais rien n'y fait. Elle est imparfaite et n'y peut rien. Elle aime et déteste. Se méfie. Se replie. Réfléchit. Appréhende. Trop.
Sans cesse.
Et puis ce week-end-là, et l'angoisse de plus qu'il crée. Ça monte à fleur de peau. Ça de plus.
Deux jours avec la belle-famille, deux jours de mépris et de reproches muets.
Deux jours de regards qui disent et de bouches cousues.
Deux jours d'hostilités là-bas, aux
Bordes, là où les êtres sont aussi rêches et blessants que le décor. Elle le voit, le sait, le sent. le danger est partout où se pose son oeil de mère. Et le lecteur suit. Et s'inquiète. Peut-on vraiment, tout le temps, protéger ses enfants ?
Alors on inspire et garde, ne relâchant ni le souffle ni l'attention. En ouvrant la première page, sans le savoir, on a plongé. S'en suit alors l'apnée dans la bulle sombre, entre encre et fumée, dessinée par
Aurélie Jeannin. La dernière page tournée, on respire enfin. Presque. Juste assez pour dire que c'était vraiment bien.