Le triomphe de Thomas Zins

Je viens tout juste de quitter le jeune Thomas Zins, avec qui j'ai passé une petite dizaine d'années au cours de la dernière semaine, et me voilà un peu déboussolée … Pas évident de quitter Nancy après 1097 pages !
Ce jeune adolescent, issu d'un milieu bourgeois qu'il rejette - ou croit rejeter - âgé de quinze ans au début des années 80, découvrira l'amour fou avec Céline, fille de prolétaires qu'il tentera de sortir de sa condition …
Une version moderne de l'éducation sentimentale, avec un langage nettement plus cru qui ne plaira peut-être pas à tout le monde … L'auteur nous déstabilise totalement par la richesse de son écriture, tantôt extrêmement châtiée, tantôt carrément ordurière. On adore et on déteste tour à tour la nature complexe des personnages, parfois drôles, certains toxiques ou encore désabusés … Thomas se cherche et se perd, nous touche et nous agace, en tout cas ne nous laisse pas indifférents …
Ce roman “politiquement incorrect” explore habilement l'évolution sociale d'une époque ou nombre de sujets demeurent tabous.
Un point toutefois m'a laissée un peu perplexe : pourquoi ces chapitres en parallèle, sur la guerre d'Indochine vécue par son grand-père ?…

Un livre épais, très épais même, qui, de prime abord, ne m'a pas découragée tant les thèmes abordés me faisaient de l'oeil. J'ai tenté à 2 reprises de prendre ce roman à bras le corps… en vain. Trop descriptif, rythme lent, je n'ai pas accroché au delà de 100 pages avec Thomas, cet adolescent en pleine découverte de lui même et de l'autre. La rencontre ne s'est pas faite pour moi, tant pis.

Beaucoup à dire au sujet de ce roman dans lequel on entre très facilement par de franches rigolades.
L'auteur est un écrivain indubitablement ; il a su créer une atmosphère et un tableau très crédible des années 80-90 et les gens nés entre 1967 et 1974, à qui l'auteur offre quasiment un voyage en arrière tout à fait passionnant, le remercieront pour cet album de souvenirs, même si au fil du récit le texte perd en humour.
Le héros est très bien décrit, affres et obsessions typiques des adolescents, liberté absolue à laquelle on n'est pas moralement préparé, l'affreux JP est également bien vu. D'autres personnages sont moins crédibles (la mère, je trouve que le personnage n'est pas très cohérent) l' inclusion du récit du grand père n'apporte pas grand chose, à part du volume au livre. Les 800 pages se laissent lire car c'est bien écrit et on veut savoir si le héros va triompher de ses démons, même si le récit contient quantité de scènes crues dont on aurait pu se passer et plusieurs passages répétitifs qui auraient mérité un petit élagage.
Je ne peux commenter la fin sans dévoiler l'intrigue mais j'aimerais bien rencontrer l'auteur pour lui dire ... « sérieux, tout ça pour ça ?«