Seo-weon, 18 ans, est le fils d'un meurtrier. Les événements dramatiques s'étant déroulés au barrage Seryeong sept ans plus tôt qui ont conduit son père en prison pour meurtre continuent à détruire sa vie : impossible pour lui de demeurer longtemps au même endroit, dès que son identité est connue, sa vie vole en éclats. Suite à la disparition de son ami et gardien, présent comme lui sur les lieux du drame à l'époque, Seo-weon est contraint de se replonger dans son passé où l'attend une vérité infiniment plus sombre et complexe que celle que les médias et la police ont retenue des faits.
Ce qui fait de ce polar une réussite selon moi, et ce qui m'a rendu assez pénible de devoir de temps à autre le poser, est l'efficacité de sa construction. Dans le manuscrit que découvre Seo-weon et qui relate le drame survenu sept ans plus tôt, l'auteure alterne les points de vue entre les différents protagonistes : la mère et le père du jeune homme, le père de la fillette assassinée et Seung-hwan, ami et gardien de Seo-weon et auteur du texte. Ces focalisation internes successives permettent d'une part au lecteur de développer de l'empathie pour un personnage présenté dans un premier temps comme un monstre, et d'autre part autorisent l'auteure à ralentir le temps au point de relater les deux semaines fatidiques en plus de 400 pages, montrant un même moment du point de vue de chacun des protagonistes et revenant ainsi sans cesse en arrière dans le temps. Autre aspect intéressant de la mise en place du suspens ici, le fait que le lecteur découvre petit à petit et au même rythme que Seo-weon dans quelle mesure il peut accorder foi à un texte relatant certes les faits mais se présentant comme leur relation romancée, celle-ci étant donc sujette dès le début à caution, bien des éléments ne semblant pas pouvoir être connus de l'auteur de ce récit enchâssé.
Au-delà de ce mystère que Jeong You-jeong dévoile patiemment et méticuleusement,
les nuits de sept ans s'offrent comme une réflexion habile sur les liens qui unissent parents et enfants, sur la difficulté, la douleur d'assumer certains héritages familiaux. Il ne s'agit pas seulement de l'alcoolisme, des violences conjugales d'abord subies puis infligées, les personnages tentent par tous les moyens d'échapper à une misère, à une destinée auxquelles leur naissance semble les avoir condamnés. À travers Seo-weon, l'auteure évoque la quasi impossibilité (socialement comme humainement) de vivre en étant l'enfant d'un criminel dans une société qui n'hésite pas à punir le fils pour les péchés du père.
Quelques ficelles m'ont paru, dans la conclusion, un peu trop faciles, presque grossières. Peut-être aurais-je préféré que le dénouement soit un peu moins clair, un peu moins « propre », et que certains événements demeurent dans l'ombre, privés de résolution. Au-delà de ce léger point noir, Les nuits de sept est un ouvrage aussi efficace qu'intelligent, tant du point de vue de la forme, de la mise en oeuvre du récit, que du fond. Un très agréable moment de lecture pour lequel je remercie Babelio et les éditions Decrescenzo.
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