Cahiers In-Octavo (1916-1918)

Trois choses :
Se voir comme quelque chose d’étranger
Oublier ce qu’on a vu
En conserver le bénéfice
Ou simplement deux choses car la troisième englobe la seconde

Avant, je ne comprenais pas pourquoi je n’avais pas de réponse à ma question ; aujourd’hui je ne comprends pas comment je pouvais croire pouvoir poser une question.
Mais je ne croyais pas en fait, je demandais simplement.

Nausée après trop de psychologie. Quand quelqu’un a de bonnes jambes et est tiré vers la psychologie, il peut, en un temps très bref et en zigzaguant autant qu’il veut, parcourir des distances impossibles à parcourir dans d’autres domaines. On en reste bouche bée.

Ah, la cohérence. Ces vieilles lunes ! Tous les livres en sont pleins ; dans toutes les écoles, les maîtres l’inscrivent au tableau, la mère en rêve pendant qu’elle allaite son enfant –et toi, mon gars, tu es assis ici et tu me parles de cohérence. Tu dois avoir eu une jeunesse bien dépravée.

Les arrière-pensées avec lesquelles tu accueilles en toi le mal ne sont pas les tiennes mais celles du mal.

Si tu traversais une plaine, si tu marchais plein de bonne volonté et faisais malgré tout des pas à reculons, ce serait une chose désespérée ; mais comme tu es en train de grimper une pente raide, aussi raide peut-être que toi-même vu d’en bas, il se peut que les pas à reculons soient uniquement causés par la nature du relief, et tu n’es pas obligé de désespérer.

La psychologie est la description du reflet du monde terrestre sur la surface céleste ou plus exactement la description d’un reflet tel que nous nous le représentons, nous qui sommes saturés de terrestre, car il n’y a en fait aucun reflet, nous ne voyons que la terre où que nous nous tournions.

Il y a deux péchés humains capitaux d’où tous les autres découlent : l’impatience et la nonchalance. C’est à cause de leur impatience qu’ils ont été chassés du Paradis, c’est à cause de leur nonchalance qu’ils n’y retournent pas. Mais peut-être n’y a-t-il qu’un seul péché capital : l’impatience. C’est à cause de leur impatience qu’ils ont été chassés du Paradis, c’est à cause de leur impatience qu’ils n’y retournent pas.

Lorsque mon père disait autrefois, brandissant des menaces aussi sauvages que vides : Je vais te déchirer comme on éventre un poisson –et effectivement il ne me touchait même pas du petit doigt- voilà que la menace se réalise maintenant, indépendamment de lui.

Lorsque mon père disait autrefois, brandissant des menaces aussi sauvages que vides : Je vais te déchirer comme on éventre un poisson –et effectivement il ne me touchait même pas du petit doigt- voilà que la menace se réalise maintenant, indépendamment de lui.